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"Je ne ferai pas campagne aux législatives", promettait mercredi Emmanuel Macron, semblant avoir entendu les appels, nombreux, qui l'imploraient de se mettre en retrait en vue des élections précipitées par sa dissolution. Il n'a jusqu'ici pas tenu parole.
Au sommet du G7 en Italie, jeudi et vendredi, le président a été plus disert que jamais sur la politique intérieure lors d'un grand rendez-vous international.
Ces deux jours, les médias français ont été acheminés depuis le centre de presse, à Bari, jusqu'à la luxueuse station balnéaire de Borgo Egnazia, où se déroulaient les réunions.
A chaque fois, les journalistes doivent effectuer plus de deux heures de trajet aller-retour pour permettre à Emmanuel Macron de répondre à leurs nombreuses questions, essentiellement sur le séisme qu'il a provoqué en France.
Et tant pis pour la règle, à géométrie variable, qui voudrait qu'un chef de l’État s'abstienne de parler de politique intérieure à l'étranger.
Jeudi, il assure qu'il n'est pas affaibli sur la scène diplomatique, que sa parole "engage" bien la France sur les décisions concernant l'Ukraine, même s'il venait à cohabiter, dans moins d'un mois, avec un Premier ministre moins allant sur le soutien à Kiev.
Vendredi, il étrille les programmes du Nouveau Front populaire comme du RN, qui "font porter un très grand danger" à l'économie française.
Surtout, ce G7 lui permet de mettre en scène cette "bataille de valeurs" qu'il a mis au cœur de sa campagne.
Interrogé sur l'absence du droit à l'avortement dans la déclaration des dirigeants des sept démocraties les plus riches de la planète, il dit "regretter" le veto de la Première ministre ultraconservatrice italienne Giorgia Meloni. "On n'a pas les mêmes choix", glisse-t-il pour mieux se poser en chantre d'un progressisme centriste face à l'extrême droite.
Fureur immédiate de l'intéressée, qui l'accuse de "faire campagne électorale" en utilisant le G7.
Depuis sa dissolution surprise, dimanche dernier, de l'Assemblée nationale au soir de la défaite de son camp aux européennes face à l'extrême droite, les voix se multiplient dans la Macronie et parmi ses alliés pour qu'Emmanuel Macron reste discret.
La crainte est en effet forte que le président ne veuille trop en faire, au risque que son impopularité déteigne sur ses candidats.
Les premiers signaux n'ont guère encouragé de nombreux élus et conseillers, alors que ses collaborateurs laissent filtrer sa volonté de s'impliquer en première ligne.
"Je suis prêt à porter nos couleurs et défendre notre projet", clame-t-il dans Le Figaro Magazine, mardi, entretenant son envie de débattre avec la dirigeante du RN Marine Le Pen.
Rétropédalage mercredi: pas de face-à-face et pas de rôle de meneur.
"Le président de la République, il doit donner un cap, une vision. Mais il n'est pas là pour faire campagne aux législatives", acquiesce-t-il lors de sa conférence de presse pour donner le ton aux Français mais aussi à ses troupes abasourdies.
Le G7 a montré qu'il n'avait pas renoncé à en découdre. Après d'autres rendez-vous déjà inscrits à son agenda -- un sommet sur l'Ukraine en Suisse samedi, un conseil européen à Bruxelles lundi, des commémorations de l'Appel du 18-Juin mardi au Mont-Valérien et à l'Ile de Sein --, une nouvelle implication dans la campagne est envisagée pour la semaine prochaine, peut-être un déplacement sur le terrain.
Mais malgré cette omniprésence, Emmanuel Macron peine à dissiper certaines contradictions, au moment où sa majorité relative est menacée face aux blocs qui se constituent de part et d'autre du spectre politique.
Alors qu'il martèle vouloir parler du "fond" et des "programmes", il esquive les questions sur ses intentions, se bornant à réitérer son bilan, promettre d'aller plus loin et esquisser quelques propositions très ponctuelles.
Alors qu'il assure tendre la main à des opposants hors "extrêmes", il n'a énoncé à ce stade aucun geste concret pour intégrer dans son projet certaines de leurs mesures.
Et alors qu'il a fait de la "clarification" son leitmotiv, il refuse de dire clairement comment il se positionnera, au soir du premier tour le 30 juin, en cas de duels entre Nouveau Front populaire et Rassemblement national, ou de triangulaires.
Au gouvernement et parmi les élus macronistes, la peur d'une déroute est vive. Il n'y a peut-être plus qu'à l'Elysée que l'on sent poindre une "dynamique".