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Un outil face à la concurrence étrangère, mais aussi "la garantie" d'une culture écologique: les producteurs de sapins de Noël du Morvan, leaders en France, ont franchi une étape décisive vers une indication géographique protégée (IGP).
"L'IGP, c'est une garantie pour le consommateur, qui veut de plus en plus de produits locaux et non étrangers": au pied de Nordmann opulents, prêts à être coupés pour accueillir les cadeaux de Noël, Isabelle Broussard, cogérante des Aiguilles du Morvan, accueille avec enthousiasme la dernière victoire des "Sapins de Noël du Morvan".
Le dossier, déposé en 2020, "a été reconnu par la France", explique à l'AFP Sylvie Robert, déléguée générale d'Excellence végétale, qui défend les labels officiels de l'horticulture. "Le dossier part donc maintenant à l'Europe. On devrait avoir un logo IGP pour Noël 2025. Ce serait la première IGP horticole française en Europe", précise-t-elle.
Jusqu'à présent, seuls trois produits horticoles non comestibles bénéficient d'une IGP en Europe: le laurier des Flandres (Belgique), l'azalée de Gand (Belgique) et le rosier de Szoreg (Hongrie).
L'IGP serait surtout "la première certification d'une production de sapins française", ajoute Frédéric Naudet, premier producteur de sapins de Noël en France, basé dans le Morvan. "On défend une production française face au Danemark et à la Belgique qui inondent l'Europe", explique-t-il.
Environ 50 millions de sapins de Noël sont vendus chaque année en Europe, dont un peu plus de cinq millions en France. Leader européen, le Danemark en produit environ 12 millions, suivi par la Belgique et la France (quelque 5 millions chacun). Le Morvan, massif bourguignon de semi-montagne aux sols pauvres propices à cette culture, est le premier producteur français, avec 1,5 million d'arbres environ.
- "C'était le Vietnam" -
L'IGP ne permettrait pas seulement de placer le Morvan en fleuron du "Made in France", mais également de garantir une culture "respectueuse de l'environnement", selon Jean-Christophe Bonoron, président de l'Association française du sapin de Noël naturel (Afsnn).
L'IGP, outre l'origine du produit, oblige en effet au respect d'un label écoresponsable: bio ou au moins "Plante Bleue". Ce dernier exige de réduire engrais et produits phytopharmaceutiques, avec l'introduction d'options alternatives comme les insectes destructeurs de ravageurs.
"Nous devons prouver que nous ne traitons que de manière homéopathique et seulement quand c'est absolument nécessaire", explique M. Bonoron.
"L'an dernier, mon IFT était à 0,32", annonce fièrement Isabelle Broussard, en référence à l'indicateur de fréquence de traitements, qui calcule le nombre moyen de traitements par hectare et par an. A titre de comparaison, l'IFT moyen de la vigne en France est de 18, selon la dernière étude du Service de la statistique du ministère de l'Agriculture (Agreste) réalisée en 2019.
"Mes parents me disaient: vas-y, mets trois litres de désherbant. Mais c'est fini, ça", confirme Christian Colliette, 66 ans, petit producteur à Villargoix (Côte d'Or).
A ses côtés, son fils Vincent, 33 ans, opine de la tête. "Je veux préserver la nature et je vais diminuer encore les chimiques: on va planter du trèfle et des fèveroles qui limitent la pousse d'herbe", explique Vincent, bientôt nouveau gérant de l'exploitation familiale.
"Je me souviens du temps de mes grands-parents. C'était le Vietnam", avoue Jean-Christophe Bonoron, 58 ans. "Quand j'ai voulu diminuer les intrants chimiques, ma grand-mère m'engueulait: +il va foutre en l'air la boutique+, qu'elle disait", se souvient-il dans un rire.
"C'est vrai, les producteurs sont quand même un peu en train d'évoluer", reconnaît timidement Régis Lindeperg, membre du Conseil d'administration d'Adret Morvan, association environnementale qui s'est souvent opposée à "l'agriculture hyper-productiviste et intensive" des sapins de Noël, selon ses mots.
Pour lui, "les vrais sapins naturels, ce sont les bios. On ne les valorise pas assez."
Le bio ne représente qu'environ 1% des sapins de Noël et il n'est "pas forcément en progression", confesse Jean Fournel, président de l'Association des sapins de Noël bios. "On n'a aucune aide de l'État à la différence des légumes bio par exemple. Et on a souvent la réflexion: +je ne le mange pas le sapin alors je m'en fous+".