Partager:
Dans Capital Santé cette semaine, Caroline Fontenoy a reçu Bruno Humbeeck, psychopédagogue à l'UMons.
Les dernières études sur l'état de la santé mentale des jeunes ne sont guère réjouissantes. Ils ne vont pas bien, se posent beaucoup de questions et sont régulièrement suivis par des psychologues. Le psychopédagogue Bruno Humbeck fait face à ce constat tous les jours : "Je préfère parler pour le moment d'une génération qui est confrontée à une anxiété hors normes. C'est tout à fait normal quand on a vécu une pandémie, quand on voit une guerre à nos portes, l'éco-anxiété qui se surajoute à tous ces éléments-là. L'anxiété est plutôt un indice d'intelligence que le signe d'une éventuelle maladie mentale. Même chose au niveau de ce que vous appelez la dépression. Je préfère parler pour le moment de pertes significatives du désir de vivre".
Les conséquences du Covid
Pour l'expert, la génération de jeunes d'aujourd'hui est moins heureuse qu'auparavant : "Si on définit l'intelligence comme la capacité de se poser des questions, cette génération-ci est plus intelligente que toutes les générations qui l'ont précédée. Et donc on a affaire à une génération très intéressante, mais fragilisée par ce qu'elle est en train de vivre". Et la crise sanitaire n'a rien arrangé à la situation, toujours selon Bruno Humbeeck. "Ce n'est pas rien de voir l'humanité aux prises avec un virus, pas seulement parce que le virus montre qu'il se fout complètement des frontières, mais aussi parce que le virus indique qu'il a une forme d'intelligence, qu'on a eu l'impression d'une partie d'échecs avec des variantes. C'est ça qui a effectivement terriblement nourri l'anxiété des jeunes enfants. On ne savait pas quand ça allait s'arrêter. On n'est même pas sûr que c'est tout à fait fini".
Mais les réseaux sociaux jouent également un rôle et grossissent les anxiétés des plus jeunes : "On a affaire à une génération qui n'est pas préservée des informations adultes. Et quand vous avez un flux d'informations continues avec des images terriblement anxiogènes, vous nourrissez en permanence cette anxiété. C'est pour ça que c'est important de leur permettre de le dire sans les disqualifier en les considérant comme une génération fragile parce qu'elle parle de cette anxiété", ajoute le psychopédagogue.
À cela, il faut ajouter les problèmes « classiques » des jeunes, comme les premiers chagrins amoureux, les changements corporels, l'entrée dans l'âge adulte... Pour l'expert, l'anxiété doit rester supportable. "Dès que ça devient insupportable, parce que, par exemple, il revient en permanence avec cette anxiété que vous constatez, qu'il a des troubles du sommeil, qu'il a des troubles de l'appétit, qu'il a des troubles, y compris dans ses relations avec les autres, là, il est peut-être bon qu'il exporte son anxiété dans un espace où il peut en parler librement, sans risquer, à un moment donné, de se retrouver mis en difficulté par l'entourage", conclut Brun Humbeeck.