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Détenteur du record de longévité au poste de Premier ministre de toute l'histoire d'Israël, Benjamin Netanyahu est un "magicien" de la survie politique, passé maître dans l'art d'être reconduit à son poste malgré les rivaux et les ennuis judiciaires.
Souvent surnommé "Roi Bibi" par ses partisans, Benjamin Netanyahu, 70 ans, a prêté serment dimanche devant le Parlement et est dorénavant chef d'un gouvernement "d'union et d'urgence", formé avec son ex-rival électoral Benny Gantz.
Les deux hommes, qui se sont affrontés au cours de trois campagnes en moins d'un an, ont finalement trouvé un accord de partage du pouvoir destiné à sortir le pays de l'impasse et gérer la crise liée au nouveau coronavirus, accord selon lequel M. Gantz doit prendre la relève de M. Netanyahu dans 18 mois.
Voix rauque de ténor, cheveux argentés inamovibles, souvent vêtu d'un complet-cravate bleu sur chemise blanche, Benjamin Netanyahu, seul Premier ministre à être né après la création d'Israël en 1948, est un fin stratège habitué au louvoiement.
Né à Tel-Aviv le 21 octobre 1949, il a hérité d'un bagage idéologique musclé par son père Benzion, qui était l'assistant personnel de Zeev Jabotinsky, leader de la tendance sioniste dite "révisionniste", favorable à un "Grand Israël".
M. Netanyahu prône une vision d'Israël comme "Etat juif" avec des frontières s'étendant au nord-est jusqu'à la Jordanie. D'où sa promesse d'annexer la vallée du Jourdain située en Cisjordanie, territoire palestinien occupé par l'Etat hébreu.
- Plus jeune Premier ministre -
Le jeune Netanyahu effectue son service militaire dans un commando prestigieux. Le Proche-Orient est alors dans l'après-guerre des Six jours qui a vu en 1967 Israël s'emparer des territoires palestiniens de Cisjordanie, de Gaza et de Jérusalem-Est ainsi que du Golan syrien et du Sinaï égyptien.
En 1976, le frère aîné de Benjamin, Yoni, commandant de l'unité chargée de libérer les otages d'un vol Tel-Aviv/Paris détourné par deux organisations palestinienne et allemande en Ouganda, est tué pendant l'assaut israélien.
Ce décès ébranle profondément Benjamin Netanyahu qui fera de la "lutte contre le terrorisme", qu'il associe souvent aux Palestiniens, l'un des fils conducteurs de sa carrière.
Orateur né, pugnace, il devient diplomate à Washington, puis ambassadeur à l'ONU dans les années 1980. De retour en Israël, il est élu député en 1988 sous la bannière du Likoud (droite), dont il devient, avec son style à l'américaine, l'étoile montante.
Pendant la guerre du Golfe de 1991, qui expose Israël à une pluie de missiles irakiens, il défend le point de vue israélien sur la chaîne américaine CNN. A l'aise devant la caméra, il connaît les codes médiatiques et maîtrise l'anglais, ayant fait ses études au prestigieux Massachusetts Institute of Technology (MIT).
Il continue son ascension jusqu'à une première consécration en 1996. A 47 ans, M. Netanyahu triomphe alors du doyen Shimon Peres et devient le plus jeune Premier ministre de l'histoire d'Israël.
Son règne est de courte durée: trois ans. Mais, après une brève retraite, il retourne à sa passion, la politique, et reprend la tête du Likoud. En 2009, il redevient Premier ministre.
- "Guerre personnelle" -
Depuis, Israël n'a connu que "Bibi".
Adoré par les uns, abhorré par les autres, "Bibi" fait l'unanimité sur un point: sa faculté à affronter l'adversité.
Il se présente comme le grand défenseur de l'Etat hébreu face à l'Iran, nouvel "Amalek", ennemi mortel des Hébreux dans la Bible. Ses adversaires décrivent plutôt un autocrate prêt à tout pour rester à son poste.
Marié et père de trois enfants, il a aussi décroché un autre titre, moins glorieux, en devenant le premier chef de gouvernement à être inculpé dans l'exercice de ses fonctions.
Mais son procès pour corruption, abus de pouvoir et malversation, prévu initialement mi-mars, a été reporté de deux mois en raison de la pandémie de Covid-19.
Pour Gideon Rahat, professeur de sciences politiques à l'Université hébraïque de Jérusalem, Benjamin Netanyahu a droitisé son discours depuis ses ennuis judiciaires.
"Il est plus (...) enclin au populisme. Il se bat pour sa survie, pour éviter les tribunaux, c'est une guerre personnelle."