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Le "financier" présumé du génocide au Rwanda Félicien Kabuga doit comparaître mercredi pour la première fois devant le Mécanisme pour les tribunaux pénaux internationaux (MTPI), deux semaines après son transfert à La Haye depuis la France.
Accusé notamment de génocide, Félicien Kabuga a été arrêté en mai près de Paris, après 25 ans de cavale.
Agé de 84 ans selon le mandat d'arrêt, de 87 ans selon ses dires, il est accusé d'avoir participé à la création des milices hutu Interahamwe, principaux bras armés du génocide de 1994 qui fit 800.000 morts selon l'ONU, essentiellement au sein de la minorité tutsi.
Il devait initialement être transféré à Arusha pour y être jugé par le MTPI - qui possède une division en Tanzanie et une aux Pays-Bas - mais a finalement été envoyé à La Haye dans l'attente d'un examen médical.
La première comparution de M. Kabuga devant le MTPI, structure chargée d'achever les travaux du Tribunal international pour le Rwanda (TPIR), doit avoir lieu mercredi à 14H00 (13H00 GMT) à La Haye, a fait savoir lundi le Mécanisme dans un document officiel.
M. Kabuga a la possibilité d'assister en personne à l'audience ou, s'il le préfère, par visioconférence depuis son centre de détention, a indiqué le MTPI.
Un premier rapport médical recommande en effet que cette comparution ait lieu par visioconférence en raison des inquiétudes liées à la pandémie de Covid-19.
Le rapport indique également que "plusieurs aspects de la santé de M. Kabuga nécessitent un examen plus approfondi", a précisé le MTPI.
Il est mis en accusation par le MTPI notamment pour "génocide", "incitation directe et publique à commettre le génocide" et "crimes contre l'humanité (persécutions et extermination)".
Ancien président de la tristement célèbre Radio télévision libre des Mille collines (RTLM), qui diffusa des appels aux meurtres des Tutsi, il conteste l'intégralité des sept chefs d'inculpations qui le visent.
Félicien Kabuga est également soupçonné d'avoir contribué en 1993 à l'achat massif de machettes qui seront distribuées aux miliciens en avril 1994, une accusation qui appuie la thèse d'une planification du génocide, jamais tranchée par la justice internationale au grand dam de Kigali.
- "Santé fragile" -
Les avocats de M. Kabuga avaient formulé une requête début octobre afin de demander qu'il soit définitivement transféré à La Haye et non à Arusha, "compte tenu de son âge, de sa santé fragile et de la présence de l'épidémie de Covid-19 en Tanzanie".
Le procureur du MTPI, Serge Brammertz, avait partiellement soutenu la requête de la défense, estimant que M. Kabuga devait être "préalablement" transféré à La Haye afin de faire l'objet d'un "examen médical indépendant".
L'objectif, selon le procureur, est de déterminer si son état de santé est compatible avec un transfert et une détention dans la ville tanzanienne.
Fin septembre, la Cour de cassation française avait définitivement validé la remise à la justice internationale de M. Kabuga, considérant qu'il n'y avait "pas d'obstacle juridique ou médical à l'exécution du mandat d'arrêt" visant à le transférer à Arusha.
Classé parmi les fugitifs les plus recherchés au monde, Félicien Kabuga avait été arrêté le 16 mai dans une ville de banlieue parisienne où il résidait sous une fausse identité.
Réfugié en Suisse en juillet 1994 avant d'être expulsé, il avait ensuite temporairement rejoint Kinshasa. Il avait été signalé en juillet 1997 à Nairobi, où il avait échappé à une opération destinée à l'arrêter, puis à une autre en 2003, selon l'ONG spécialisée TRIAL.
Selon les autorités françaises, il aurait également vécu en Allemagne et en Belgique. Les Etats-Unis avaient promis une récompense pouvant aller jusqu'à cinq millions de dollars pour sa capture.