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Du gin au gel hydroalcoolique, il n'y avait qu'un pas à franchir pour une petite distillerie de Waterloo, près de Bruxelles. Quand les pharmaciens du coin ont été à court d'alcool pour leurs préparations, cette entreprise familiale n'a pas hésité.
A cette époque de l'année, c'est l'arôme du whisky qui devrait s'échapper des alambics d'Edward Martin. Mais le gestionnaire de la plus petite distillerie de Belgique a troqué la fermentation de l'orge pour une occupation bien plus pragmatique, et civique, en ces temps de coronavirus. Comme d'autres distillateurs en Europe.
La société produit désormais 200 litres d'alcool pur à 86 degrés par semaine, destinés aux pharmaciens. Ils vont servir de base à la préparation de solutions hydroalcooliques dont la pénurie se fait cruellement sentir depuis l'explosion de l'épidémie.
"Nous avons remarqué qu'il y avait un manque de gel hydroalcoolique et un manque d'alcool. Concrètement moi je me suis dit +Mais en fait c'est mon métier!+", s'exclame Edward Martin.
Certes sa spécialité c'est le gin et le whisky. "Mais le procédé est concrètement le même", explique le jeune homme, fils de pharmacienne.
Après quelques adaptations réglementaires supervisées par le syndicat des distillateurs et le soutien du gouvernement fédéral, qui a supprimé les taxes et les accises, Edward Martin consacre entièrement ses machines à cette nouvelle production.
- Civisme -
"Dans un premier temps, nous avons décidé de prendre notre base d'alcool de whisky pour le vendre aux pharmaciens. Mais ensuite (...) nous avons favorisé une fermentation 100% de sucre et pas du tout de grains", explique-t-il.
"Le but était clairement de répondre à la demande des pharmaciens, parce que cette distillation de sucre on ne sait rien en faire, on ne peut pas faire de gin, on ne peut pas faire du whisky", souligne-t-il.
Il reste un peu de stock de gin, et pendant que le whisky vieillit en fût, trois salariés, dont un à mi-temps, s'occupent de la production d'alcool pur.
En produisant l'alcool le moins cher possible, l'entreprise est en "légère perte". "Mais nous le faisons bien évidemment volontairement", affirme Edward Martin.
"C'est une preuve de civisme. Je pense que tout le monde veut aider, pour traverser ensemble cette crise qui est mondiale, et je pense qu'à notre échelle, la plus petite distillerie de Belgique pouvait apporter une petite pierre à l'édifice", se réjouit-il.
Jean-Pierre De Bluts, dont la femme est propriétaire d'une pharmacie, est venue récupérer quelques bidons.
"C'est clair que je n'aurais jamais pensé il y a quelques semaines que je serais amené à venir jusqu'ici pour trouver une provision d'alcool", reconnaît-il.
Les stocks de gel hydroalcoolique ont été rapidement écoulés et la pénurie de gel, mais aussi des ingrédients pour en fabriquer, se fait sentir "depuis le début de la crise", rappelle-t-il.
Il a donc fallu faire preuve d'imagination. "J'ai repris une liste, essayé de voir quelles étaient les distilleries disponibles, présentes sur le marché dans la région".
Le gel fabriqué par les pharmaciens, dans un premier temps destiné uniquement au personnel soignant, va désormais aussi pouvoir être vendu aux particuliers.