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En 2022, on a dénombré en wallonie et à bruxelles 186 accouchements assistés à domicile, avec des sages-femmes. C’est bien peu évidemment, comparativement à l’ensemble des accouchements (0.34%). Mais la pratique suscite la polémique chez les spécialistes. Certains la trouvent bien trop dangereuse. En novembre dernier, une maman et son enfant sont morts après un accouchement à domicile en France. Qu’en est-il en Belgique ?
Amaliya est âgée d’à peine trois mois. Ce nouveau-né n’est pourtant pas comme les autres. Sa naissance est loin d’être banale : sa mère, Evangelia a accouché à domicile, dans une piscine. "Je suis rentrée dans la piscine et en 50 minutes, elle est sortie. Ce qui est génial, c’est que les seules personnes présentes sont mon compagnon, mon bébé et bien sûr, la sage-femme. On est vraiment dans notre bulle. Il n’y a pas toutes ces lumières fortes comme à l’hôpital", explique la jeune maman. "Ici, la lumière était tamisée, il faisait calme, c’étaient nos odeurs… C’était vraiment notre environnement à nous", précise Evangelia. Un constat que partage le papa : "C’est une expérience qui nous a rapproché".
Une pratique peu courante en Belgique
Pour décrocher l’autorisation d’accoucher à domicile, Evangelia a dû démontrer au fil des consultations que le risque de complication était faible. "A aucun moment, je n’ai eu peur d’accoucher à domicile. J’étais très bien renseignée. Il n’y avait pas de quoi avoir peur". Accoucher dans son bureau ou dans son salon et sans gynécologue, c’est une pratique encore marginale chez nous. À Bruxelles et en Wallonie, cela représente moins d’1 % des accouchements. Une pratique vraiment sans danger ? Les avis sur cette question divergent.
"Il y a un risque accru"
En novembre dernier, une maman et son bébé sont décédés en France lors d’un accouchement à domicile. Une issue tragique parmi d’autres pour ce spécialiste : "Sur les 5 dernières années, on a eu deux transferts trop tardifs de patientes qui accouchaient à domicile. Malheureusement, l’un des bébés est décédé d’une asphyxie sévère. Le deuxième en garde de sévères séquelles", explique Pierre Bernard, gynécologue. D’après une étude américaine, le risque pour l’enfant est trois ou quatre fois plus élevé qu’à l’hôpital. Un chiffre à prendre avec des pincettes puisqu’aux Etats-Unis, les hôpitaux sont plus éloignés des domiciles. "C’est sans doute un chiffre exagéré, mais ça reste un risque relatif. Si le bébé manque d’oxygène, cela peut tourner en asphyxie et la réaction doit être immédiate", précise Pierre Bernard.
"Pas plus qu’à l’hôpital"
Mais cette spécialiste n’est pas du même avis. Pour elle, cette pratique est réservée aux grossesses à bas risques. "C’est aussi un état psychologique de la maman, l’état du couple, si la mère est avec quelqu’un. Ce sont aussi des critères logistiques : il faut que l’habitation soit facilement évacuable en cas de problème", déclare Aline Schoentjes, cofondatrice de l'ASBL "Amala espace naissance". Elle ajoute les résultats d’une autre étude, qui indiquent que le danger est surtout présent pour le premier enfant, mais pas pour les suivants. "Dès le deuxième accouchement, il y a moins de risque de recourir à une ventouse ou une césarienne par exemple. Plus les femmes iront vers où c’est juste pour elle et moins il y aura de traumatismes obstétricaux ou gynécologiques. Elle se sentira dans un meilleur environnement".
Un entre-deux
L’hôpital Erasme propose une alternative : un gîte de naissance. L’environnement y est moins médicalisé et il y a également la possibilité d’accoucher dans une baignoire. Ces chambres seront bientôt obligatoires dans les établissements de la capitale qui disposent d’une maternité. "Certaines ont besoin d’être chez elles, d’autres ont encore ce besoin d’être à l’hôpital, avec un accompagnement comme à la maison. Cela permet ce juste-milieu. Le matériel est là, mais caché", explique Lara Boucher, sage-femme. En 10 ans, 2200 enfants sont nés ici.
Mais alors, au final, quelle option privilégier ? Gîte de naissance, accouchement classique, à domicile… À chacun ses avantages, mais aussi, son lot de critiques.
Une certitude sur laquelle se rejoignent tous nos interlocuteurs : l’importance pour les futurs parents, de bien s’informer pour poser un choix éclairé.