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Les extractions judiciaires, des missions particulièrement sensibles

L'attaque d'un fourgon mardi, dans laquelle deux agents pénitentiaires sont décédés, met en lumière la dangerosité des transferts de détenus, des missions particulièrement sensibles qui souffrent d'un manque de personnel et de moyens alors que la population carcérale ne cesse d'augmenter.

Comment fonctionnent les extractions ?

Auparavant réalisés par les forces de police et de gendarmerie, les transferts de détenus ont été, depuis 2011, progressivement dévolus aux agents de l'administration pénitentiaire.

Plusieurs unités sont chargées de mener ces opérations. Les pôles de rattachement des extractions judiciaires (PREJ) exercent à l'échelle régionale. En 2023, ils ont réalisé 130.199 transferts de détenus.

Par ailleurs, des équipes locales de sécurité pénitentiaires (ELSP) ont commencé à être déployées depuis 2019 dans les établissements pénitentiaires. Actuellement au nombre de cent, elles peuvent appuyer en personnel les PREJ mais réalisent aussi les extractions des détenus pour des rendez-vous médicaux.

C'est l'Autorité de régulation et de programmation des extractions judiciaires (Arpej) qui définit le niveau d'escorte à attribuer à chaque personne.

Quatre niveaux d'escorte existent: le niveau 1, pour des détenus de droit commun, prévoit deux agents, et le niveau 2, qui représente la plus grosse part des escortes, impose trois agents.

Le niveau 3 est prévu pour des personnes liées au terrorisme, à la criminalité organisée ou aux personnes susceptibles d'occasionner un trouble à l'ordre public, et prévoit trois agents, mais peut être renforcé au besoin, tandis que le niveau 4, le plus lourd, est réservé aux détenus particulièrement surveillés (DPS). Ce niveau impose que des forces de sécurité intérieure (police, gendarmerie) viennent en appui. Les équipes régionales d'intervention et de sécurité (ERIS) peuvent aussi parfois être appelées en renfort.

Les agents qui accompagnent les transferts sont équipés d'un gilet pare-balles, d'un pistolet semi-automatique 9 mm, d'un baton téléscopique de protection et d'une bombe incapacitante.

Y a-t-il souvent des incidents ?

Avant l'attaque de mardi, exceptionnelle au vu de sa violence, le dernier épisode notable remonte à 2019, quand un commando armé avait fait feu sur une escorte pénitentiaire devant le palais de justice de Tarascon (Bouches-du-Rhône), sans toutefois faire de blessés.

"On sait très bien qu'en faisant ce travail, le risque est là", reconnaît Dominique Gombert, secrétaire général adjoint du syndicat FO Pénitentiaire.

Mais au quotidien, les escortes doivent faire face à des incivilités, telles que des "queues de poisson sur la route", indique-t-il. Dans les tribunaux, les rendus de jugement peuvent aussi être un peu houleux, avec des proches de détenus prenant à partie les agents.

A quels problèmes sont confrontés les agents?

"Nous avons une surpopulation carcérale, nous effectuons de plus en plus d'extractions judiciaires", déplore Didier Kandassamy, secrétaire local de FO Justice au centre pénitentiaire de Fleury Mérogis. Le nombre de détenus s'est établi à 77.450 au 1er avril, du jamais vu.

Dans ce contexte, "il y a de plus en plus de conflits, on bat les records d'agressions physiques et verbales", selon Guillaume Pottier, responsable Ufap-Unsa pour les Hauts-de-France.

"Aujourd'hui on a un effet ciseau entre une population pénale qui augmente tous les mois et du personnel qui baisse tous les mois", en raison de départs massifs à la retraite et de difficultés à recruter, détaille Wilfried Fonck, secrétaire national du syndicat Ufap-Unsa.

Le nombre d'agents était de 1.116 dans les PREJ en avril 2024 et 1.354 dans les ELSP selon des chiffres de mars 2024.

Selon M. Fonck, "il y a une pression politique énorme pour que les extractions judiciaires soient exécutées coûte que coûte" et "l'administration pénitentiaire essaie parfois de descendre le niveau d'escorte".

Les syndicats ont présenté mercredi au ministre de la Justice Eric Dupond-Moretti une série de revendications pour renforcer la sécurité de ces missions.

Parmi elles, un usage plus large de la visioconférence ou le déplacement des magistrats dans les établissements.

Par ailleurs, "ça fait belle lurette que nous réclamons des voitures banalisées pour essayer de dissimuler un peu l'administration pénitentiaire. Parce que du coup, on devient des cibles comme la police ou la gendarmerie", a déclaré à l'AFP Florence Tahboub, secrétaire locale Ufap-Unsa Justice à Fleury Mérogis.

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