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Le chef de l'opposition vénézuélienne Juan Guaido mobilise à nouveau ses partisans samedi pour maintenir la pression sur le président socialiste Nicolas Maduro, au milieu du mécontentement des Vénézuéliens confrontés au manque d'eau et d'électricité.
Comme à chaque fois depuis ces dernières années, le chavisme, le mouvement politique au pouvoir, qui n'entend pas laisser le champ libre à ses adversaires, appelle à une contre-manifestation à la mi-journée également.
"Soyons présents dans la rue. Cette lutte est en faveur de meilleures conditions de vie de tous les Vénézuéliens", a écrit vendredi soir sur Twitter M. Guaido, reconnu président par intérim par plus de cinquante pays.
Avec cette nouvelle manifestation, l'opposant âgé de 35 ans cherche à donner un nouveau souffle à ce qu'il a baptisé l'"opération liberté", à travers laquelle il entend marcher sur le palais présidentiel de Miraflores à une date encore non définie pour prendre le pouvoir.
La marche de samedi vise aussi à protester contre les coupures de courant à répétition et les problèmes d'approvisionnement d'eau, selon M. Guaido.
Le Venezuela a vécu sa pire panne d'électricité au début du mois de mars. Et depuis une dizaine de jours, des coupures de courant intermittentes plongent le pays dans le noir à intervalles réguliers et créent de graves problèmes de distribution d'eau. Les pompes à eau des habitations et des immeubles, qui fonctionnent à l'électricité, se retrouvent à l’arrêt.
La situation est telle que le gouvernement a réduit la journée de travail de huit à six heures et a suspendu les cours dans les établissements scolaires. Un rationnement de l'électricité a également été mis en place durant tout le mois d'avril.
"On est fatigués, mais on doit descendre dans la rue car c'est la seule façon de faire partir ces gens!", a déclaré à l'AFP Verony Mendez, 48 ans, sans eau courante depuis deux mois.
Devant les puits, les égouts ou les fontaines, les Vénézuéliens forment de longues files d'attentes pour faire le plein du précieux liquide, ne serait-ce que pour l'utiliser dans leurs toilettes ou se laver.
Le président Maduro a appelé la population à faire des réserves, laissant entendre que le problème allait durer.
Il rend les sanctions américaines responsables des problèmes économiques du Venezuela. M. Guaido estime, lui, que c'est l'incurie du gouvernement et la corruption en son sein qui sont à blâmer.
- "Usure de Guaido" -
Selon un rapport interne de l'ONU consulté par l'AFP la semaine dernière, sept millions de personnes --près du quart de la population vénézuélienne-- ont besoin d'aide humanitaire et manquent de nourriture et de soins médicaux.
Le Conseil de sécurité des Nations unies va d'ailleurs se réunir mercredi à la demande de Washington, et en présence du vice-président américain Mike Pence, pour discuter de la crise humanitaire au Venezuela. Vendredi, les Etats-Unis ont annoncé de nouvelles sanctions contre 34 navires du groupe pétrolier public vénézuélien PDVSA.
De son côté, le pouvoir en place a aussi renforcé ces derniers jours la pression sur M. Guaido, le privant de son immunité parlementaire, permettant ainsi la poursuite de la procédure pénale engagée à son encontre, et le déclarant inéligible durant 15 ans.
Difficile d'anticiper les conséquences concrètes de ces décisions dans ce pays où personne ne reconnaît la légitimité de personne.
M. Guaido lui-même a affirmé que "rien" ne l'arrêterait.
"Le gouvernement parie sur l'usure de Guaido, qui a réussi jusqu'à présent à conserver un large soutien politique et populaire", estime le politologue Luis Salamanca.
Les manifestations de l'opposition doivent composer avec la présence des "colectivos", ces hommes armés agissant en milice pour s'en prendre à l'opposition.
Circulant à bord de motos et en groupes, généralement armés, la capuche sur la tête, ils surgissent au milieu des manifestations. M. Maduro les a appelés à maintenir l'ordre.
"On est en train de résister", assure Larry Moreno, 65 ans, vendeur de légumes sur un marché de Caracas, qui accuse l'"opération liberté" de Guaido de servir à "camoufler" une prochaine intervention militaire américaine.
Selon l'ONG de défense des droits de l'homme Foro Penal, 117 personnes ont été interpellées durant les manifestations de la semaine dernière.