Partager:
Ça devait être une fête, ça s'est transformé en chaos total. West Ham s'est qualifié pour la finale de l'Europa Conference League en validant à Alkmaar sa victoire de la semaine dernière (2-1, 0-1).
Mais on ne se souviendra que des scènes hallucinantes et tristes de la fin du match.
Des supporters de l'AZ ont pris d'assaut la tribune principale du stade AFAS à Alkmaar, dans le nord-ouest des Pays-Bas, peu après le coup de sifflet final, avant de se battre contre les supporters de West Ham qui fêtaient leur victoire, a indiqué l'agence de presse néerlandaise ANP.
"Les supporters se sont assis derrière le but de l'AZ et ont franchi une grille pour accéder à la tribune principale, après quoi ils ont assailli les supporters de West Ham", a déclaré l'ANP. "À partir de là, les poings ont volé", a ajouté l'agence.
Les joueurs défendent leur famille en tribune
D'autres images montrent des joueurs de West Ham sautant par-dessus les planches pour intervenir dans la bagarre tout en faisant des signes frénétiques. On y voit notamment le Brésilien Lucas Paqueta.
David Moyes, l'entraîneur de West Ham United, a déclaré après le match que ses joueurs s'étaient impliqués parce qu'ils voulaient protéger leurs amis et leur famille. "Mes parents et mes amis étaient également dans les tribunes. Je n'ai vu que plus tard ce qui s'est passé", a déclaré M. Moyes à l'ANP.
Les Pays-Bas confrontés à la montée de la violence dans le football
Des fumigènes dans les tribunes aux invasions de terrain, les Pays-Bas sont confrontés à une recrudescence du hooliganisme dans le football qui a culminé avec l'agression de supporters anglais de West Ham par ceux de l'AZ Alkmaar.
Les autorités néerlandaises s'étaient déjà attelées à ce problème à la suite d'une dizaine d'incidents graves qui se sont produits cette saison, choquant le pays. Mais cette fois, le problème a pris une dimension internationale.
"La violence dans le football est un monstre à plusieurs têtes qu'il n'est pas facile d'éradiquer", écrivait en avril la ministre néerlandaise de la Justice, Dilan Yesilgoz, dans une lettre adressée au parlement.
Elle réagissait à l'agression du milieu de terrain de l'Ajax Amsterdam Davy Klaassen, blessé à la tête par un briquet jeté des tribunes par un supporter de Feyenoord. La ministre avait estimé qu'avec cette attaque, on "touchait le fond" et avait ordonné l'ouverture d'une enquête.
Mesures renforcées
Mais l'agression contre Klaassen est loin d'être un acte isolé, ce qui a soulevé des questions sur les raisons de ces violences et les moyens de les combattre. Dimanche encore, un arbitre a dû interrompre un match de première division entre l'Ajax et le FC Groningue lorsque un supporter est entré sur le terrain alors que des fumigènes partaient des tribunes.
Début mai, plus de 150 supporters avaient été interpellés après avoir scandé des slogans antisémites lors du match entre l'AZ Alkmaar et l'Ajax.
En février, un supporter du PSV Eindhoven âgé de 20 ans a été interdit de stade pendant 40 ans pour avoir attaqué le gardien serbe de Séville, Marko Dmitrovic.
Plusieurs autres matches impliquant des équipes de première division néerlandaise comme le FC Utrecht, le FC Twente, les Go Ahead Eagles, le RKC Waalwijk ou le Sparta Rotterdam ont dû être annulés pour cause de hooliganisme.
Dilan Yesilgoz, dans sa lettre au parlement, a également déclaré que le gouvernement envisageait de renforcer les mesures anti-hooligans, notamment l'interdiction de l'alcool, l'attribution de places assises à l'avance et des poursuites pénales plus sévères.
Le nombre d'interdictions de stade à l'encontre de supporters au cours de la saison dernière, après la réouverture des stades après la pandémie de Covid, a été "deux fois plus élevé qu'au cours de la dernière décennie", a encore dit la ministre de la Justice.
"Anarchie"
Les experts qui se sont penchés sur le problème avancent un certain nombre de facteurs, à commencer par la frustration accumulée par les fans sevrés de matches lors des confinements liés au Covid.
Jan Brouwer, professeur de droit spécialisé dans l'étude de la violence liée au football à l'université de Groningue, a lui noté que "la violence liée au football devient plus intense". "Beaucoup d'anciens supporters qui en avaient assez sont partis, et beaucoup de jeunes sont arrivés", a-t-il analysé pour la chaîne publique NOS. "Une sorte d'anarchie s'est installée après avoir interdit l'accès aux stades (pendant la pandémie)".
Selon la ministre de la Justice, les Pays-Bas vont se tourner vers la Grande-Bretagne afin d'étudier le "modèle anglais", dont la lutte contre le hooliganisme a eu des effets positifs spectaculaires.
Dans les années 1980, les clubs de football anglais avaient été bannis des compétitions européennes pendant cinq ans après la mort de 39 personnes lors de la finale de Coupe d'Europe des clubs champions entre Liverpool et la Juventus au stade du Heysel, à Bruxelles.
Le modèle britannique s'appuie sur le droit pénal pour sévir, ainsi que sur de longues interdictions de stade.
Parmi les hooligans sanctionnés, l'agresseur de Klaassen a écopé de 60 heures de travail d'intérêt général, celui de Dmitrovic de deux mois de prison ferme.