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Voilà presqu'un mois que de terribles inondations ont touché la Wallonie. Des crues sans précédent dans certaines localités. Ingrid, Pierre et Jean-Marc ont tous les trois vu leur maison complètement ravagée par les eaux. Aujourd'hui, ils voudraient se relever et entamer les travaux. Mais ils ne peuvent pas car des fonds promis n'ont toujours pas été débloqués.
Point commun entre leurs 3 histoires : ils sont assurés chez Ethias. Et ces derniers jours, ils ont multiplié les appels et heures d'attente au call center de l'assureur pour enfin disposer de cet argent : une avance de 10.000 ou 15.000 euros (selon les cas).
Ingrid, sinistrée à Thon-Samson
"On a appris que les avances étaient en stand-by tant qu'un accord avec le gouvernement n'était pas trouvé pour le montant des indemnités, nous a écrit Ingrid, sinistrée de Thon-Samson, via le bouton orange Alertez-nous. En quoi, nous, les sinistrés devrions-nous encore subir cela ? C'est une honte. Nous, on attend depuis 17 jours et croyez-moi, on les compte".
Tout le rez-de-chaussée de la maison d'Ingrid a été inondé lors des crues survenues le 15 juillet. "C'est une maison passive et nous avons eu entre 80 cm et 1 mètre d'eau donc on a dû tout casser en bas pour faire respirer la charpente", explique-t-elle. Après les crues, les experts ont rapidement fait le nécessaire pour demander que 10.000 euros soient débloqués afin qu'Ingrid puisse entamer les travaux. "On pourrait facilement avancer mais on est bloqués", déplore-t-elle. Après 2 semaines d'attente, elle a rappelé Ethias et les experts intervenus dans son dossier ont fait de même mais sans succès. Sa patience a des limites : "Ca va bien une semaine mais tout le monde n'a pas 20.000 euros sur son compte épargne", lance encore Ingrid.
Chez Pierre, à Ensival, "il ne reste que 4 murs et un toit"
Des témoignages comme le sien, nous en avons reçu plusieurs via le bouton orange Alertez-nous. Pierre (prénom d'emprunt) nous a également contactés. Il vit à Ensival, au bord de la Vesdre. Il a eu 4 mètres d'eau dans sa maison donc tant le rez-de-chaussée que le 1er étage sont détruits. "Il ne reste que 4 murs et un toit. La structure est heureusement intacte", nous a-t-il expliqué.
Sa maison est évidemment inhabitable : il a dû relouer un logement et aimerait que les choses s'accélèrent.
"Il y a deux semaines, on a appelé Ethias, ils venaient de recevoir le rapport de l'expert. Ils ont dit que dans quelques jours, les 15.000 euros seraient sur le compte. On a encore rappelé la semaine dernière et après une heure et demie d'attente, un gentil monsieur nous a dit qu'il allait faire remonter l'information à son superviseur et que d'ici mercredi, les fonds allaient être libérés. On est jeudi et je ne vois toujours rien", raconte Pierre.
Aujourd'hui, ce sinistré est en colère : il paye un nouveau loyer, a pris des engagements pour les travaux de sa maison et a un certain nombre de factures en attente.
"Pour moi, Ethias ne respecte pas les clauses du contrat. Le contre-expert investigue de son côté mais je trouve cela totalement inadmissible et irresponsable", lance-t-il.
1,84m d'eau dans la maison de Jean-Marc, à Trooz
Jean-Marc et son épouse font quant à eux partie des sinistrés de Trooz. Chez eux, l'eau est montée à un mètre 84. Tout le rez-de-chaussée est donc à refaire. En attendant que les murs sèchent, le couple s'est organisé comme il peut.
"On vit à l'étage et on utilise l'extérieur. On nous a prêté un barbecue pour faire à manger et une table en attendant de pouvoir racheter des meubles", explique Jean-Marc.
"Ça fait plus de deux semaines que l'expert est passé. Il nous a octroyé une avance de 10.000 euros et à ce jour, on a toujours rien reçu. En attendant, il faut payer les acomptes si on veut avancer avec les corps de métier. Je téléphone tous les jours chez Ethias et on me donne à chaque fois une réponse différente, ou bien on me raccroche au nez. Ça fait un mois que nous sommes sinistrés et rien n'avance", raconte-t-il.
Le couple a déjà changé le boiler pour avoir de l'eau chaude et a commandé sa cuisine. Il aimerait également louer un véhicule de remplacement, mais il faut payer 250 euros de caution. Sans compter qu'il n'y a plus de connexion internet : "On doit utiliser la 4G tout le temps". Jean-Marc se sent pris à la gorge et aimerait que cet argent arrive pour retrouver un peu de sérénité et enfin "tourner la page et avancer".
Que disent les assureurs ?
Ce jeudi, on apprenait que le gouvernement wallon et les assureurs belges se sont accordés sur l'indemnisation des personnes sinistrées. Les assureurs indemniseront ainsi les victimes jusqu'à 590 millions d'euros au lieu du montant légalement plafonné à 350 millions d'euros en cas d'une catastrophe comme des inondations.
Nous avons demandé à Ethias si cet accord allait permettre de débloquer ces avances attendues par les sinistrés.
"Il n'y a pas de blocage, nous assure Serge Jacobs, porte-parole. Le seul blocage qui peut se produire, c'est au niveau du temps nécessaire pour faire les paiements. On fait tout pour payer le plus vite possible", explique-t-il. "Ethias s’y est engagée : elle indemnisera chaque sinistré dans les 30 jours de l’expertise comme le prévoit le contrat. Mais il est clair que les expertises vont prendre du temps, vu l’ampleur du travail et que 30 jours c’est long quand on n’a plus rien", note encore l'assureur.
"On paye dans les 30 jours après la clôture de l'expertise", précise Serge Jacobs. C'est donc 30 jours maximum. Pour un dossier clos auprès de l'assurance le 22 juillet par exemple, les fonds seront libérés au plus tard le 22 août.
Mais la quantité de dossiers à traiter est particulièrement importante : 10.000 dossiers ont été ouverts rien que chez Ethias.
"On ne va pas cacher qu'il y a des retards mais pas de blocage, on fait tout pour régler le plus vite possible les dossiers", insiste le porte-parole, qui explique que c'est aussi pour cette raison que 1.500 euros ont été versés à chaque assuré victime des inondations, afin de faire face aux dépenses de première nécessité.
"C'est d'une ampleur que le secteur n'a jamais connu"
François De Clippele, porte-parole d'Assuralia, l’union professionnelle des entreprises d’assurances, le confirme : le secteur des assurances fait face à une situation exceptionnelle. "C'est un tel nombre de dossiers à traiter en pleines vacances, la mobilisation est colossale. Certains assureurs ont fait appel à des collaborateurs pensionnés. C'est d'une ampleur que le secteur n'a jamais connu", déclare-t-il.
Il précise également qu'historiquement, Ethias a un ancrage important en région liégeoise, et donc sans doute davantage d'assurés à indemniser. "Ceux qui ont moins de dossiers à traiter ont sans doute été un peu plus rapides", nous explique encore François De Clippele.
Autre élément à prendre en considération dans cette question de délai de paiement : l'appel à un contre-expert. Un peu comme quand on va vouloir demander un deuxième avis médical lorsqu'on nous annonce qu'on est malade, des sinistrés vont faire appel à un contre-expert pour avoir un deuxième avis.
"Les victimes sont à un tel point démunies qu'elles ont sans doute besoin de ce deuxième avis. Mais quand on s'engage dans une contre-expertise, cela fait perdre du temps", explique encore le porte-parole d'Assuralia.
Tout n'est plus qu'une question de jour en principe pour Ingrid, Pierre, Jean-Marc et tant d'autres sinistrés qui aspirent à rendre leur foyer vivable à nouveau.