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Claude est le patron d'une micro-entreprise active dans le domaine du transport événementiel. "Je suis seul et je travaille avec des indépendants. Je loue des voitures de cérémonie avec chauffeur pour des mariages ou des fêtes d'entreprises." Depuis le confinement, son activité est à l'arrêt complet. "Ma dernière mission date du 10 mars. Depuis, plus rien. Tous nos événements ont été annulés" dit l'homme qui nous a contactés via le bouton orange Alertez-nous.
Deux aides en Wallonie
Pour un indépendant en Wallonie, il existe actuellement deux aides. Il y a le droit passerelle, auquel ont droit les indépendants de Belgique dont l'activité est ralentie voire arrêtée par le coronavirus. Près de 350.000 d'entre-eux ont déjà introduit une demande. Cela représente une compensation de 1 614,10€ (avec charge de famille) ou 1 291,69€ (sans charge de famille) par mois depuis mars. Il y a ensuite la prime unique de 5.000€ en Wallonie (il existe une prime du même genre à Bruxelles d'un montant de 4.000€).
"Sans les 5000€, c'est la faillite"
Problème : hier, Claude n'avait pas encore touché ces 5000€. "J'en ai un besoin urgent. Mes frais fixes s'élèvent à 2500€ par mois. Il faut y ajouter 998€ de crédit d'entreprise et 1100€ de leasing de voiture . J'ai déjà reçu des mises en demeure de ma banque car je n'ai pas pu payer ces deux crédits en mars et en avril. Et comme je suis caution dessus, ils se retourneront contre moi et je serai fiché à la banque nationale si je les paie en retard." Une situation qui peut être sauvée. "Ma banque m'octroiera un report de 6 mois sur ces crédits si je rembourse mars et avril grâce aux 5000€. Sans ça, ma société sera en cessation de paiement le 3 mai et je devrai déposer le bilan. Ce sera la faillite."
Les premières primes viennent d'être envoyées et les faillites ont été gelées
Première bonne nouvelle pour Claude : les paiements de cette prime de 5000€ ont justement été envoyés hier aux 10.315 premiers demandeurs dont le dossier était complet. Et 31.411 autres ont reçu une demande de renseignements complémentaires, a annoncé le ministre wallon de l'Economie Willy Borsus. "En tout, nous avons reçu 52.000 demandes et les quelque 10.000 dernières à traiter le seront dans les plus brefs délais", assure sa porte-parole Pauline Bievez. Pour ce faire, "77 personnes du Service Public de Wallonie (SPW) se sont portés volontaires pour renforcer nos équipes et faire avancer cela au plus vite."
Seconde bonne nouvelle : les faillites sont gelées en Belgique. Un moratoire temporaire sur les faillites d'entreprises a en effet été approuvé le 11 avril dernier.
On est en train de crever
Claude est loin d'être le seul indépendant inquiet en Wallonie. Mélissa est infirmière esthéticienne. Elle travaille avec des chirurgiens esthétiques dans des centres et s'occupe d'épilation définitive. Un des secteurs non-essentiels qui a dû fermer. "On est en train de crever", résume-t-elle. Elle aussi a bien touché son droit passerelle début du mois. Mais elle s'inquiète de ne pas pouvoir assumer certains frais inhérents aux indépendants tant qu'elle n'aura pas reçu les 5000€. "Pour le 15 juin, je dois avoir payé mon précompte professionnel qui avait été encodé juste avant le confinement. Et pour le 20 juin au plus tard, je dois avoir payé mes lois sociales et la TVA. Pour moi, c'est impossible sans ces 5000€."
De nombreux reports de cotisations pour les indépendants
Heureusement, là aussi, le fédéral a apporté des solutions : Il y a premièrement un report des cotisations sociales pour mars et avril, ainsi qu'une possibilité de dispense de ces cotisations sociales pour les indépendants dont les liquidités sont au plus mal. De plus, dès le début du confinement, il avait été décidé que tous les indépendants pouvaient demander un plan de paiement, une exonération des intérêts de retard et une remise des amendes pour non-paiement pour le précompte professionnel, la TVA, l'impôt des personnes physiques, l'impôt des sociétés et l'impôt des personnes morales. "Je viens de demander une dispense de mes lois sociales", confirme d'ailleurs Mélissa.
Comment tenir encore quelques mois et quid de l'année prochaine ?
Mais pour Claude, l'avenir de sa société s'annonce tout de même sombre. "J'ai besoin de 4500€ de bénéfices par mois. Et avec ça, je ne me verse aucun salaire. Les 5000€ de la Région wallonne, c'était bien pour un mois ou deux. Mais l'activité ne va pas reprendre totalement après le 3 mai. O On commence déjà à recevoir des annulations de mariages pour juillet. A mon niveau, j'estime que si le déconfinement commence le 4 mai, je ne retrouverai environ 80% de mon activité que vers octobre."
La crainte se fait sentir aussi chez Mélissa, mais plus pour l'an prochain, car les mesures énoncées ci-dessus "ne sont que des reports". Il faudra donc payer tout cela l'année prochaine, tout en ne sachant pas quand ils vont pouvoir reprendre une activité normale.
La Flandre octroie 160€ par jour de confinement
Tous les deux trouvent dès lors injuste la différence de traitement entre la Wallonie et la Flandre. "J'habite en Flandre même si j'ai ma société en Wallonie", explique Claude. "Je vois la différence avec mon voisin qui est fleuriste en Flandre."
En effet, la Flandre, en plus d'un forfait fixe de 4000€, octroie 160€ par jour aux indépendants et PME touchées par l'inactivité due au coronavirus.
Une prime journalière en Wallonie?
Est-ce que la Région wallonne compte mettre en place d'autres aides pour les mois à venir ? Une prime journalière complémentaire à partir du 19 avril pour les PME et les indépendants pouvant justifier de frais fixes dépassant les 5.000 euros durant la période de confinement est proposée par le cdH, parti d'opposition. Ce texte sera débattu jeudi lors d'une nouvelle réunion de la commission spéciale coronavirus du parlement wallon.
Pas la priorité actuelle du gouvernement wallon
Il semble cependant que cette proposition ne soit pas à l'ordre du jour pour le gouvernement wallon. "Une indemnité journalière est difficile à budgétiser" ne sachant pas quand l'activité économique va pouvoir reprendre comme avant, explique premièrement Pauline Bievez, la porte-parole du ministre Borsus. "On est conscients des impacts du confinement sur les indépendants, mais on analyse la situation au jour le jour", ajoute-t-elle, sans s'avancer sur ce dossier.
Ce qui occupe en ce moment-même le gouvernement wallon, ce sont les aides à apporter aux entreprises et indépendants qui ont pu continuer à fonctionner et qui donc sont exclues de la prime de 5000€, mais qui ont vu leur chiffre d'affaire drastiquement diminuer.
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