Une enquête de la Fondation contre le cancer, réalisée par Gfk auprès de jeunes de 18 à 25 ans, montre qu'ils sont aujourd'hui presque un sur trois (32%) à fumer et un sur cinq ne laissant pas passer un jour sans allumer une cigarette, lit-on jeudi dans Le Soir. Eclairage avec Isabelle Jamin, tabacologue au CHR Citadelle.
"On a essayé une fois pour faire comme toute le monde. Et puis voilà, on continue", "Ma mère fumait à côté de moi tout le temps et j’ai eu envie de fumer un jour à cause de ça", "C’est un moyen comme un autre de se relaxer", "une question de cool attitude"... Quelle que soit la raison qui les a poussé à tirer sur la première cigarette, entre 18 et 25 ans, ils sont en Belgique environ 20% à fumer tous les jours, 13% à fumer parfois, un sur trois au total.
C'est davantage que ce que les enquêtes montraient ces dernières années. L'usage régulier ne distingue d'ailleurs plus les jeunes filles: 19% fument quotidiennement, contre 21% pour les garçons. Par contre, des différences importantes existent entre régions: 26% de fumeurs quotidiens en Wallonie contre 17% en Flandre. D'après la même enquête, la cigarette électronique aurait été testée par 29% des 18-25 ans, presque un jeune sur dix l'ayant adoptée.
"Les jeunes sont beaucoup plus rapidement dépendants que précédemment"
Le tabac est une des drogues qui rend le plus rapidement dépendant. Après une bouffée, il ne faut que quatre secondes à la nicotine pour arriver au cerveau. "C’est extrêmement rapide parce que les quantités de nicotine délivrées par chaque cigarette sont très importantes. L’industrie du tabac a modifié les cigarettes pour amener de grande quantité de nicotine. Donc, les jeunes sont beaucoup plus rapidement dépendants que précédemment. Comme ils sont jeunes, leur cerveau est très malléable et la dépendance s’installe plus vite", explique Isabelle Jamin, tabacologue au CHR Citadelle.
7.000 décès chaque année
Le tabac est néfaste pour les poumons, le cœur, les artères, la peau, le système digestif, les dents et les performances sexuelles. Il est la cause de 7.000 décès chaque année. L’interdiction de la publicité pour le tabac décidé en 1999 ne produirait plus de résultat. Chaque année, seulement 2,5 % des fumeurs parviennent à arrêter. "Avant la fin de mes études", "Quand j’aurai des gosses", "26 ans", les jeunes rencontrés par notre journaliste pensent tous arrêter un jour. Mais y arriveront-ils ?
Un combat déséquilibré contre les lobbies du tabac
Anne Boucquiau, médecin et responsable du département prévention à la Fondation contre le cancer, ne cache pas son inquiétude quant aux résultats de l’enquête de la Fondation contre le cancer. "Les chiffres sont tout à fait alarmants", martèle-t-elle. "Le tabac est la première cause des cancers en Belgique."
La médecin déplore le combat déséquilibré des forces en présence dans la lutte concernant le tabac : "On a en face de nous des industries du tabac qui sont très puissantes, très riches. Rien qu’à Bruxelles, il y a 97 lobbyistes déclarés pour les produits du tabac." "On a vraiment un pot de fer contre un pot de terre", résume-t-elle.
