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C'est la question que tout le monde se pose depuis le début de la semaine. Le gouvernement minoritaire, depuis le départ de la N-VA, de Charles Michel a-t-il besoin d'un vote de confiance à la Chambre s'il veut exister, en tout cas jusqu'aux élections fédérales de mai prochain ? La question a été posée au service des affaires juridiques de la Chambre. Et notre journaliste politique Loïc Parmentier s'est procuré la réponse. Vous trouverez la note ci-dessous. En résumé, la Constitution ne l'impose pas. Mais il s'agit d'une "coutume constitutionnelle". Et cette notion de coutume est forte. Dès lors, selon notre journaliste, on peut estimer qu'il est difficile, mais pas strictement impossible, de s'en passer.
LA NOTE JURIDIQUE COMPLÈTE
Selon la coutume constitutionnelle, après la formation d'un nouveau gouvernement à la Chambre, le Premier ministre fait une déclaration gouvernementale, suivie d'un débat et d'un vote de confiance. Ce vote de confiance sert à vérifier si le nouveau gouvernement jouit de la confiance de la Chambre dans la mise en œuvre de son programme. Il s'agit d'un scénario permanent depuis 1919. Les membres du gouvernement ont déjà été nommés par le Roi avant que le Premier ministre ne fasse la déclaration gouvernementale et prête serment. Le gouvernement est un gouvernement à part entière, qui peut exercer tous ses pouvoirs, mais il restera sur la réserve et prudent jusqu'à ce qu'il ait reçu la confiance.
Ce scénario a également été suivi après la formation des deux gouvernements minoritaires qui ont reçu la confiance de la Chambre, le gouvernement Eyskens en 1958 et le gouvernement Tindemans en 1974. Le gouvernement minoritaire de Tindemans a gagné la confiance par 100 voix contre 63 et 47 abstentions (210 membres sur 212 ont pris part au vote).
2. Lors de la quatrième réforme de l'Etat (1993), de nouvelles règles ont été introduites dans la Constitution pour "rationaliser" le système parlementaire. La coutume constitutionnelle telle qu'elle est décrite ci-dessus a continué d'exister, mais dans un cadre constitutionnel modifié (articles 46 et 96 de la Constitution) et avec de nouvelles règles dans le Règlement intérieur de la Chambre (articles 133 à 141 et 181).
Depuis cette réforme, seul le premier ministre peut déposer un vote de confiance (les députés peuvent déposer une motion de méfiance) La motion de confiance doit, comme auparavant, être adoptée à la majorité absolue des voix, mais son rejet n'a de conséquences juridiques que si elle est adoptée à la majorité des membres de la Chambre (au moins 76 voix) et si la Chambre, à la même majorité, propose au Roi, dans un délai de trois jours à compter du jour du rejet de la motion, un successeur au Premier Ministre pour nomination. Si la motion est rejetée à la majorité absolue des voix, le gouvernement n'est pas légalement obligé d'offrir sa démission au Roi, alors qu'il était auparavant " c’était pour ainsi dire une règle constitutionnelle selon laquelle le gouvernement devait démissionner dès que le parlement rejetait une motion de confiance, adoptait une motion de méfiance ou lorsque le gouvernement était mis en minorité dans le parlement sur une question importante ".
3. Lorsque le gouvernement modifie son programme ou sa composition, la même coutume constitutionnelle s'applique. Le gouvernement fait ensuite une déclaration ou une communication gouvernementale suivie d'un débat et d'un vote de confiance.
Dans la pratique, un vote de confiance a toujours eu lieu lorsque le changement de composition du gouvernement ne se limitait pas au remplacement de ministres particuliers et que ce remplacement était d'une nature telle qu'il pouvait soulever des doutes quant à la confiance dont jouissait encore le gouvernement dans la Chambre.
Le gouvernement a fait une annonce à la Chambre et un vote de confiance a eu lieu lorsque le F.D.F. a quitté le gouvernement en 1980. Ce fut également le cas après le renvoi de deux ministres de l'V.U. en 1991.
4. Conclusion : Bien qu'elle ne soit pas juridiquement contraignante, il existe une coutume constitutionnelle selon laquelle, non seulement lors de sa formation mais aussi, en fonction de sa portée, à la suite d'un changement dans sa composition ou son programme, le gouvernement fait une déclaration ou une communication gouvernementale, suivie d'un débat et d'un vote de confiance.
"Aujourd'hui la balle est dans le camps du Premier ministre", explique Nathanael Pauly pour le RTLINFO 13H. Notre journaliste résume ainsi la situation : soit, Charles Michel demande ce vote de confiance à la chambre. Les députés votent la confiance et le gouvernement peut reprendre son travail. Ou les députés votent contre et le gouvernement devrait remettre sa démission au roi.
Dans ce cas là, deux scénarios possibles : la chambre peut présenter un nouveau premier ministre, un nouveau gouvernement. Ou alors si aucune alternative n'est possible, on se dirigerait vers des élections anticipées.
Si Charles Michel refuse de passer par ce vote de confiance, il existe pour les députés la possibilité d'avoir recours à une motion de méfiance, donc retirer la confiance au gouvernement. À ce moment-là, on se dirigerait vers les mêmes scénarios : une démission et peut-être un nouveau gouvernement.