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Le mail hallucinant du président du CA du Samusocial: "Faites une recherche sur les habitudes, études, amis et familles des journalistes et du député Ecolo"

La commission d'enquête sur la gestion du Samusocial a suspendu en milieu d'après-midi sa séance publique pour débattre à huis clos de la publication d'un mail adressé par le président démissionnaire du CA, Michel Degueldre. Dans cet écrit, le président demande à son chargé de communication de mener une... enquête sur la vie privée de certains journalistes et du député Ecolo à l'origine de la révélation de l'affaire du Samusocial.

On ne compte plus les rebondissements dans l'affaire du Samusocial. Cette fois-ci, la surprise est venue de la diffusion d'un mail vraisemblablement écrit par le président du conseil d'administration, Michel Degueldre, le 25 mai dernier au chargé de communication de l'association. Il lui demande de s'informer sur la vie de deux journalistes et du député Ecolo Alain Maron. "Comme il n'y a pas que des bons et des mauvais, j'aimerais te demander de faire une recherche approfondie sur la vie, les étude (sic), habitudes, convictions, amis, familles des deux vedettes journalistiques de Vif et RTBF et du député Ecolo. J'aimerais mieux comprendre leurs motivation (sic), liens et éventuelles aspirations", écrit-il, avant de signer d'un énigmatique: "L'époque des "gentils" est terminée".

Les trois témoins devant s'exprimer ce mercredi en commission (à savoir des membres de la direction opérationnelle du Samusocial) ont indiqué n'avoir donné aucune suite à cette demande.


Il visait ceux qui commençaient à faire des révélations

Les journalistes en question et le "député Ecolo" sont des personnes dont les informations ont fait émerger les nombreuses questions entourant l'attribution de jetons de présence au sein de l'association Samusocial. Ces questions ont mené à la démission du bourgmestre de la Ville de Bruxelles, Yvan Mayeur, et de la présidente du CPAS, Pascale Peraïta, tous deux jusqu'alors membres du CA et du bureau de l'association.


Le journaliste du Vif réagit: "Je suis surpris, il va loin"

L'existence de ce courrier a scandalisé, non seulement les co-présidents d'Ecolo et la direction de la RTBF, mais aussi l'ensemble des membres de la commission. L'un des journalistes en question, Christophe Leroy, employé au Vif, se dit "surpris par la teneur du mail, dans le sens où il va tout de même assez loin. [Degueldre] m’avait dit par téléphone que si j’écrivais un article sur le Samusocial sans le rencontrer au préalable, cela ne se passerait pas ainsi. (…) Ce n’est pas la première fois que mes collègues et moi avons ce type de pression".

La suite de la commission, à huis clos

Mais alors qu'ils s'exprimaient à ce sujet, le député Emmanuel De Bock (DéFI), suivi en cela par plusieurs autres commissaires dont le chef du groupe MR, Vincent De Wolf, a demandé que le bureau de la commission se penche, séance tenante, sur le problème posé par la diffusion in extenso, selon eux par Alain Maron, de ce mail sur les médias sociaux, en ce compris avec les adresses des destinataires. C'est finalement l'ensemble de la commission qui s'est penchée sur ce problème à huis clos.


"Inacceptable et inquiétant"

De son côté, l'Association des Journalistes Professionnels (AJP) qualifie d'"inacceptable et inquiétant" ce courriel envoyé par Michel Degueldre.

"Enquêter sur des professionnels de l'information et leurs proches, qui plus est dans l'intention explicite de les intimider et de leur nuire, bafoue scandaleusement le respect de la vie privée et le droit à la liberté de presse", s'indigne l'AJP dans un communiqué. "Cela met par ailleurs en péril l'accès aux sources journalistiques et l'anonymat de ces mêmes sources." "Les journalistes ont fait leur travail", ajoute l'association.

"La dénonciation des mauvaises gouvernances et des profiteurs du bien commun était et reste leur mission. Les tentatives d'intimidation à leur égard ne pourront pas les en écarter."

La Fédération Européenne des Journalistes (FEJ) a pour sa part annoncé sur le réseau social Twitter avoir dénoncé cette tentative d'intimidation au Conseil de l'Europe, auprès de la Plateforme pour renforcer la protection du journalisme et la sécurité des journalistes.

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