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À 22 ans, Reda s’est lancé comme expert en trading. Une voie qu'il a commencé à explorer après s’être fait arnaquer... de 800 euros.
Se tromper, apprendre et se relever. C’est l’histoire qu’a connue Reda ces trois dernières années. Alors qu’il est âgé de 18 ans, il s’est laissé influencer "par des influenceurs qui promouvaient le trading", raconte-t-il. "Sur les réseaux sociaux, on peut voir qu’ils ont un train de vie assez luxueux et ils disent que c’est grâce au trading."
Comme beaucoup d’autres internautes, Reda va se laisser convaincre par l’un des influenceurs les plus populaires en France, dont le compte Instagram a d’ailleurs été supprimé entre-temps.
De l’argent facile ?
"Ils nous disent qu’on peut gagner de l’argent simplement et des sommes régulières à la fin du mois", détaille Reda. À entendre les influenceurs, gagner de l’argent n’a jamais été aussi facile. "En suivant leurs conseils, en faisant du copier-coller et avec un petit capital, on pouvait gagner quelques milliers d’euros par mois".
Le jeune homme de 18 ans décide alors de tenter l’expérience. "J’ai commencé avec 300 euros, ils ont tenu maximum deux semaines. Je les ai perdus, mais je sentais que le trading était un réel métier. J’ai retenté le coup avec 500 euros, que j’ai reperdus. C’est là que j’ai eu le déclic de vraiment m’y intéresser. Je n’acceptais pas d’avoir perdu autant d’argent donc j’ai décidé de creuser le sujet et c’était bien plus profond que ce qu’ils nous disaient."
C’est faux
En effet, la promesse de faire des milliers d’euros avec un petit capital était bidon. "On est dans des groupes. On reçoit des alertes qu’ils nous disent de copier-coller. Ces alertes peuvent fonctionner avec un capital de 13 000 euros, mais avec seulement 300 euros, ils se font liquider en une semaine".
"Les histoires de ‘il ne faut pas trop de connaissances’, c’est totalement faux", assène celui qui donne désormais des formations de trading. "Pour vraiment comprendre le fonctionnement des cryptomonnaies, ça m’a pris entre 8 et 10 mois. Dire qu’on peut en vivre en faisant du copier-coller ou en suivant les conseils de quelqu’un, c’est faux."
Se poser des questions sur la crédibilité
Contacté par la rédaction de RTL info, Jean-Claude Jouret, professeur de marketing à l’ICHEC, donne un conseil précieux pour éviter de tomber dans ce genre de piège. "Quand on est follower, il faut faire attention. Il faut bien voir que l’influenceur que l’on suit est spécialisé dans un domaine bien particulier".
"On ne peut pas être spécialiste en tout. Le domaine de la cryptomonnaie, c’est très pointu. On ne peut avoir recours à des conseils que de la part de gens qui savent de quoi ils parlent. Dans le cas de figure où vous avez quelqu’un qui promeut du lifestyle et en même temps du placement en cryptomonnaie, on peut commencer à se poser de sérieuses questions sur la crédibilité de l’influenceur, sans aucun doute", ajoute le professeur.
Après avoir perdu 800 euros, Reda sent le potentiel du trading, mais prend surtout conscience que ce n’est pas à la portée du premier venu. Il décide alors de prendre le taureau par les cornes et se lance dans une étude intensive de plusieurs mois. "J’ai commencé par la base puis de fil en aiguille, j’ai compris le domaine des cryptomonnaies".
Plus ses connaissances du domaine grandissaient, plus il était capable d’aider ses amis qui ont connu des mésaventures similaires. "Dans mon entourage, j’ai trois amis sur cinq qui se sont fait arnaquer. Quand j’ai commencé à comprendre comment ça fonctionne et que j’ai gagné de l’argent dessus, ils me demandaient des conseils". C’est là qu’une idée va éclore dans son esprit. "J’ai décidé de faire une formation que je donne à Bruxelles. Le but est de s’éduquer financièrement à la cryptomonnaie. Je veux enlever tous les clichés qu’on voit sur les réseaux sociaux et comment ça fonctionne".
À qui la faute ?
En cas d’arnaque, comme dans le cas de Reda, la faute est partagée estime le professeur Jean-Claude Jouret. "La responsabilité serait plutôt à chercher du côté de l’entreprise qui fournit le service financier plutôt que du côté de l’influenceur. Néanmoins, je considère que la responsabilité de l’influenceur reste morale. C’est à eux de faire passer un message qui vaut la peine (…) et surtout d’avoir essayé le produit. C’est toujours le problème de vanter un produit qu’on ne connait pas."
Il faut se méfier
La promotion de produits financiers sur les réseaux sociaux est une pratique bien connue par l'Autorité des services et marchés financiers ou FSMA. Elle fait d’ailleurs l’objet d’une attention particulière de cet organisme public. "On voit apparaître des pratiques qui n’existaient pas il y a quelques années", nous indique son porte-parole Mathieu Saudoyer. "D’une part, les réseaux sociaux regorgent d’offres frauduleuses. Et d’autre part, des influenceurs font la promotion de produits financiers alors qu’ils ne disposent d’aucune connaissance dans ce domaine. La FSMA est attentive à ce phénomène et développe de nouveaux outils de data pour détecter d’éventuelles fraudes ou pratiques illicites", nous explique le porte-parole.
Face à cela, l'Autorité des services et marchés financiers rappelle qu’il est important d’être prudent. "Il faut se méfier face aux offres d’investissement sur les réseaux sociaux. Les personnes actives de façon professionnelle dans le secteur financier ne font en général pas de telles publicités sur les réseaux sociaux", précise Mathieu Saudoyer. Les influenceurs qui font la promotion de tels produits financiers sont bien souvent rémunérés par les plateformes d’investissement et la plupart ne disposent pas d’une connaissance suffisante du secteur financier, insiste le porte-parole de la FSMA. Un mot-clé face à cela : la prudence