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La mise au jour de ces anomalies intervient alors que la révision planifiée du réacteur est en cours. Engie Electrabel a lancé un programme préventif d'inspections et de travaux de réparation sur l'ensemble de ses unités à la suite d'autres anomalies constatées au niveau du béton dans un bâtiment annexe de Doel 3. A Tihange 3, Electrabel a également constaté, en avril 2018, une dégradation du béton au niveau des plafonds des locaux abritant "les buses de sortie des soupapes d'échappements vapeurs".
"Les équipements qui se trouvent dans ce bunker doivent être disponibles lors d'un accident nucléaire. Et avec la dégradation du béton qu'on vient de découvrir, l'intégrité du bâtiment pourrait être compromise", indique Simon Coenen, expert à l'Agence fédérale pour le contrôle nucléaire.
Vraisemblablement, ces épingles ont bougé au moment où le béton a été coulé dans la période de construction
Un programme de réparations a directement été mis sur pied. Lors de ces inspections, les équipes ont procédé au décapage des zones endommagées. Ce décapage a fait apparaître des anomalies au niveau des armatures du béton armé présentes depuis la construction du bâtiment. Il apparaît que des éléments de renfort de la dalle de béton au plafond ne sont pas positionnés strictement comme sur les plans. "Vraisemblablement, ces épingles ont bougé au moment où le béton a été coulé dans la période de construction", explique l'énergéticien. Les ingénieurs d'Engie Electrabel travaillent en ce moment aux "analyses et aux calculs sous le contrôle d'experts indépendants".
Ces calculs doivent déterminer "l'impact du positionnement non conforme des épingles au plan de construction en cas d'évènement externe tel qu'une chute d'avion". Ce dossier sera ensuite remis à l'Agence Fédérale de Contrôle Nucléaire, qui prendra position. "Les analyses sont en cours et aucune conclusion ne peut être faite à ce stade", selon le communiqué.
Engie Electrabel rappelle que la sûreté nucléaire est sa "priorité absolue". Le design des centrales belges a été qualifié de "particulièrement robuste" lors des stress tests européens. Les marges qui ont été appliquées lors de la construction des unités sont qui plus est plus importantes que dans les pays avoisinants, assure l'entreprise. Engie Electrabel souligne qu'en cas de doute, l'exploitant met directement à l'arrêt l'unité et le redémarrage doit être autorisé par l'AFCN.
Ce bâtiment d'urgence doit pouvoir résister à une chute d'avion
Pour Doel 3, lors d'inspections durant l'arrêt planifié du réacteur, les équipes d'Engie Electrabel avaient détecté que le plafond en béton du bâtiment annexé au bâtiment réacteur devait être réparé.
Ce bunker c’est le bâtiment d’urgence, là où tout se gère en cas de catastrophe comme à Fukushima. Ce bâtiment abrite des systèmes de secours de 2ème niveau, utilisés uniquement en cas de problème avec les systèmes de 1er niveau. Les analyses ont démontré que, dans ces installations situées dans la partie non nucléaire, l'état du béton peut être fragilisé par des conditions chaudes et humides. Or, les exigences de sûreté prévoient notamment que ces bâtiments bunkerisés doivent résister à un évènement externe, tel une chute d'avion. Les actions nécessaires sont en cours et le redémarrage de Doel 3 est prévu le 1er août. Les unités de Doel 1, Doel 2 et Tihange 1 ont un design différent de celui des autres unités. La question du béton ne s'y pose pas, précise Engie Electrabel.
Quatre centrales sur sept à l'arrêt ou en révision
"Si c'est vrai qu'aujourd'hui, et je le confirme, qu'il n'y a pas de risque parce que la centrale est à l'arrêt, pendant des années, cette centrale a tourné avec un risque énorme pour les travailleurs mais aussi pour la population. Et ça c'est inacceptable", réagit Jean-Marc Nollet, député fédéral Ecolo.
Au total, quatre réacteurs sur les sept que compte la Belgique sont donc à l'arrêt. Engie Electrabel se veut malgré tout rassurant. "C'est nécessaire, parce qu'on procède à toute une série de travaux d'entretien, pour justement maintenir le niveau de sûreté de nos centrales le plus élevé, et conformément aux règles et aux standards qui nous sont imposés", explique Anne-Sophie Huge, porte-parole d'Engie Electrabel. Mais quatre centrales à l'arrêt sur sept, n'est-ce pas de trop? "Ce n'est pas quatre sur sept qu'il faut retenir, parce qu'il y a des unités qui sont en révision", répond Anne-Sophie Huge.
Le coût de l'interruption des centrales
Mais des centrales à l'arrêt, cela a un coût: environ 250 millions d'euros. Il y a bien sûr les travaux et la perte, puisque c’est de l’énergie qui n’est pas vendue. "Ça ne se répercute pas directement sur le consommateur. Nous avons annoncé au marché que certaines unités seraient indisponibles, mais je le répète encore une fois: c'est la sécurité qui prime", commente la porte-parole de l'entreprise.
Engie dit pouvoir faire les réparations nécessaires d’ici fin septembre. En tout cas, le feu vert de l’Agence fédérale du contrôle nucléaire sera indispensable pour relancer Tihange 3.