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Un avocat kirghize qui s'est battu pour mettre fin au statut "fantôme" des apatrides au Kirghizstan s'est vu décerner mercredi le prix Nansen par l'agence de l'ONU pour les réfugiés.
Le Haut Commissariat aux réfugiés (HCR) a rendu hommage à Azizbek Ashurov pour avoir aidé son pays à devenir le premier Etat dans le monde à abolir l'apatridie, à travers son organisation Ferghana Valley Lawyers Without Borders (Avocats sans frontières de la vallée Ferghana).
Il a aidé plus de 10.000 personnes, devenues apatrides après la dissolution de l'Union Soviétique, à obtenir la nationalité kirghize, a rappelé l'agence de l'ONU dans un communiqué.
"Je suis rempli d'émotions", a dit M. Ashurov aux journalistes à Genève où le prix a été annoncé.
"Des millions de personnes dans le monde vivent avec les effets terribles de l'apatridie et la leçon qu'ils peuvent tirer de notre travail au Kirghizstan est claire", a-t-il dit. "Nous pouvons mettre un terme au statut d'apatride. C'est possible."
Grâce à son action, quelque 2.000 enfants ont pu accéder à l'éducation et envisager un avenir au cours duquel ils seront libres de voyager, de se marier et de travailler, a souligné le HCR.
"L'engagement d'Azizbek Ashurov dans son combat pour éradiquer l'apatridie au Kirghizstan (...) est un exemple fascinant du pouvoir d'un individu qui doit inspirer des actions collectives", a déclaré le chef du HCR, Filippo Grandi, dans un communiqué.
M. Ashurov a été inspiré par le combat de sa propre famille pour obtenir la nationalité kirghize après avoir quitté l'Ouzbékistan.
- Fantômes -
Sous l'ère soviétique, il n'existait pas de frontières intérieures et les gens se déplaçaient à l'intérieur de l'Asie Centrale avec de simples papiers d'identité.
Mais après la chute de l'URSS en 1991, "beaucoup de personnes ont été piégées par l'émergence de nouvelles frontières, avec souvent des passeports soviétiques devenus caduques ou bien sans capacité de prouver leur lieu de naissance", a rappelé le HCR.
Des centaines de milliers de personnes se sont donc retrouvées apatrides dans ces régions.
"L'apatridie est une injustice", a affirmé M. Ashurov.
"Dans mon pays, les apatrides n'avaient aucune preuve de leur identité, pas de papiers. Ils ne pouvaient pas aller à l'école, chez le médecin, se marier, posséder une maison, ouvrir un compte en banque voyager ou voter."
"Ils vivaient comme des fantômes parmi nous. Officiellement, ils n'existaient pas physiquement."
M. Ashurov et son organisation ont fourni une assistance légale gratuite aux apatrides vivant dans le sud du Kirghizstan.
Le prix Nansen, qui est décerné chaque année, tire son nom de l'explorateur polaire norvégien Fridtjof Nansen, qui fut le premier haut-commissaire aux réfugiés de la Ligue des Nations, et mit en place notamment le "passeport Nansen" pour les apatrides.
M. Ashurov recevra son prix et les 150.000 dollars qui y sont associés, lors d'une cérémonie lundi à Genève.
"Je vais devoir travailler encore plus dur à l'avenir pour prouver que je mérite cette reconnaissance", a-t-il dit. Il a confié qu'il voulait aider d'autres pays de la région à régler le problème de l'apatridie.
L'an dernier, le lauréat avait été le médecin du Sud-Soudan Evan Atar Adaha, qui gère un hôpital surpeuplé pour accueillir les réfugiés dans l'Etat du Nil Bleu.