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Les experts internationaux réunis vendredi à Cambo-les-Bains (Pyrénées-Atlantiques) pour acter la dissolution de l'ETA ont lancé un appel à la "réconciliation" en "tournant la page" de la dernière insurrection armée d'Europe occidentale, alors que Madrid se refuse à tout geste envers l'organisation indépendantiste basque.
"Aujourd'hui est un jour de célébration", a lancé l'avocat sud-africain Brian Currin en ouvrant cette "rencontre internationale pour avancer dans la résolution du conflit au Pays-Basque" entamée par une minute de silence en hommage à toutes les victimes du conflit.
"Mais ce n'est pas terminé", a-t-il ajouté, sur une tribune dressée dans une grande salle de la Villa Arnaga, à Cambo-les-Bains.
Saluée par l'Union Européenne, l'autodissolution de l'ETA annoncée la veille à Genève est aussi "un engagement à prendre part au processus démocratique" des institutions espagnoles, "ce qui nécessitera la réconciliation", a insisté l'avocat de 67 ans.
"Avant toute chose, le processus de réconciliation reste à poursuivre", ont souligné les experts dans une solennelle "Déclaration d'Arnaga" lue par l'ancien directeur général du FMI Michel Camdessus. "Cela prendra du temps. De profondes blessures demeurent".
Au même moment, à Madrid, le chef du gouvernement espagnol Mariano Rajoy avait choisi de rendre hommage à toutes les victimes d'ETA. Les condamnations continueront à être exécutées" et "il n'y aura pas d'impunité", déclarait-il.
"Toute partie qui recherche à obtenir une victoire totale risque de voir le conflit réapparaître", ont aussi averti les experts dans leur déclaration. "La paix n'est pas un jeu à somme nulle mais une question de compromis politique".
"La colère n'est pas une politique, la vengeance n'est pas une solution", mettait aussi en garde le Nord-Irlandais Gerry Adams, ancien dirigeant du Sinn Fein pendant 34 ans, qui milite contre la souveraineté britannique en Ulster.
- "Construire la paix" -
"Construire la paix est bien plus difficile" que faire la guerre" et "le point de départ doit être le dialogue", a-t-il ajouté, en rappelant le processus suivi par le Sinn Fein en Irlande du Nord.
"Nous vivons une journée historique, nous vivons la fin du dernier conflit en Europe", a estimé dans une déclaration lue à la tribune, l'ancien secrétaire général des Nations Unies Kofi Annan, l'un des parrains du processus. "La déclaration d'ETA marque la fin de l'histoire difficile de l'Espagne (et) montre que le dialogue politique est durable alors qu'il reste beaucoup à faire pour guérir les blessures", a-t-il ajouté.
Aboutissement d'une lente scénographie, cette conférence est censée clore toute une série d'annonces qui depuis plus d'un mois martèlent le même message via plusieurs canaux médiatiques: ETA (Euskadi Ta Askatasuna, soit "Pays Basque et Liberté"), créée en 1959, s'autodissout, un an après avoir rendu les armes le 8 avril 2017.
Jeudi, l'ETA a diffusé une "déclaration finale" annonçant que l'organisation clandestine avait "démantelé l'ensemble de ses structures" et mis "fin à toute activité politique".
Avec 829 morts qui lui sont imputés, l'ETA, à coups d'enlèvements et d'attentats, a tenté sans succès d'obtenir l'indépendance du Pays Basque et de la Navarre pour finir décimée par les arrestations de ses chefs, et rejetée par la majorité de la population.
En Espagne, l'ETA se heurte aujourd'hui à l'opposition farouche des associations de victimes, comme Collectif des victimes du terrorisme (Covite) qui exige qu'elle condamne la terreur et cesse de rendre des hommages publics à ses militants quand ils sortent de prison. Il attend aussi qu'elle fasse la lumière sur 358 crimes encore inexpliqués.
L'Espagne avait aussi mal accueilli un message diffusé le 20 avril où la faction armée regrettait "les torts causés" mais ne demandait pardon qu'aux victimes qui n'étaient pas parties au "conflit", laissant entendre que les autres, comme les policiers, étaient des cibles légitimes.
Le ton de Madrid augure mal d'une solution au prochain problème à résoudre: celui du rapprochement de leurs familles des prisonniers basques.