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Les Polynésiens dubitatifs face aux résultats d'une étude sur les essais nucléaires

Les Polynésiens sont partagés entre circonspection et indignation depuis la présentation lundi par l'Inserm d'une étude évaluant l'impact des essais nucléaires français réalisés dans la région sur le risque de cancer de la thyroïde.

D'après cette étude, dont les résultats sont parus dans la revue JAMA Network Open, les essais nucléaires réalisés par la France dans l'archipel des Tuamotu pourraient être responsables de 0,6% à 7,7% des cas de cancer de la thyroïde en Polynésie française.

Soit un impact "faible, mais pas du tout inexistant", a estimé Florent de Vathaire, chercheur Inserm et premier auteur de l'étude.

"Je suis scandalisée qu'on puisse encore publier des articles qui minimisent les conséquences des 193 essais nucléaires en Polynésie", a réagi à l'AFP Hinamoeura Cross, élue de l'Assemblée de la Polynésie française.

Mme Cross souffre depuis dix ans d'une leucémie chronique radio-induite. A la tribune de l'ONU, elle a déjà exhorté la France à mieux prendre en charge les victimes des retombées atomiques.

"La ministre Geneviève Darrieussecq disait encore en juillet 2021: +il n'y a pas eu mensonges d'Etat, il y a eu des interprétations+. Or il y a bien eu mensonge d’État avant le premier tir nucléaire, puisque De Gaulle disait que toutes les dispositions étaient prises pour qu'il n'y ait aucune conséquence sur la santé des Polynésiens", fustige-t-elle.

De l'avis d'autres militants anti-nucléaire, cette étude marque toutefois une avancée.

"Ce rapport parle de personnes qui ont développé un cancer entre 1984 et 2016", explique le Père Auguste Uebe-Carlson, président de l'association 193, soulignant que le Comité d'indemnisation des victimes des essais nucléaires (Civen) refuse de reconnaître les dossiers de victimes nées après 1974, l'année de fin des essais aériens.

"Si ces personnes sont nées après 1974, ce sera un argument de plus pour demander des indemnisations", estime-t-il.

Il observe toutefois "une tendance de l’État et donc de l'Inserm (un établissement public, Ndlr) à minimiser l'impact des retombées nucléaires". Selon lui, l'institut devra un jour expliquer "pourquoi il y a autant de cancers dans nos atolls".

"On va reprendre tous ces éléments et on va entrer en discussion avec l’État là-dessus", a assuré de son côté Moetai Brotherson, le nouveau président indépendantiste de la Polynésie française, qui a présenté lundi son gouvernement.

Son parti, le Tavini Huiraatira, avait évalué à environ 100 milliards de francs Pacifique (838 millions d'euros) les dépenses de la CPS, la Sécurité sociale locale, en lien avec les maladies radio-induites. Une somme qu'il souhaite donc voir remboursée par l'Etat.

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