Accueil Actu Monde International

L'Argentine vote pour un président qui la sortirait de la crise

Ereintés par l'inflation, les Argentins votent dimanche en un premier tour d'élection présidentielle, ballottés entre la tentation d'un candidat "antisystème", Javier Milei, et la certitude de lendemains difficiles.

Rarement depuis le retour de la démocratie il y a 40 ans, un scrutin aura été aussi incertain pour une Argentine à l'inflation chronique, désormais parmi les plus élevées au monde (138%).

Javier Milei, économiste ultralibéral "anarcho-capitaliste" selon ses propres termes, qui promet de "tronçonner" l'Etat, admire Donald Trump et nie la responsabilité de l'homme dans le changement climatique, a renversé la table en deux ans à peine en politique, au point de se trouver en tête des intentions de vote au premier tour.

Dimanche, arborant son blouson de cuir fétiche, il a été accueilli en rockstar en allant voter à Buenos Aires, une fervente cohue de quelques centaines de partisans pressant sa voiture protégée par un cordon policier. "Que los cumplas feliz !" (Bon anniversaire !), a scandé la foule au candidat, 53 ans ce jour.

"Nous sommes préparés a faire le meilleur gouvernement de l'histoire", a-t-il déclaré après son vote ce polémiste surgi des plateaux TV en politique en 2021.

Il suit depuis un fil rouge "dégagiste", contre la "caste parasite", selon lui les péronistes (centre-gauche) et libéraux qui alternent au pouvoir depuis vingt ans. Et il a trouvé écho, auprès d'un public jeune en particulier.

Selon les derniers sondages - mais qui l'ont sous-estimé par le passé -, M. Milei est crédité d'environ 35% des intentions de vote au premier tour, devant Sergio Massa (autour de 30%), ministre de l'Economie et candidat du bloc gouvernemental de centre-gauche, et Patricia Bullrich (26%) de l'alliance d'opposition (centre-droit), une ex-ministre de la Sécurité sous le président libéral Maurico Macri (2015-2019).

Pour être élu au premier tour, un candidat doit obtenir au moins 45% des voix, ou 40% mais avec 10% d'avance sur le deuxième.

- "Un saut dans le vide" -

Depuis longtemps, les Argentins ont appris à vivre avec l'incertitude du lendemain: 12,7% en septembre, plus fort indice mensuel en 32 ans.

"On a besoin d'un changement. Ce pays est un désastre, vraiment, entre la pauvreté, l'inflation, les gens ne vont pas bien", se désolait Gabriela Paperini, 57, ans, dimanche à l'ouverture d'un bureau de vote dans le quartier de Palermo.

Elle s'apprêtait a voter Bullrich, mais sa fille, elle, a choisi Milei, et disait ressentir "tellement" d'incertitude sur l'issue du vote.

"On est habitué, comme société, à voter pour des gens qui après nous déçoivent, font le contraire de ce qu'ils disaient, ou font leurs affaires", grimaçait Boris Moran, avocat de 34 ans, lui aussi convaincu par "l'option différente" Milei, même si certains voient en lui "un saut dans le vide".

Envers Mme Bullrich, qui promet "le gouvernement le plus austère de l'histoire de l'Argentine"; un pays à 40% de pauvreté.

Envers M. Massa, qui assure que "le pire de la crise" est bientôt passé grâce à un prochain boom exportateur.

Ou envers M. Milei, au plan de "dollarisation" de l'économie pour voir le billet vert remplacer le peso, projet fléché par nombre d'économistes de divers bords comme "un mirage" au risque inflationniste et social élevé.

- "Transmettre de la tranquillité" -

La devise nationale, le peso, a dégringolé en deux ans de 99 à 365 pesos pour un dollar au taux officiel, et près de 1.000 pesos au taux parallèle de la rue, véritable "baromètre de l'angoisse" des Argentins, selon Benjamin Gedan, économiste au groupe de réflexion Wilson Center.

Ils n'oublient pas le choc du lendemain de la primaire d'août qui avait vu la percée inattendue de M. Milei (30%): le peso, sous pression, avait été dévalué de 20%.

Quelque 35,8 millions d'électeurs renouvellent aussi dimanche la moitié des députés, et un tiers du Sénat.

Les premiers résultats sont attendus vers 22H00 locales (01H00 GMT).

À lire aussi

Sélectionné pour vous