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Une quatrième couleur de chocolat, le "blond", au goût très caramélisé, est née en France en 2012 et se répand chez les pâtissiers sans avoir aucune chance d'être légalement reconnu, alors même que les Suisses revendiquent aussi une invention similaire, cette fois-ci "rose".
Comme pour la tarte des sœurs Tatin, ce chocolat est né d'un accident de chef, celui de Frédéric Bau, en démonstration au Japon, qui a laissé du chocolat blanc un peu trop longtemps au bain-marie... soit quatre jours.
"Comme par hasard, comme par enchantement, parce que stocké dans un lieu improbable, eh bien il est devenu blond. J'ai vu ce chocolat à la couleur et à l'odeur incroyable", se souvient le chef, directeur de la création du chocolatier Valrhona.
"Mais ce chocolat c'est comme moi, c'est une erreur !", plaisante le chef pâtissier-chocolatier qui a flairé le potentiel commercial de cette heureuse bévue.
Il faudra 7 ans d'essais pour fixer les qualités aromatiques uniques et la consistance du chocolat blond.
Si la recette, déposée par le géant drômois du chocolat pour professionnels, est restée secrète, elle relève d'une réaction chimique bien connue en cuisine: la "réaction de Maillard", un enchaînement de réactions chimiques qui entraîne un brunissement de la matière et des arômes qu’on appelle "de cuisson", proche du toasté.
- "Très biscuité" -
Au goût, le chocolat blond a le lacté et gras d'un chocolat blanc en beaucoup moins sucré, la saveur d'un caramel très doux ravivé à la fin d'un arrière-goût de café torréfié.
Le chocolat blond est au chocolat blanc ce que le dulce de leche (confiture de lait) est au lait concentré sucré et son nom de commercialisation "Dulcey" joue sur l'analogie.
Pour les pâtissiers qui snobent généralement le chocolat blanc, associé à la gourmandise coupable de la tablette industrielle de l'enfance, le chocolat blond ouvre un nouveau terrain de jeu.
"Il est très différent en goût des autres chocolats, ça donne en goût quelque chose de très biscuité, très gourmand", explique à l'AFP le pâtissier niçois Philippe Tayac, qui le marie à la noisette pour une tartelette.
Frédéric Bau l'associe en dessert en fondant pur avec des pommes justes rôties au four et une crème à la vanille de Tahiti mais conseille aussi de le "casser" avec des associations fruitées plus tranchées, comme l'agrume ou le fruit rouge.
- Procès -
Malgré les démarches entreprises par Valrhona, le chocolat blond n'a pas obtenu de rentrer dans le décret de 1976 qui réglemente la vente de chocolat en France, soit une teneur minimale de 35% de cacao qui se décline en paliers selon les "trois couleurs" historiques, selon le texte consulté par l'AFP.
Légalement, le chocolat blond, désormais imité et produit également par des chocolatiers belges et suisse, reste donc un chocolat blanc, la dernière couleur reconnue après son invention dans les années 1930 en Suisse par Nestlé.
Et de l'autre côté des Alpes, un savoureux duel marketing de géants du chocolat est en cours autour de cette prometteuse quatrième couleur.
Concurrent direct de Valrhona, le géant Barry Callebaut a ainsi introduit à coup de grosses campagnes marketing depuis 2017 sa propre "quatrième couleur" également 100% naturelle de chocolat, cette fois-ci rose et appelée "Ruby". Elle provient de fèves aux propriétés particulières en couleur et en goût.
"Le meilleur chocolat au monde est celui qui vous procure un moment de gourmandise, peu importe où il a été produit et quelle qu'en soit la couleur", a répondu à l'AFP la direction du groupe suisse interrogé sur la guerre transalpine pour le quatrième chocolat.
Le monde du chocolat européen est régulièrement secoué par d'insolites procès internationaux à forts retentissements, qu'il s'agisse de la bataille de Nestlé devant les tribunaux britanniques pour la couleur violette d'emballage des Cadbury américains ou son procès, perdu en 2017, sur la forme de ses Kit Kat.