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Cadavre dans un placard: une accusée nourrie aux réseaux sociaux qui a "déraillé"

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LOIC VENANCE

"Il y a deux Camille, celle de la vie réelle et celle des réseaux sociaux": la cour d'assises a passé au crible jeudi à Vesoul la personnalité de Camille Anguenot, jugée pour le meurtre d'un prétendant dont elle avait caché le cadavre dans un placard.

La jeune femme de 20 ans avait raconté mercredi la nuit du meurtre de Théo Decouchant, 23 ans, et son passage à l'acte, le 29 novembre 2021.

Ce soir-là, elle invite ce prétendant à passer la soirée chez elle, dans une petite commune de Haute-Saône. Elle repousse ses avances, mais ils s'endorment ensemble dans son lit.

Dans la nuit, elle est réveillée par ses caresses, qu'elle repousse encore. "Il m'a dit: +Tu couches avec d'autres gars, pourquoi tu veux pas avec moi ?+. Ca m'a renvoyé que j'étais une fille facile" et "j'ai complètement déraillé", a confié la jeune femme devant la cour.

- "Monde virtuel et monde réel" -

Elle saisit alors un couteau de cuisine, le poignarde au ventre, avant d'aller chercher une cordelette dans sa chambre pour revenir et l'achever.

"Le seul moment où elle dit non, elle a en face d'elle quelqu'un qui ne l'entend pas", analyse son avocate, Catherine Bresson. "Il y a deux Camille: celle de la vie réelle et celle des réseaux sociaux", où elle s'est créé une vie reluisante et se délecte des "clics" de ses followers.

Ce soir-là, "la Camille qui ne vit que pour les réseaux sociaux et pour les autres (...) se prend en face la réalité: je suis une fille facile", poursuit l'avocate qui voit ici une possible raison du passage à l'acte.

"Ce n'est pas un peu facile de dire: +Oui j'ai commis l'irréparable, oui j'ai tué un homme, mais c'est parce que j'ai confondu le monde virtuel et le monde réel ?", interroge en retour l'avocat général Arnaud Grécourt.

Celui-ci souligne les éléments allant dans le sens d'un crime crapuleux, commis par cette jeune femme de 18 ans à l'époque cherchant à tout prix un véhicule et de l'argent pour aller rejoindre un amant à Bordeaux.

Il relève également qu'elle "manifeste beaucoup plus d'émotions à l'égard de ses chevaux qu'à l'égard des personnes autour d'elle, ou d'un homme qu'elle a tué".

Le lendemain du meurtre, Camille Anguenot, qui n'a pas le permis de conduire, prend la voiture de sa victime et sa carte bleue pour se rendre à Bordeaux. Elle continue ensuite à vivre normalement.

Un accident de voiture met un terme à sa cavalcade et elle rentre finalement chez elle, où la police, alertée par la mère de Théo Decouchant, débarque une semaine après le meurtre et découvre le corps du jeune homme emballé dans des sacs poubelle, caché dans un placard à balais.

- "Egocentrisme et vénalité" -

Au moment du meurtre, "c'est une adolescente loin d'être mature, nourrie aux réseaux sociaux", qui a "une fascination pour l'image qu'elle renvoie d'elle-même", relève le psychiatre Sylvain Alexis. "On voit ça souvent chez les très jeunes, de plus en plus taraudés par l'envie et qui aiment se montrer, avec des +stories+. Tout ce que ce phénomène (des réseaux sociaux) provoque chez des adolescents et des pré-ado est terrible".

Lors de son échange avec Camille Anguenot, elle lui avoue avoir ressenti un "soulagement" au moment de son arrestation, "comme si la réalité avait repris le dessus, arrêtant sa fuite mortifère".

L'expert psychiatre a conclu à "l'altération du discernement" de la jeune femme au moment des faits. Il décrit une accusée "borderline" présentant des "traits psychopathiques et pervers", faisant preuve "d'égocentrisme et de vénalité".

Son confrère, le Dr Henri Brunner, rejette au contraire l'altération du discernement et relève "une personnalité caractérielle, cliniquement banale", sans trouble psychiatrique.

La "Camille de la vie réelle", c'est aussi cette enfant d'une dizaine d'années témoin des "violences verbales et physiques" de son père sur sa mère. Celle-ci a évoqué devant les jurés ce jour où devant ses filles, l'homme dont elle se sépare lui "fonce dessus et essaie de (l)'étrangler". Camille Anguenot pleure dans le box des accusés.

Jugée depuis mardi, elle encourt 30 ans de réclusion. Verdict vendredi.

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