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Elon Musk a tenté de montrer lundi au tribunal que ses fameux tweets de 2018, sur sa volonté de sortir Tesla de la Bourse, n'avaient rien de trompeurs ou de frauduleux, contrairement aux accusations d'investisseurs qui disent avoir perdu des millions de dollars à cause du milliardaire.
Le patron de Tesla -- et de Twitter, depuis fin octobre -- a assuré qu'il n'avait "jamais" cherché à tromper les investisseurs, et que l'accusation de fraude était "scandaleuse".
Il avait créé la stupeur le 7 août 2018 en affirmant qu'il voulait retirer son groupe automobile de la Bourse au prix de 420 dollars par action, puis en assurant que le financement était "sécurisé".
"Je ne disais pas que c'était fait, je disais simplement que je l'envisageais, que j'y pensais. Et qu'à mon avis le financement était sécurisé", a déclaré Elon Musk à la barre, dans le tribunal de San Francisco où a lieu le procès.
La semaine dernière, le principal avocat des plaignants, Nicholas Porritt, avait accusé le dirigeant d'avoir "menti" et d'être responsable des pertes des investisseurs.
Le titre avait bondi dans la foulée des tweets très inhabituels (et le Nasdaq avait temporairement suspendu le cours de l'action Tesla), avant de décliner les jours suivants. Des articles de presse avaient fini par révéler que le patron n'avait pas vraiment les fonds.
Tesla était restée cotée en Bourse.
A travers ses questions, Nicholas Porritt a cherché à montrer qu'Elon Musk n'avait pas réalisé les consultations appropriées, et ne disposait pas ni des éléments nécessaires, ni de l'autorité pour faire une annonce aussi fracassante, surtout sur Twitter, et surtout pendant que les marchés étaient ouverts.
- "M. Tweet" -
L'avocat a mis en avant des échanges acerbes le 12 août 2018 entre le milliardaire et Yasir Al-Rumayyan, le directeur du fonds souverain saoudien, qui s'était engagé "catégoriquement" et "sans hésitation" à financer l'opération, selon Elon Musk.
"Le financement n'était pas vraiment sécurisé, n'est-ce pas?", a demandé M Porritt.
Yasir Al-Rumayyan a fait du "rétropédalage", a rétorqué le patron de Tesla.
Il a assuré qu'il avait de toute façon la possibilité de vendre ses actions de son autre fleuron, SpaceX, "l'entreprise non cotée la plus valorisée des Etats-Unis".
"Cela m'aurait brisé le cœur (de les vendre), mais je l'aurais fait si besoin", a-t-il déclaré, évoquant comment il avait dû se séparer d'actions de Tesla pour racheter Twitter l'année dernière.
Costume sombre, chemise blanche et cravate, il est apparu hésitant, ne se souvenant pas de nombreux emails et détails, et répondant souvent à côté des questions pour répéter à l'envie les messages qu'il voulait faire passer au jury.
Au point de faire perdre patience à l'avocat des investisseurs. "Nous avons passé toute une journée ensemble à Austin, vous vous en souvenez M. Tweet?!", a lancé Nicholas Porritt, avant de corriger pour "M. Musk".
- "Karma" -
L'accusation est aussi revenue sur le prix proposé par Elon Musk, 420 dollars par action. Aux Etats-Unis, les chiffres 4 et 20 accolés sont associés à la consommation de cannabis. Quand le milliardaire a proposé de racheter Twitter au printemps dernier, il a choisi un prix de 54,20 dollars par action.
"Avez-vous arrondi à 420 en guise de blague à l'attention de votre petite amie?", a demandé Nicholas Porritt.
"Ce n'était pas une blague, cela représentait une prime de 20% au-dessus du prix de l'action", a répondu Elon Musk, reconnaissant cependant qu'il y a "un certain karma autour de 420".
"Pas sûr que ce soit un bon ou un mauvais karma à ce stade", a-t-il encore plaisanté.
Son avocat Alex Spiro l'a ensuite aidé à dresser le portrait d'un immigré parti de rien, venu aux Etats-Unis - "là où les grandes choses sont possibles" - après une enfance "malheureuse" en Afrique du Sud, selon les mots du milliardaire.
"On m'a traité de fou à de nombreuses reprises", a déclaré Elon Musk après avoir énuméré les entreprises qu'il a cofondées.
Mais "à ce stade je crois que j'ai levé plus d'argent que quiconque dans l'histoire", s'est-il vanté, attribuant sa réussite à son "honnêteté" à l'égard des investisseurs.
Le procès doit durer trois semaines. Dans une précédente décision liée à cette affaire, un juge avait estimé que le fameux tweet de 2018 pouvait être considéré comme "faux et trompeur".
Le gendarme boursier américain, la SEC, avait de son côté obligé Elon Musk à céder la présidence du conseil d'administration, à payer une amende et à faire pré-approuver par un juriste ses tweets directement liés à l'activité de Tesla.