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Le deuxième budget du quinquennat arrive lundi dans l'hémicycle de l'Assemblée, promettant des batailles politiques et de chiffres autour du pouvoir d'achat des Français.
La traditionnelle saison budgétaire, qui va durer jusqu'à Noël, débute par le premier volet du projet de loi de finances (PLF) 2019, consacré aux "ressources" de l'Etat, c'est-à-dire impôts et taxes, durant une longue semaine.
Les deux ministres Bruno Le Maire (Economie) et Gérald Darmanin (Comptes publics), s'ils ne changent pas de portefeuille dans le cadre du remaniement, seront présents sur le banc du gouvernement.
"Ce PLF obéit à une règle, celle de la constance", selon le premier. Le cap a été fixé l'année dernière et pour cinq ans, avec un allègement de la fiscalité sur le capital pour l'orienter vers l'investissement, un objectif de réduction de la dette ainsi que des dépenses publiques contenues.
Mais entre une croissance molle (1,7% attendus par Bercy) et les promesses à Bruxelles de bonne conduite budgétaire, ce budget n'a pas été évident à boucler. Le déficit public devrait atteindre 2,8% du PIB en 2019 contre 2,6% cette année.
Alors que la politique d'Emmanuel Macron est perçue comme inégalitaire par une partie de l'opinion, la baisse des impôts atteindra l'année prochaine six milliards d’euros pour les ménages, "plus grande baisse" depuis 2008, affirme le ministre des Comptes publics, malgré les hausses de taxes sur les carburants et sur le tabac, évaluées par le gouvernement à 2,3 milliards d'euros.
Gérald Darmanin met en avant "la deuxième tranche de suppression de la taxe d’habitation, le plein effet des baisses de cotisations sociales, la mesure de correction de la contribution sociale généralisée (geste fiscal pour 300.000 retraités, ndlr), le coup de pouce aux heures supplémentaires".
- "passe-passe" -
Mais les oppositions crient au mensonge sur ces 6 milliards, du fait de "singuliers oublis" selon LR, de tours de "passe-passe" selon les socialistes voire d'une "arnaque" aux yeux de la gauche de la gauche.
L'Observatoire français de la conjoncture économique (OFCE) a évalué à 3,5 milliards le gain de pouvoir d'achat l'an prochain pour les ménages, en incluant notamment le quasi-gel des pensions de retraites et des allocations. Cette mesure figure dans le projet de budget de la Sécurité sociale, qui sera examiné en parallèle en commission.
Selon l'Institut des politiques publiques (IPP), le gain de pouvoir d'achat retomberait même à 1,2 milliard d'euros si l'on prend en compte la hausse des taux de cotisation pour les retraites complémentaires des salariés du privé.
Tous les ménages, en outre, ne seraient pas logés à la même enseigne. Les réformes de 2018 et 2019 entraîneront ainsi une hausse du revenu disponible de près de 1% pour les 60% de "ménages intermédiaires", c'est-à-dire les classes moyennes, et une perte nette de 0,5% à 1% pour les 20% de ménages les moins fortunés, souligne l'IPP.
Droite et gauche vont se faire l'écho du "ressenti des Français", selon les mots du président de la commission des Finances Eric Woerth (LR), dont le parti brocarde un "budget anti-pouvoir d'achat".
Les retraités notamment s'apprêtent à manifester jeudi, pour la quatrième fois en un an, contre les choix budgétaires du gouvernement.
Le mécontentement des foyers recevant des avis de taxe d'habitation en hausse se fait aussi entendre sur les réseaux sociaux, le gouvernement rejetant la responsabilité sur certains maires.
"Les classes moyennes ne verront pas leur situation changer", estime Jean-Christophe Lagarde (UDI). C'est la "saison 2" du "budget des riches", fustigent les Insoumis, pointant aussi des "cadeaux fiscaux supplémentaires aux entreprises sans contrepartie".
Quelque 18,8 milliards d'euros de baisses d'impôts sont programmées pour les entreprises, grâce à la diminution de l'impôt sur les sociétés et à la transformation du Crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) en baisses de charges.
Plus de 2.000 amendements sont au menu, près du double de l'an dernier. Les députés de la majorité LREM et MoDem en particulier sont aguerris et mettent sur la table leurs idées en matière de simplification, de fiscalité écologique ou agricole, mais ils ont aussi "davantage reçu de lettres de lobbies", d'après un élu chevronné.
Les débats promettent d'être nourris en outre sur les effets du prélèvement à la source, qui sera mis en oeuvre à compter du 1er janvier. Les Républicains pointent une collecte en hausse, puisqu'elle portera sur les revenus 2019.