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Esther, 21 ans, ne pensait pas que ce qui ressemblait à un simple démarchage téléphonique la mènerait à recevoir une lettre de huissier de justice. Celle qui nous a contacté via le bouton orange Alertez-nous dénonce ce qu'elle estime une "vraie arnaque".
Tout commence en janvier dernier. Son téléphone sonne. Au bout du fil, une démarcheuse téléphonique - vous savez l'une de ces petites bouches de la vente capable de vous faire acheter n'importe quel produit sans que vous ne l'ayez jamais vu. "Elle me dit que j’ai participé à un concours pour gagner un bon d’achat dans une grande enseigne. Je ne me souvenais pas d'avoir participé à un tel concours", se remémore la Liégeoise. Avant d'ajouter: "Et d'un seul coup, elle me parle d'un colis de figurines de cristal qu'elle veut m'envoyer".
Esther nous rapporte alors qu'elle répond qu'elle n'est pas intéressée. "La dame me dit que le colis a déjà été envoyé. Elle m'explique que quand j'aurai reçu le colis, je devrais le renvoyer et demander l'annulation de l'abonnement", raconte la jeune femme.
6.90€ pour renvoyer le colis
Quelques jours plus tard, le colis se trouve dans la boîte aux lettres d'Esther. Elle découvre alors une petite coccinelle en cristal censé lui "porter bonheur", si l'on en croit la fiche descriptive du produit. "Aujourd'hui, vous recevez votre premier animal en cristal de cette collection splendide et unique (...) Ce cristal étincelant est le commencement d'une unique collection qui augmentera continuellement en valeur avec les années", peut-on lire. L'expéditeur est l'entreprise "My Collections".
Qu'importe les mérites vantés pour cette figurine de cristal, Esther ne pense qu'à une chose: s'en débarrasser. Consciente que si elle conserve l'objet, on lui demandera des comptes, elle choisit de le renvoyer et d'annuler cet abonnement auquel elle assure n'avoir jamais souscrit. Son envoi via Bpost lui coûte 6.90€. Après celui-ci, elle espère être enfin débarrassée de cette histoire de figurines de cristal. Mais il n'en est rien.
Les personnes ont cliqué sur un lien via Internet ou via Facebook
Quelques semaines plus tard, elle reçoit un premier courrier de rappel l'incitant à payer la figurine qu'elle n'aurait pas restituée. Puis un deuxième. Puis un troisième. A chaque fois, les frais de rappel augmentent. Sa facture passe de 21 à 96 euros. Esther nous explique (preuves à l'appui) avoir transmis la preuve de son envoi Bpost à la société. "J'envoie des mails mais on ne me répond pas", s'énerve-t-elle. Fin août dernier, c'est un courrier de huissier de justice qui l'attend dans sa boîte aux lettres.
Contactée par nos soins, l'entreprise dément toute tentative d'arnaque. Une responsable nous explique que l'entreprise externalise son démarchage téléphonique. Les personnes appelées sont celles qui ont acceptées d'être mises en contact avec la société, nous assure-t-on. "Elles ont cliqué sur un lien via Internet ou via Facebook par exemple", justifie-t-on. Et selon cette responsable, si Esther a reçu un colis de la marque, c'est parce qu'elle a accepté la vente par téléphone.
L'entreprise nous répond et puis... plus rien
Une responsable nous propose de nous faire parvenir l'enregistrement de cette conversation téléphonique entre Esther et la téléconseillère. L'idée est ici de prouver la bonne foi de l'entreprise. Nous acceptons. "Nous vous le faisons parvenir par email", nous assure-t-on. Seulement voilà, près de 15 jours plus tard, toujours rien. Et ce malgré nos relances téléphoniques. Et à chaque fois, la même réponse: "Nous allons vous transmettre l'enregistrement dans la journée".
Nos relances et notre insistance n'y feront rien. Nous n'aurons finalement pas accès à cet enregistrement censé disculper l'entreprise de toute vente forcée. Seule information que nous obtenons: le dossier d'Esther est clos suite à la réception (presque miraculeuse) de l'un de ses courriers joignant la preuve de son envoi Bpost. Elle ne devra plus rien payer, nous précise-t-on.
Afin d'évaluer cette technique de vente, nous contactons l'association de consommateurs Test Achats. Son porte-parole Jean-Philippe Ducart nous informe que l'entreprise My Collections est bien connue des services de l'association. Depuis 2016, 1.387 plaintes ont été enregistrées sur la boîte de plaintes de l'association. 333 sont actuellement en traitement.
Jean-Philippe Ducart nous confirme que les agissements de l'entreprise sont assimilables à des "ventes forcées". En clair, cela désigne le fait de recevoir un bien ou un service sans en avoir émis le souhait. Cette pratique commerciale déloyale est interdite.
Des techniques hostiles pour forcer à l'achat
Comment les entreprises parviennent-elles à recevoir des coordonnées de clients qui assurent n'avoir pourtant rien transmis? "Elles peuvent par exemple acheter des datas ou bien se servir sur le net via des concours ou autre", nous explique le porte-parole.
Face à ces arnaques qui se multiplient, il est essentiel d'être vigilant. L'association de consommateurs conseille de :
- Contester l’achat par courrier recommandé en invoquant la vente forcée
- Mentionner éventuellement dans le courrier que le "colis" est à leur disposition (à charge pour l’entreprise de prendre les frais en charge et non au consommateur – demande régulière de la part de cette entreprise en cas de contestation)
- Le consommateur peut conserver le colis s'il le souhaite
Test Achats nous confirme que l'entreprise My Collections use de techniques hostiles pour parvenir à ses fins. Comme ce fut le cas avec notre témoin, des frais de rappel sont régulièrement envoyés et augmentent rapidement, des courriers de huissiers sont transmis. L'association de consommateurs nous indique que la société n'hésite pas à envoyer des enregistrements de l'appel initial, souvent coupés et modifiés pour prouver l'accord d'un membre. Dans ce cas, Test Achats conseille aux consommateurs de se tourner vers elle.
Mise à jour: 8h après la parution de notre article, un email nous est parvenu. Via une société de conseils juridiques, l'entreprise nous "répond". Celle-ci assure que dans le cas d'Esther, l'offre commerciale a été acceptée "sans ambiguïté". "Dans ce même appel, les conditions de l’offre lui sont expliquées clairement. Elle a reçu ces conditions aussi par écrit avec le paquet. Elle a - après réception du paquet - communiqué à mon client à n’être plus intéressé dans ce paquet et de le retourner. Ma cliente néanmoins n’a jamais reçu le paquet ni paiement pour les frais d’expédition. Pour cette raison -après 3 lettres de rappel- ma cliente a entamé -sur causes licites- une procédure de collecte", nous écrit-on. L'enregistrement vocal que l'on nous avait promis reste quant à lui inexistant.