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Narcotrafic: à peine ouvert, le procès de l'ex-maire de Canteleu suspendu pour la semaine

À peine ouvert, le procès de l'ex-maire de Canteleu (Seine-Maritime) Mélanie Boulanger, jugée avec 18 autres prévenus pour un vaste trafic de drogue, a été suspendu lundi jusqu'à la semaine prochaine pour des raisons procédurales.

Dans l'attente d'un éventuel examen d'un pourvoi en cassation, la 13e chambre du tribunal correctionnel de Bobigny a mis l'affaire "en continuation" au 3 juin. La poursuite éventuelle du procès, prévu pour durer un mois, dépendra de la haute juridiction.

Fruit de deux ans d'enquête, le tentaculaire dossier Canteleu, commune populaire de 14.000 habitants de l'agglomération de Rouen, illustre l'enracinement et la puissance grandissants des narcotrafics dans des villes de petite et moyenne tailles en France, un phénomène dont s'inquiétait ce mois-ci encore un rapport du Sénat.

Élue maire en 2014 et figure du socialisme normand, Mélanie Boulanger est poursuivie pour complicité. Elle est soupçonnée d'avoir fait pression sur les services de police pour qu'ils ne gênent pas les affaires du redoutable clan Meziani, réputé pour tenir le deal dans sa ville et y faire régner la terreur.

Veste blanche sur tenue noire, carré blond et lunettes rondes, l'ancienne maire de 47 ans, poursuivie pour complicité de trafic de drogue, est arrivée au tribunal de Bobigny le visage fermé, sans faire de déclaration à la presse. Elle s'est installée dans la salle à l'écart des autres prévenus.

À la lecture des chefs de prévention la visant, elle a d'une voix forte à nouveau démenti les faits: "Je les réfute". Le président Jean-Baptiste Acchiardi l'a ensuite enjointe de s'asseoir sur les bancs des trafiquants présumés. Ce qu'elle a fait à contrecoeur.

"Ma cliente attend que la justice lui soit rendue, que son honneur lui soit rendu. Cela fait des mois que son nom est jeté à la vindicte et en pâture, au mépris de la présomption d'innocence", a déclaré aux nombreux journalistes son avocat, Arnaud de Saint-Rémy.

Aux côté de l'ancienne maire, le tribunal de Bobigny juge pendant un mois les principaux acteurs présumés du réseau: les têtes, leurs lieutenants, des fournisseurs et blanchisseurs. Le délibéré est attendu fin juin.

- Bénéfices en millions -

Selon les éléments de l'enquête, la fratrie Meziani a soufflé le chaud et le froid sur l'élue, via son adjoint Hasbi Colak, également poursuivi.

Dans une conversation téléphonique sur écoute, un des frères l'a menacé de mettre la commune à feu et à sang, tout en lui promettant de garantir sa réélection et l'ordre public à Canteleu si elle rendait le service qu'il lui demandait.

L'ancienne tête de liste PS-EELV en Normandie aux élections régionales de 2021 a été interpellée en octobre 2021 et mise en examen pour complicité en avril 2022.

Elle a démissionné de son mandat de maire en début d'année en invoquant des "raisons de santé", après son renvoi devant la justice.

L'affaire avait débuté en septembre 2019 avec l'arrestation sur un parking de Saint-Denis de deux individus suspects procédant à une transaction de drogues. L'un était porteur de 50.000 euros en liquide, l'autre de deux kilos de cocaïne pure à 80%.

Les investigations sur l'acheteur avaient rapidement amené les policiers de Seine-Saint-Denis à Canteleu, base de la famille Meziani, soupçonnée d'être l'un des principaux acteurs du trafic de drogue en région rouennaise.

Depuis la mort en 2019 du chef de famille, Mohamed, dans un accident de la route lors d'un probable "go-fast", le relais aurait été pris par deux de ses frères, Aziz et Montacer.

L'enquête, riche en sonorisations et en écoutes, a ensuite mis au jour un important réseau d'importation et de vente de stupéfiants, écoulant aussi bien du cannabis que de l'héroïne et de la cocaïne.

Selon les estimations des policiers, leur organisation a engrangé plus de 10 millions d'euros de bénéfices annuels rien que pour la cocaïne et l'héroïne.

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