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Oui, Albert allait divorcer et tout perdre pour Sybille. C'est elle qui a refusé de signer le contrat de divorce. Si elle l'avait fait, l'histoire de la Belgique n'aurait jamais été la même car Albert n'aurait jamais été roi. Et s'il ne voit plus sa fille, c'est à cause, selon Mme de Sélys Longchamps, de "sectes" religieuses qui gravitent autour du palais. Sa fille Delphine qui, selon elle, est désormais loin de porter son père dans son coeur...
Les révélations que Sybille de Sélys Longchamps a faites au réalisateur du documentaire diffusé en deux parties sur RTL-TVI, elle les a toutes écrites dans un livre. Un livre qu’elle a enterré, au sens propre, qui ne paraitra donc jamais, « sauf si on pousse bobonne dans les orties ».
Ne pas finir par reconnaitre Delphine comme sa fille légitime serait-elle une raison suffisante? Voilà une question à laquelle Sybille de Sélys n’a pas répondu. Par contre, elle a détaillé comment, par deux fois, le roi Albert, alors prince, a demandé le divorce avec Paola.
Albert demande le divorce en 1969
Une première fois à la fin des années 60. Sybille, qui vit une histoire d’amour secrète avec Albert, demande le divorce avec Jacques Boel, son mari à l’époque. « Pour me protéger, Albert demande aussi le divorce en '69 », divorce qui n’aboutira pas. La cour a en effet usé de toute son influence sur Albert… et même sur Sybille. Son père, ambassadeur, a subi de fortes pressions pour l’amener à changer d’avis. « Mon père a été convoqué pour repasser son examen de flamand. Pendant son séjour en Hollande pour réétudier le néerlandais, la princesse Paola et une de ses amies sont allées le voir. Paola lui a dit : « Il est temps que vous teniez votre fille ». Il lui a répondu : « Il est temps que vous teniez votre mari ». Paola rencontrera ensuite Sybille : « Je sais que mon mari est très épris de vous et ce serait plus simple qu’on devienne tous amis, comme ça vous le verriez plus », lui avait-elle proposé. Une proposition refusée par Sybille.
La famille royale a également insisté auprès de leurs amis, la famille Boel, pour que Jacques Boel fasse trainer le plus longtemps possible les formalités de divorce avec Sybille, selon celle-ci. Pourtant, Albert était prêt à « tout » quitter, cette année-là, en 1969. « Mais je pense que c’est parce que mon divorce a pris très longtemps qu’il a annulé le sien. »
Si Sybille avait signé les papiers, la Belgique n’aurait jamais eu de roi Albert II
Les années passent, Sybille et Albert continuent de vivre leur amour, l’une finalement divorcée, le prince toujours lié à Paola. Puis Sybille décide de quitter la Belgique pour partir vivre en Angleterre. Albert relance alors la procédure de divorce. « Mais il y avait beaucoup de conditions, comme celle d’abandonner ses titres, et une condition qui stipulait que je ne pourrais jamais voir ses enfants. C’est ça qui m’a fait prendre conscience que je devais partir seule », explique-t-elle. Ce document, ce contrat de divorce, Eric Goens, le réalisateur du documentaire, l’a vu. Il comporte les signatures d’Albert, mais aussi de Baudouin et de tous les ministres de l’époque. Il ne manquait que la signature de Sybille. « C’est moi qui ai pris la décision » de le quitter. La Belgique aurait eu un autre destin lors de la mort de Baudouin si elle l’avait signé. « C’est vrai, mais moins bien pour la Belgique », note-t-elle. « Ce qui est plus important que mon sort ».
Le fait d’être considérée sur ce document comme une mauvaise personne, infréquentable pour les petits princes de Belgique, combinée à une lassitude de vivre continuellement dans le secret, a poussé Sybille à empêcher ce divorce. Lors de leurs vacances ensemble, Albert et Paola allaient « de boui-bouis en boui-bouis pour ne pas être reconnus ». Ils utilisaient même de faux passeports !
Albert a trompé Paola après Sybille
Après cette séparation et le départ de Sybille pour l’Angleterre, Albert « a eu des histoires superficielles. J’en connais d’ailleurs une. Il a un peu pété les plombs. Il n’est pas retourné directement chez Paola. Ils ont vécu séparés pendant 10 ans. »
Sybille et Albert se revoient, avec la petite Delphine, jusqu’à un jour de l’année 1984, 15 jours avant les 25 ans de mariage d’Albert et Paola. Sybille et Albert, qui entretenaient toujours une correspondance importante via une ligne téléphonique privée, ont été coupés… « Le fil téléphonique a carrément été coupé ! Il n’y avait plus de ligne, sans explication. Et c’est la dernière fois que j’ai vu. »
Delphine tombe dans l’anorexie
Albert reste 4 ans sans donner de nouvelles et Delphine, alors âgée de 18 ans, « a attrapé une anorexie excessivement grave. J’ai essayé de l’atteindre par tous les moyens et je lui ai dit: Si tu ne fais pas signe, tu pourrais être responsable de quelque chose de dramatique », relate-t-elle. Albert la revoit finalement, à Londres, mais il est distant et parle surtout à Delphine de ses autres enfants… Delphine a tout de même été mieux après l’avoir revu.
Des « sectes » de l’église catholique derrière sa décision de rejeter Delphine
Mais depuis lors, Albert, prince puis roi, n’a plus vu la jeune fille, devenue femme. Lors de cet appel au secours de Sybille à propos de l’anorexie de Delphine, Albert lui révèle qu’un cardinal lui avait conseillé de ne plus jamais voir sa fille illégitime. Sybille découvrira, via Mgr Danneels, le cardinal de l’époque, qu’il s’agissait d’un conseil du cardinal Suenens, qui refusera jusqu’à son dernier souffle de la rencontrer. « Pour moi la religion a beaucoup fait pour remettre le couple ensemble. Le charismatisme, l’opus dei, qui entourent le palais. Je ne suis pas sûre à 100% que Paola était derrière » la décision d’Albert de renier sa fille. « Pour moi, Albert a été manipulé par la religion, les sectes, même s’il parait qu’elles n’en sont pas … Après tout, l’opus dei et le charismatisme, c’est de l’extrémisme. »
« J’ai connu un homme intelligent et courageux, à deux reprises quand il a demandé le divorce, donc je n’ai pas compris ce revers qui est, pour moi, d’une énorme lâcheté. Jamais je n’aurais cru qu’il aurait fait une chose pareille. »
Personne n’a de doute sur le fait que Delphine est bien sa fille
Le reste de l’histoire, on la connait. Fin 1999, les médias commencent à révéler l’existence de la « fille cachée du roi ». « C’est la meilleure chose qui aurait pu arriver. A la limite, Delphine est reconnue par toute la Belgique. Y’a pas quelqu’un qui a un demi doute. Ce n’est pas moi qui suis allée sur la grand place dire la vérité, ça a été fait pour moi, et pour elle. »
Delphine a beaucoup de mépris pour lui
Pour que le roi accepte de revoir sa fille, « il faudrait un miracle », estime encore Sybille. « Je crois que Delphine espère encore. Mais elle ne le porte pas haut dans son cœur. Elle a beaucoup de mépris pour lui. Elle en souffre. On ne se remet jamais d’avoir été renié par son père. Mais elle aimerait que ça soit clarifié pour ses enfants », explique-t-elle. Quant à Paola, Sybille ne pense pas qu'elle lui reparlera. « Les gens qui le connaissent disent que si elle (la reine Paola, ndlr) partait avant lui, il me recontacterait. Mais je ne sais pas si c’est souhaitable. »
« Je lui dois tout »
Finalement, la victime de cette romance, c’est Delphine, pas Sybille. « Ma vie la plus heureuse était celle en secret. J’ai connu quelque chose d’assez exceptionnel : un vrai amour. (…) Je n’aime pas le détester. Il m’a donné un enfant, j’ai deux petits-enfants, et toute une suite que je n’aurais pas eue. Je lui dois tout. Ma vie de femme. Tout. Si je devais refaire ma vie, je ne changerais rien. »