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"L'Ukraine ne se rendra jamais", "Vous ne serez jamais seuls": rencontre historique entre Zelensky et Biden à Washington

L'Ukraine "tient ses positions et ne se rendra jamais", a lancé Volodymyr Zelensky mercredi sous les applaudissements du Congrès américain, auquel il a assuré que l'argent versé à l'Ukraine n'était pas de la "charité" mais un "investissement".

Accueilli par une ovation debout des membres de la Chambre des représentants et du Sénat, le président ukrainien, vêtu de sa traditionnelle tenue kaki, en anglais et avec la plus grande solennité, a dit: "Contrairement aux prédictions les plus funestes, l'Ukraine n'est pas tombée. L'Ukraine est vivante et combative." "La tyrannie russe n'a plus de contrôle sur nous", a-t-il encore affirmé, acclamé à plusieurs reprises lors d'un discours vibrant d'une vingtaine de minutes, qui a conclu son tout premier déplacement à l'étranger depuis l'invasion de l'Ukraine le 24 février. Au-delà du lyrisme, le président ukrainien s'est efforcé de convaincre le Congrès, qui va basculer partiellement du côté des républicains en janvier, de poursuivre son aide massive. "Je voudrais vous remercier, vous remercier beaucoup pour les aides financières que vous nous avez accordées et celles que vous pourriez décider", a-t-il déclaré. 

"Votre argent n'est pas de la charité, c'est un investissement dans la sécurité mondiale et la démocratie, que nous gérons de la façon la plus responsable" a lancé Volodymyr Zelensky, dans une réponse aux préoccupations exprimées par certains responsables conservateurs qui ne veulent plus de "chèque en blanc" pour Kiev. Et ce alors que les parlementaires doivent approuver une nouvelle enveloppe massive de près de 45 milliards de dollars d'assistance humanitaire et militaire pour l'Ukraine.

Il a par ailleurs lié le combat contre la Russie à la menace que représente l'Iran, un thème cher au camp républicain qui reproche au président démocrate Joe Biden d'être trop complaisant face à Téhéran. "Les drones mortels envoyés par centaines par l'Iran à la Russie sont devenus une menace pour notre infrastructure stratégique. Deux (Etats) terroristes se sont bien trouvés. Et ce n'est qu'une question de temps avant qu'ils n'attaquent vos autres alliés", a-t-il mis en garde.

Sur un ton parfois presque badin, le président ukrainien a aussi laissé entendre qu'il ne relâcherait pas la pression pour obtenir plus d'armement et des équipements plus lourds. "Nous avons de l'artillerie, oui", a-t-il dit, ajoutant: "Est-ce assez? Honnêtement, pas vraiment". Et il a aussi lancé que "les soldats ukrainiens peuvent parfaitement opérer eux-mêmes des tanks et des avions américains", une allusion à des équipements que Washington a jusqu'ici refusé de fournir. A la fin de son discours, Volodymyr Zelensky s'est tourné vers la cheffe de la Chambre des représentants Nancy Pelosi et vers la vice-présidente Kamala Harris, qui présidaient cette séance exceptionnelle.

"Quand j'étais à Bakhmout hier (une ville de l'est ravagée par les combats, ndlr) nos héros m'ont donné le drapeau, leur drapeau. L'étendard de ceux qui défendent l'Ukraine, l'Europe et le monde au prix de leur vie", a-t-il souligné, avant de remettre aux dirigeantes le drapeau bleu et jaune, couvert de signatures de soldats. En retour, elles lui ont remis un drapeau américain ayant été hissé au sommet du Capitole mercredi pour marquer sa visite historique.

"Vous ne serez jamais seuls", promet Biden à Zelensky

"Vous ne serez jamais seuls", voilà la promesse solennelle faite à Washington par Joe Biden à Volodymyr Zelensky, tandis que ce dernier a dit qu'il n'était prêt à "aucun compromis" sur l'intégrité territoriale de son pays.

Les deux hommes, après une conversation dans le Bureau ovale, entourés des poids lourds de leurs gouvernements, ont donné une conférence de presse pour mieux marquer encore cette visite historique, le premier déplacement à l'étranger du chef d'Etat ukrainien depuis l'invasion de l'Ukraine par la Russie, le 24 février.

"Nous sommes conscients que le combat de l'Ukraine s'inscrit dans quelque chose de beaucoup plus grand", a dit Joe Biden, Volodymyr Zelensky se tenant à ses côtés vêtu comme de coutume désormais d'un pull et d'un pantalon kakis, chaussé de lourdes bottines.

"Si nous ne résistons pas à des attaques aussi flagrantes contre la liberté, la démocratie et les principes fondamentaux tels que la souveraineté et l'intégrité territoriale, le monde sera confronté à des conséquences bien pires", a encore dit le président américain.

"Aussi longtemps" 

"Nous resterons à vos côtés aussi longtemps qu'il le faudra", a-t-il poursuivi, se disant "pas du tout inquiet" pour la solidité de l'alliance occidentale, alors que 300 jours se sont écoulés depuis le début de la guerre.

Mais il a aussi indiqué que s'il n'envoyait pas à l'Ukraine les armements plus puissants qu'elle réclame, notamment des missiles à longue portée, c'était par souci de préserver cette alliance.

Les Européens "ne veulent pas entrer en guerre avec la Russie", a-t-il dit. Dans ce contexte, si les Américains commençaient à livrer à Kiev des équipements d'un autre type, cela pourrait "fracturer l'Otan", a redouté Joe Biden.

Volodymyr Zelensky s'est toutefois félicité de l'envoi annoncé par les Etats-Unis d'un système de défense antiaérienne Patriot, le plus sophistiqué de l'armée américaine.

"C'est une étape très importante pour créer un espace aérien sécurisé pour l'Ukraine", a-t-il dit à la presse, selon la traduction d'un interprète.

Le président ukrainien, en réponse à ce qu'il entendait par une "paix juste" pour l'Ukraine, a été très clair: cela se fera sans "Aucun compromis quant à la souveraineté, la liberté et l'intégrité territoriale de mon pays".

"Enfants" 

L'"homme de l'année" du magazine Time a tenu à rappeler, dans un salon d'apparat gaiement décoré pour les fêtes, les horreurs de la guerre.

Interrogé sur le message qu'il souhaitait envoyer aux Américains, il a dit: "je vous souhaite la paix", "je vous souhaite de voir vos enfants en vie".

Mais l'ancien comédien a aussi adopté par moments un ton presque léger, aux côtés d'un président américain tout heureux de montrer leur complicité.
Une fois la batterie Patriot installée, "nous dirons à Joe Biden que nous en voulons un autre" , a-t-il dit, sur le ton de la blague.

"C'est la guerre, je suis désolé", a-t-il ensuite fait mine de s'excuser en anglais, faisant rire la salle et sourire son homologue.

Joe Biden, très attaché à la dimension humaine des relations diplomatiques, s'est réjoui d'avoir pu discuter "les yeux dans les yeux" avec Volodymyr Zelensky.

"Ce gars, au fond de son âme, il est ce qu'il dit être. (...) Il est prêt à donner sa vie pour son pays", a assuré le président américain.

Cela fait étrangement écho à d'autres propos tenus dans le passé par Joe Biden, à propos cette fois du président Vladimir Poutine, dont il a dit qu'il n'avait "pas d'âme."

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