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Près de dix ans après l'échec d'une précédente tentative, une proposition de loi pour légaliser l'aide à mourir pour les personnes malades en stade terminal a été présentée mercredi par une députée travailliste à la Chambre des Communes britannique.
"C'est un grand jour" et "le début d'un nouveau chapitre", a déclaré la députée Kim Leadbeater, venue mercredi matin remercier des militants de l'association Dignity in Dying (Dignité face à la mort) rassemblés devant le Parlement.
En début d'après-midi, elle a présenté sa proposition de loi intitulée "Terminal ill adults +end of life+ bill" ("Projet de loi pour la fin de vie des adultes malades en phase terminale"), confirmant que son texte sera débattu le 29 novembre.
Avant d'arriver au pouvoir cet été, le Premier ministre travailliste Keir Starmer s'était engagé à permettre au Parlement de se prononcer sur l'aide à mourir. Le précédent vote à la chambre basse remonte à 2015.
Le suicide assisté ou assistance au suicide est illégal en Angleterre, au Pays de Galles et en Irlande du Nord et fait encourir une peine de 14 ans de prison en cas d'aide ou d'incitation.
En Écosse, il n'est pas criminalisé en tant que tel mais une personne aidant quelqu'un à mourir peut être poursuivie pour homicide volontaire.
Les détails de la proposition de loi ne sont pas encore connus, mais elle devrait conditionner le recours au suicide assisté à l'approbation de deux médecins et d'un juge.
- "Garanties et protections" -
Comme dans d'autres pays où la légalisation d'une aide médicale à mourir a été débattue, le sujet est délicat au Royaume-Uni, entre ses partisans qui défendent un droit à "mourir dignement" et ses opposants qui craignent d'éventuelles dérives.
"Je pense que le moment est venu d'avoir ce débat", a défendu Kim Leadbeater auprès de l'AFP, assurant que son texte inclura "des garanties et des protections robustes et sûres".
Anil Douglas est venu soutenir la députée. Son père, Ian, atteint d'une sclérose en plaque, s'est suicidé en 2019 sans en parler à ses proches pour éviter toute répercussion pénale pour eux.
"Sa mort a été terrible, elle a eu lieu dans le secret, la solitude et le danger, et si la loi avait été différente (...) il aurait été beaucoup plus en sécurité", estime Anil.
Keir Starmer a précisé qu'il n'y aurait pas de consignes de vote sur ce texte.
L'archevêque de Canterbury Justin Welby, chef spirituel des anglicans, a mis en garde contre une "approche dangereuse", qui "dans tous les autres endroits où elle a été adoptée, mène sur un terrain glissant".
Les Britanniques sont majoritairement favorables à une modification de la loi, selon plusieurs sondages.
Selon le dernier en date, réalisé par le King's College de Londres et publié la semaine dernière, 63% des personnes interrogées soutiennent une légalisation de l'aide médicale à mourir d'ici à cinq ans.
- "Un véritable choix" -
"Cette loi est nécessaire parce que les personnes mourantes ont besoin de pouvoir choisir leur fin de vie", argumente Sarah Wootton, présidente de Dignity in Dying, soulignant l'inégalité entre ceux ayant les moyens de se rendre à l'étranger pour obtenir un suicide assisté et la majorité qui "souffrent ici".
"L'accent devrait être mis sur l'amélioration des soins palliatifs", plaide en revanche Alistair Thompson, le porte-parole de l'association Care Not Killing (Prendre soin plutôt que tuer) qui s'oppose au suicide assisté. Il voit un risque de "mettre la pression sur de nombreuses personnes pour mettre fin à leur vie prématurément".
M. Thompson déplore aussi le "chemin dangereux" emprunté par certains pays où l'aide médicale à mourir a été progressivement élargie.
Plusieurs territoires rattachés à la Couronne prennent également des initiatives pour faire évoluer leur droit.
En mai, le Parlement de l'île anglo-normande de Jersey a validé la préparation d'ici à 2027 d'un texte de loi en vue d'une aide à mourir ouverte aux malades en phase terminale. Des textes sont actuellement examinés sur l'Ile de Man et en Écosse, qui dispose de pouvoirs délégués en matière de santé.