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Face à l'impossibilité d'organiser des compétitions classiques pour cause de coronavirus, organisateurs et fédérations rivalisent d'imagination pour tenter de combler le vide du calendrier et offrir un palliatif aux athlètes en manque de confrontations.
Alors que la planète athlétisme est en mode stop, au moins jusqu'à la mi-août, et sera privée des deux temps forts de la saison, les Jeux Olympiques et les Championnats d'Europe, il ne se passe pas une semaine sans l'annonce d'une initiative originale pour occuper le terrain.
Avant un concours à observer depuis sa voiture dans un "drive-in" en Allemagne et des micro-meetings en République tchèque, prévus en juin, l'"Ultimate Garden Clash" a lancé le mouvement, le 3 mai, avec un affrontement entre les trois stars du saut à la perche, chacune dans son jardin: le Français Renaud Lavillenie, le Suédois Armand Duplantis, nouveau détenteur du record du monde (6,18 m), et le double champion du monde américain Sam Kendricks devaient franchir un maximum de barres à 5 m en 30 minutes.
Le format, suivi selon World Athletics en direct ou en différé par plus d'un million de personnes à travers le monde, a été reproduit avec trois des meilleures féminines (la championne olympique grecque Ekaterini Stefanidi, l'Américaine Katie Nageotte et la Canadienne Alysha Newman) le 16 mai avec un obstacle fixé à 4 m de hauteur.
"J'en ai parlé fin mars à +Mondo+ (Duplantis) et à Sam (Kendricks) et quand j'ai eu leur accord, je me suis rapproché de la Fédération internationale d'athlétisme pour trouver le meilleur concept, a expliqué à l'AFP Renaud Lavillenie, à l'origine du projet. World Athletics se posait beaucoup de questions et était dans l'incertitude sur la suite de la saison et donc ils ont été directement à bloc. Le concept va maintenant être décliné à d'autres disciplines."
"Pas de mauvaise idée"
"Le plus important en ce moment n'est pas de retrouver de vraies compétitions, c'est déjà énorme de pouvoir refaire des exhibitions", a ajouté Lavillenie, plutôt surpris d'avoir ressenti "un petit peu d'adrénaline" avec cet ersatz de concours.
En plus de cette initiative "privée", les grands meetings cherchent aussi la parade pour exister malgré la pandémie de coronavirus. Pas simple dans un sport où plusieurs disciplines partagent une même aire de jeu.
Lavillenie doit par exemple remettre ça contre Armand Duplantis le 11 juin à l'occasion du meeting d'Oslo, une étape de la Ligue de diamant transformée en exhibition et rebaptisée "les Jeux de l'impossible". Le prodige suédois (20 ans) sautera dans le mythique stade Bislett, sans aucun public, contre le local Sondre Guttmorsen, tandis que le champion olympique 2012 officiera encore une fois à la maison, à Pérignat-lès-Sarliève (centre de la France).
Toujours dans la capitale norvégienne, le double champion du monde du 400 m haies Karsten Warholm doit s'attaquer seul à la meilleure marque du 300 m haies, et la Norvégienne Karoline Bjerkeli Grøvdal sera guidée sur 3.000 m par un système lumineux installé le long de la piste sur l'allure du record national.
"En cette période où il ne se passe rien, il n'y a pas de mauvaise idée, à part prendre des risques sanitaires", note pour l'AFP Rémy Charpentier, le responsable de l'organisation du meeting de Monaco, prévu pour la reprise de la Ligue de diamant le 14 août.
"L'athlé de 2030"
"Nous, on espère rester sur un meeting traditionnel, il nous reste trois mois, prévient-il toutefois. A Monaco, on recherche vraiment la performance, c'est notre marque de fabrique. On n'est pas obligé d'être à tout prix dans l'innovation mais il faut faire ce qui marche chez soi. Et si 22 acteurs peuvent jouer au foot en Bundesliga, 10 coureurs doivent pouvoir concourir ensemble."
L'ex-décathlonien Alain Blondel, responsable du meeting de Rabat, annulé, planche lui sur de nouveaux formats pour le circuit du Pro athlé tour en France (Nancy, Sotteville-lès-Rouen, Marseille) et voit la période actuelle comme une sorte de laboratoire pour le futur.
"On peut utiliser les capacités d'organisation des grands rendez-vous, développer des idées technologiques avec des moyens modernes pour essayer de construire l'athlé de 2030, cela peut nous donner des idées pour la suite", estime-t-il pour l'AFP.
"Ces innovations, ce n'est pas de l'athlétisme au rabais, il ne faut pas voir ça comme une compétition classique, ça se rapproche plus du show télé autour d'une performance athlétique, indique-t-il. C'est important de montrer de la résilience, on se demande quelle idée trouver pour donner un peu de vie".