Une femme recluse, un fugitif faux espion et vrai escroc britannique héros d'un documentaire de Netflix, deux gendarmes blessés: un banal contrôle d'élevage canin dans un petit village de Creuse a pris depuis jeudi des allures de série TV.
Un transfert de chiens dérape
Jeudi après-midi, des chiens d'élevage détenus par un couple de britanniques à Vidaillat, un village de 180 habitants au sud de Guéret, devaient être transférés vers la SPA sous le contrôle de la DETSPP, chargée entre autres de la protection animale, et de la gendarmerie.
C'est alors que, selon la préfecture de la Creuse, au moment où "la gendarmerie demandait à l'un des conjoints de se déplacer à la brigade la plus proche", un homme "a démarré son véhicule puis percuté les deux militaires avant de prendre la fuite".
L'homme de 51 ans, au volant d'une Audi A3, a "sévèrement blessé" deux gendarmes, dont l'un d'une fracture ouverte au niveau du nez. Ils se sont vus prescrire 21 et six jours d'ITT.
Une enquête a été ouverte par le parquet de Guéret pour "tentative d'homicide volontaire sur personne dépositaire de l'autorité publique".
Cela fait 4-5 ans qu'on sait que c'est une crapule
Selon la maire de la commune Martine Laporte, l'homme, toujours en fuite vendredi, est Robert Hendy-Freegard. Le quinquagénaire, arrivé dans le village avec sa compagne en 2015, n'est pas un inconnu.
Cet escroc britannique est le héros d'un documentaire "The Puppetmaster: leçons de manipulation", diffusé sur Netflix depuis le début de l'année et d'un film de fiction, "Rogue Agent", avec James Norton et Gemma Arterton, également sur Netflix.
"Cela fait 4-5 ans qu'on sait que c'est une crapule", a raconté à un correspondant de l'AFP, Serge, qui ne veut pas donner son nom, un voisin de la maison de pierres habitée par le couple, aujourd'hui aux volets fermés.
Sa compagne, "au début, elle sortait et nous faisait un petit signe de la main comme la Reine d'Angleterre, puis elle nous a dit 'I don't speak french' (je ne parle pas français) en partant en courant", ajoute-t-il.
Il parvenait à prendre le pouvoir et le contrôle sur la vie
En 2005, Robert Hendy-Freegard avait été condamné par la justice britannique à la prison à perpétuité pour enlèvement, tromperie, vol sur des étudiants et des femmes, à qui il avait soutiré un total de plus d'un million de livres, en se faisant notamment passer pour espion du MI5, les services secrets britanniques.
Il avait été libéré en 2009, après qu'une cour d'appel avait cassé la condamnation pour enlèvements.
"Il parvenait à prendre le pouvoir et le contrôle sur la vie" de ses victimes, les forçant à vivre dans "une pauvreté abjecte", expliquait Bob Brandon, le policier en charge de l'enquête, lors du procès en 2005.
Une femme recluse
A Vidaillat, l'escroc s'était installé avec sa compagne dans une maison isolée, accessible après plusieurs lacets dans la forêt limousine. S'il ne s'y rendait que "très rarement", sa compagne y vivait "totalement recluse" et "complètement sous influence", selon la maire.
"Elle vivait dans des conditions terribles, ne sortait jamais à part dans sa petite cour, elle en était réduite à manger des châtaignes crues et des croquettes", dit le voisin qui assure l'avoir vue ainsi.
"On a vite vu qu'il y avait un souci", ajoute une autre voisine, retraitée, qui n'a pas voulu donner son nom. "On est arrivés il y a quatre ans, donc après elle. Toute sa vie c'était de sortir les chiens, ramasser leurs crottes, étendre le linge et sortir les poubelles".
Son fils et sa fille, nés d'une autre union, pensaient leur mère disparue, jusqu'à la diffusion du documentaire.
"En début d'année, je suis entrée en contact avec sa fille en Angleterre, qui cherche sa maman depuis huit ans", raconte la retraitée, "c'est en regardant Netflix que j'ai fait le rapprochement. Ma petite-fille a écrit au producteur de Netflix et j'ai eu le contact de la fille" de la recluse, raconte-t-elle.
Vendredi, selon les voisins, la quinquagénaire est partie pour l'ambassade du Royaume-Uni, avec son fils, une cousine et un ami de son fils, présents jeudi dans le village.
Selon la mairie, l'élevage canin "illicite" du couple abritait près de 30 chiens en cages et était visé par plusieurs signalements de la municipalité depuis deux ans.
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