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Les tests de Mathieu: le Huawei P30 Pro réécrit-il vraiment les règles de la photographie, comme il le prétend ?

Bluffant dans le noir et pour zoomer, le système Leica du dernier fleuron de la gamme de smartphone du géant des télécoms tape un coup dans la fourmilière. Il repousse encore les limites de la photographie sur smartphone, de moins en moins éloignée des traditionnels reflex, hybride et compact…

Lors de sa sortie à Paris, nous avons évoqué les principales caractéristiques du P30 Pro, le denier flagship de Huawei, le géant chinois des télécoms aux ambitions débordantes, qui pourrait bien réussir son pari de devenir N.1 dans les années à venir.

Deux semaines plus tard, je peux donner un avis plus précis sur les qualités de ce smartphone haut-de-gamme, vendu 999€ en Belgique dans sa version de base, déjà bien costaude (8 GB de RAM, 128 GB de stockage interne).

Il prétend "réécrire les règles" de la photographie. Un slogan très ambitieux, et quand on fait le malin, il faut assumer !
 

De la sorcellerie ?

Le P30 Pro est particulièrement brillant dans deux domaines: la photo dans la pénombre et le zoom. Ce sont habituellement deux points faibles pour la plupart des smartphones, même haut-de-gamme. Des défauts qui justifient l'existence des appareils photos traditionnels de type reflex, hybride, ou compact avec zoom puissant.

Le P30 Pro, avec son système Leica Quad Camera, pourrait bien rendre futile ces appareils photos encombrant (pour le grand public, pas pour les pros ou les amateurs avertis). En effet, il fait de véritables miracles dès qu'il fait sombre. On a l'impression qu'il allume la lumière, réellement. Pourtant, il n'a pas besoin flash, ni de "mode nuit" à activer, ni de trépied. J'ai été bluffé, le soir, toutes lampes éteintes, en prenant en photo la cage d'escalier descendant vers la cave (je ne discernais que les contours des éléments, mais aucune couleur) :

Oui, le P30 Pro voit mieux que l'œil humain dans le noir. Des confrères anglais réputés parlent de "sorcellerie". Huawei y parvient en remplaçant le filtre traditionnel RGB (Red, Green, Blue) par du RYB (Red, Yellow, Blue). C'est un peu technique, mais utilisant des pixels jaunes à la place des verts, il parvient à augmenter la lumière captée de 40%. Autre technique mise au point par Huawei: la combinaison des capteurs. Les trois principaux à l'arrière s'activent et le logiciel combine les trois prises de vue pour augmenter encore la lumière. Enfin, deux optiques sur trois à l'arrière sont stabilisées, ce qui est indispensable dans la pénombre pour ne pas avoir de flou.

Le zoom était également mis en avant par Huawei lors du lancement du smartphone à Paris. Il va jusqu'à X5, grâce à sa lentille dédiée à l'arrière, celle du bas, qui est carrée et "périscopique". Huawei utilise également les 40 MP du capteur principal en zoomant dans l'image car la photo prise est de 10MP par défaut. Le niveau de détails en X5 est inédit sur un smartphone: c'est comme si on utilisait un gros reflex… En chipotant au niveau logiciel, le P30 Pro peut monter à X10 sans qu'on remarque de défaut à l'image. Par contre, quand il va de X10 à X50, les pixels apparaissent logiquement, on voit vraiment qu'il s'agit d'un zoom numérique (comme si vous pinciez votre écran pour agrandir une image). Notez que le zoom X10 a besoin de lumière pour être réussi. Donc pour notre magnolia sous le soleil, c'est parfait :

Bien entendu, le P30 Pro s'en sort très bien pour les photos traditionnelles. Il est idéal dans toute circonstance, même en plan serré grâce à son capteur grand angle dédié de 20 MP. On lui reprochera juste de vouloir trop sublimer les couleurs, avec un ciel plus bleu que nature. Est-ce un défaut ? C'est à vous de juger: c'est beau, mais pas toujours très fidèle à la réalité.

Donc oui, avouons-le, le P30 Pro réécrit un peu la photographie grâce à sa polyvalence totale, inédite sur un smartphone. De jour comme de nuit, en grand angle ou en zoom X10, il réussit tous ses clichés, et c'est rare. Pouvoir prendre de telles photos et disposer d'une immense panoplie d'application pour les retoucher et les partager, ça porte un sacré coup à la photographie traditionnelle.

Avouons cependant qu'on n'a pas tous les jours besoin d'un tel zoom, et qu'on prend rarement des photos dans le noir. Mais les capacités du P30 Pro ouvrent le champ des possibles, comme on dit.


De gauche à droite: le zoom périscopique, le capteur principal de 40 MP, le grand-angle de 20 MP. En-dessous, à côté du flash, le capteur 3D pour la profondeur

Et le reste ?

Comme je l'avais écrit dans l'article de présentation suivant la conférence de presse, les P30 ne révolutionnent pas grand-chose dans le monde du smartphone. Certes, le P30 Pro est un peu plus rapide que la génération précédente, mais vous ne remarquerez pas trop de changements en termes de performance, car on parle ici de surpuissance, que seuls quelques jeux vidéo très gourmands peuvent réellement exploiter.

Puce Kirin 980, 8 GB de RAM, de 128 à 512 GB de stockage interne extensible par carte NM, écran OLED de 6,47" incurvé (version Pro), autonomie de deux jours grâce à la batterie de 4.200 mAh avec charge très rapide (et compatible sans fil), résistance à l'eau et la poussière (IP68), connectivité sans-fil ultra complète (LTE catégorie 21), capteur d'empreinte intégré sous l'écran. Bref, c'est du lourd, mais à 999€ (pour le Pro), c'est logique.

L'interface EMUI 9.1 ne change pas vraiment la donne, et c'est le point faible de Huawei, à qui on reproche un manque d'audace graphique et stylistique. Après, ça reste une version subtilement retravaillée d'Android, très stable, à laquelle il faut hélas ajouter la panoplie de services propres à Huawei qui ne cesse de grandir (galerie, contacts, agenda, bloc-notes, réglages, trousseau de mot de passe, le tout sauvegardé sur le cloud du géant chinois - 5 GB gratuits, puis c'est un abonnement mensuel à partir de 0,99€ pour 50 GB). C'est de plus en plus envahissant et ça a tendance à enfermer les utilisateurs dans une marque, dans un écosystème. Je préfère utiliser les services et applications de Google, souvent meilleurs et toujours transposable de marque en marque.

Le design est soigné (mais pas très original avec ce dos en verre qui aspire les traces de doigts), et la finition au top. Mais un élément m'a frappé: Huawei semble avoir enfin trouvé son identité visuelle. De loin, le P30 Pro ressemble au P20 Pro. C'est à confirmer avec la sortie du Mate 30 Pro dans quelques mois (on verra s'il ressemble au Mate 20 Pro avec ses 4 capteurs placés en carré et au milieu), mais depuis 2018, et c'est un signe de maturité, le constructeur chinois veut qu'on reconnaisse ses appareils.


 


 

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