On s'attend à beaucoup d'émotion tout ce week-end à Bastogne. La ville va accueillir ses anciens héros, ces hommes qui ont sauvé notre pays et l'Europe il y a 3/4 de siècle.
Il y a 75 ans, c'était le début de la bataille des Ardennes, la dernière offensive d'Hitler avant la défaite de l'Allemagne. Tout ce week-end, Bastogne commémorera cette bataille. Et il y aura bien entendu une célébration officielle au Mardasson en présence de nombreux chefs d'Etat du monde entier.
Mais hier soir, déjà, ces anciens combattants, ces vétérans, ces héros étaient rassemblés dans un restaurant du centre de Bastogne, la célèbre brasserie "Wagon Léo". Un vent de liberté planait déjà.
L'un d'entre eux, plus âgé, debout à l'aide d'une canne, a entonné le célèbre chant militaire 'Blood on the Risers'. Emotion dans la salle, tout le monde s'arrête. Certains filment le vétéran. Personne ne rit, tout le monde écoute, quelques uns chantent. Celui qui mène, sûr de lui, c'est Vince Esperanza, un ancien combattant de Bastogne...
"C'était une ambiance non seulement magique, mais émouvante. C'est la première fois qu'on les voit dans une ambiance comme celle-là", nous a expliqué Arnaud, le gérant de l'établissement. "C'est l'émotion du 75e anniversaire, c'est une sacrée date pour les quelques anciens combattants qui ont la chance d'être encore là aujourd'hui".
La vidéo, postée sur la page Facebook de l'établissement jeudi soir, est largement commentée et partagée. "Magnifique", "Immense respect", l'émotion est partagée par tous ceux qui regardent la vidéo. Certains admirent la "détermination inchangée" du vétéran qui accompagne son chant d'une gestuelle assurée.
'Blood on the Risers' était très populaire dans les régiments de parachutistes américains de la Seconde Guerre Mondiale. Le chante raconte en effet le dernier saut d'un parachutiste dont le parachute n'a pas fonctionné (voir les paroles ci-dessous).
Que s'est-il passé il y a 75 ans ?
À l'aube du 16 décembre 1944, Adolf Hitler lançait sur les Ardennes sa dernière offensive militaire. A 05h30, dans un matin glacial, l'artillerie allemande commençait à pilonner intensément les positions des Alliés.
Le mauvais temps et l'effet de surprise allaient être fatals aux libérateurs: pris de court, ils ne purent empêcher les chars allemands d'enfoncer leurs défenses et de se ruer sur Saint-Vith, alors noeud stratégique de communication.
Le but d'Hitler: reprendre le port d'Anvers et couper les armées alliées en deux pour pouvoir négocier un cessez-le-feu séparé avec le président américain Franklin Roosevelt, et le Premier ministre britannique Winston Churchill.
Il lance pour ce faire ses dernières forces dans la bataille, envoyant même de jeunes recrues sommairement instruites au combat.
Dernière chance d'Hitler
Face à face, deux grands stratèges militaires: le maréchal Gerd von Rundstedt pour l'Allemagne, le général George S. Patton pour les alliés.
Dernière chance d'Hitler, qui sait que la défaite sonnera le glas du IIIe Reich, la bataille qui s'engage est aussi la plus grande offensive à laquelle aient participé des GI's à ce jour.
Les Allemands sont supérieurs en nombre (20 divisions soit à peu près 250.000 hommes) mais ne dominent pas le ciel (l'aviation alliée est depuis longtemps maîtresse des airs) et connaissent surtout une grave pénurie de carburant, le dirigeant soviétique Joseph Staline leur ayant repris les champs pétrolifères de Roumanie.
Au début de l'offensive, les 6 divisions alliées ne comptaient que 80.000 hommes. Très vite, Bastogne est reprise et encerclée. La ville, qui n'a jamais constitué un objectif stratégique, restera célèbre par la résistance héroïque des GI's et le fameux "nuts" ("des nèfles! ") que le général Anthony McAuliffe lança aux Allemands qui lui proposaient la reddition des troupes alliées. La Wehrmarcht fonce sur Saint-Vith, passage obligé vers Anvers, mais aussi sur Bruxelles.
Le commandant suprême des troupes alliées, le général américain Dwight Eisenhower, comprend très vite la menace qui pèse sur l'unité du front allié. Le 17 décembre, il ordonne à toutes les forces blindées de se porter vers le secteur menacé.
Le temps, jusqu'alors exécrable, redevient favorable aux Alliés: l'aviation peut enfin décoller. Le siège de Bastogne prend fin le 26 décembre, il aura duré toute une semaine. Cette "deuxième libération" marque la fin des derniers espoirs allemands: écrasés par les bombardements, subissant de lourdes pertes en hommes, ils se replient peu à peu sur le Rhin. Le 20 janvier, les troupes de la Werhmacht se retrouvent à leur point de départ initial. C'est la fin de ce que l'histoire retiendra comme "l'offensive des Ardennes".
Au total, plus d'un million de combattants se seront affrontés sur le sol ardennais pendant cet hiver 1944. Des 600.000 soldats allemands, 100.000 ont perdu la vie, tandis que 82.000 soldats sont morts parmi les 560.000 alliés. Le souvenir de cette bataille reste très vivace aux Etats-Unis.
Les paroles de la chanson 'Blood on the Risers' en français:
C'était juste un bleu et il devait trembler de peur
Il a vérifié son équipement et s'est assuré que son paquetage était serré ;
Il a dû s'asseoir et écouter le hurlement atroce des moteurs,
"Tu ne sauteras plus jamais !"
Refrain:
Du sang, du sang, quelle putain de façon de mourir,
Du sang, du sang, quelle putain de façon de mourir,
Du sang, du sang, quelle putain de façon de mourir,
Il ne sautera plus jamais !
"Tout le monde va bien ?" a hurlé le Sergent en les regardant,
Notre héros a répondu "Oui" faiblement et s'est levé ;
Il a sauté dans le vent glacé, sa ligne s'est décrochée,
Et il ne sautera plus jamais.
(Refrain)
Il a compté longtemps, il a compté fort, il a attendu le choc,
Il a senti le vent, il a senti le froid, il a senti l'horrible chute,
La soie de son parachute de secours s'est échappée et enroulée autour de ses jambes,
Et il ne sautera plus jamais.
(Refrain)
Les suspends se sont enroulés autour de son cou, les câbles ont crevé le dôme,
Les lignes de suspensions se sont nouées autour de ses os maigres ;
La toile est devenue son linceul ; il s'est rué vers la terre.
Et il ne sautera plus jamais.
(Refrain)
Les jours qu'il a vécu et où il a aimé et ri passaient continuellement dans son esprit,
Il pensait à la fille chez elle, celle laissée derrière lui ;
Il pensait aux toubibs et s'est demandé ce qu'ils trouveraient,
Et il ne sautera plus jamais.
(Refrain)
L'ambulance était là, les jeeps fonçaient,
Les toubibs sautèrent et hurlèrent avec joie, retroussèrent leurs manches et sourirent,
Car ça faisait une semaine depuis la dernière fois qu'un 'chute avait eu un problème,
Et il ne sautera plus jamais.
(Refrain)
Il heurta le sol, ça a fait "Splatch," son sang a giclé haut,
On a entendu ses camarades dire : "une putain de façon de mourir !"
Il gisait là enroulé dans le désordre de ses entrailles,
Et il ne sautera plus jamais.
(Refrain)
Il y avait du sang sur les suspends, il y avait de la cervelle sur son 'chute,
Les intestins pendaient hors de son uniforme de parachutiste,
C'était horrible ; ils l'ont saisi et versé hors de ses bottes,
Et il ne sautera plus jamais.
Du sang, du sang, quelle putain de façon de mourir,
Du sang, du sang, quelle putain de façon de mourir,
Du sang, du sang, quelle putain de façon de mourir,
Il ne sautera plus jamais !
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