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Motard depuis de nombreuses années, Johannes déplore l’attitude d’automobilistes. Selon cet habitant de Huy, certains conducteurs empêchent les motos de les dépasser dans les files. Mais qu’en dit le code de la route ?
"Il serait bon d’effectuer une petite piqure de rappel aux automobilistes. En Belgique, la remontée de file est autorisée pour les motards", lance Johannes via
"De la route, j’en vois et j’en mange"
Pour appuyer ses dires, il se base sur sa conduite expérimentée en tant que motard. Depuis cinq ans, il se déplace quotidiennement en deux roues. La moto lui permet d’être plus mobile et facilite ses déplacements réguliers."Je parcours toute la Belgique pour mon travail en tant qu’indépendant. Je prends aussi bien les grands axes que les routes secondaires. Je l’utilise quasiment tous les jours. Je fais en moyenne entre 60 et 80.000 km par an. Donc, de la route, j’en vois et j’en mange", souligne le Hutois.
Après avoir parcouru autant de kilomètres derrière le guidon de sa moto, il dresse un constat désolant. D’après lui, de nombreux automobilistes ne respectent pas les motards. Notamment dans les bouchons. "Les véhicules circulant sur la bande la plus à gauche doivent serrer à gauche tandis que les véhicules sur les autres bandes doivent serrer à droite et ce, afin de faciliter la remontée des motos en inter-files. Trop souvent, c’est l’inverse qui se produit", déplore le motard. Il épingle certaines régions plus problématiques."Quand on remonte les files sur la E411 vers Bruxelles, cela se passe encore relativement bien, mais quand on prend la E19, là les automobilistes ne comprennent pas ce qui se passe."
Alors, quelles sont les règles en la matière ? D’après Benoît Godard, porte-parole de l’IBSR (institut belge pour la sécurité routière), le code de la route autorise bien les motards à circuler entre les files de voitures, et ce depuis 2011. Mais, contrairement à ce que pense Johannes, la loi n’oblige pas les automobilistes à serrer à droite ou à gauche. Devrait-on alors instaurer une telle obligation ? Benoît Godard n’en voit pas vraiment l’utilité. "Je pratique tous les jours les bouchons et je n’ai pas cette impression. Selon moi, la plupart des automobilistes font preuve de bonne volonté et sont conscients de la présence des motos", tempère le porte-parole. "Par contre, je constate que certains conducteurs sont distraits car ils consultent constamment leur téléphone. Du coup, leur trajectoire n’est pas toujours rectiligne."
"Les automobilistes ne font plus attention à rien. Ils sont plus occupés à envoyer des sms"
Est-ce là le nœud du problème ? En tout cas, Johannes rejoint le porte-parole sur ce point de vue."Les automobilistes ne font plus attention à rien. Aujourd’hui, ils sont plus occupés à envoyer des sms ou à téléphoner plutôt que de regarder ce qui se passe à côté de leur véhicule. Ils sont distraits par rapport à la route, ils ne font pas attention et ils déboîtent à tout bout de champ sans regarder. Et il n’y a pas que les automobilistes. Les camionneurs et les chauffeurs de bus peuvent aussi avoir un comportement dangereux', assure l’indépendant. Récemment, dans la région de Charleroi, un poids lourd lui a soudainement coupé la route pour tourner dans une rue. Et il a éprouvé des difficultés à freiner car la chaussée était glissante."C’est marquant. Les personnes qui roulent dans un véhicule avec quatre roues ne s’imaginent pas la difficulté qu’une moto peut avoir quand les routes sont plus glissantes. Quand une roue bloque, on peut se retrouver très vite par terre avec les dégâts que vous pouvez imaginer."
L’indépendant tient en effet à rappeler que les motards sont des usagers vulnérables sur la route, en raison de l’absence de carrosserie autour d’eux. "Quand une voiture nous percute, on est directement par terre, avec des conséquences qui peuvent être lourdes", souligne le Hutois. "Il faut savoir qu’une moto qui fait 380kg comme la mienne si elle me tombe dessus je peux avoir une jambe cassée ou brûlée. Malgré les protections, les dangers sont multiples."
Benoît Godart estime d’ailleurs qu’il faudrait plutôt mener une campagne contre la distraction au volant."Cela a un impact sur le risque d’accidents mais aussi sur la mobilité en général. Non seulement, ces conducteurs distraits ne voient pas les motards et peuvent changer de file sans faire attention, mais ils peuvent aussi provoquer d’autres types d’incidents."
Une vitesse excessive des motards dans les files ?
Le porte-parole de l’IBSR demande également aux motards de veiller à respecter les limitations de vitesse. Lorsqu’ils circulent entre les files, ils ne peuvent pas dépasser la vitesse de 50km/h et la différence avec les véhicules qui se trouvent sur ces bandes de circulation ou files ne peut être supérieure à 20km/h."Donc, si les véhicules sont ralentis à du 20km/h, les motards ne peuvent pas dépasser 40 km/h. Mais beaucoup roulent trop vite et certains automobilistes n’ont pas le temps de les voir arriver", indique Benoît Godard. Selon une étude de l’IBSR menée en mars 2015, le respect de cette règle laisse surtout à désirer sur autoroute: la vitesse moyenne des motards dans les files est de 72 km/h. 35 % des motards roulent même à plus de 80 km/h. "En fait, moins de la moitié des motards respectent les règles de la circulation entre les files."
Pour Johannes, le danger ne vient pas de la vitesse en elle-même."Ce sont les impacts causés par des obstacles ou le comportement irrespectueux d’autres usagers par rapport aux motards qui sont dangereux. Je ne dis pas pour autant qu’il faut rouler à 200km/h, c’est complètement absurde", estime le Hutois.
Pour éviter un accident, il semble de toute façon indispensable de faire preuve de prudence et de prévoyance lorsque l’on roule à deux roues."En tant que motard, on est quasiment obligé de rouler comme si on était purement invisibles par rapport à tout ce qui nous entoure. Et on doit prendre les devants. Il faut quadrupler de prudence, au minimum", conseille-t-il.