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Le Conseil de sécurité de l'ONU a adopté jeudi à l'unanimité une résolution qui a pour but de frapper les jihadistes du groupe Etat islamique (EI) au portefeuille en tarissant leurs sources de financement.
Pour la première fois, ce sont les ministres des Finances des 15 pays du Conseil qui se sont réunis à New York pour le faire.
La résolution, un texte technique de 28 pages mis au point conjointement par Washington et Moscou, cible directement l'EI et s'efforce de resserrer l'étau.
Elle demande aux pays "d'agir de manière énergique et décisive pour couper les fonds et autres ressources économiques" de l'EI, dont le pétrole et le trafic d'antiquités, et pour sanctionner "de manière plus active" les soutiens financiers du groupe.
Les pays sont invités à faire du financement du terrorisme "un grave crime dans leurs lois nationales", même en l'absence de tout lien avec un acte terroriste précis, et à intensifier les échanges d'informations à ce sujet, y compris entre gouvernements et secteur privé.
Ce texte "complète de précédentes mesures et renforce les outils existants", a souligné le secrétaire américain au Trésor Jacob Lew qui présidait la séance. "Le vrai test sera d'agir résolument pour l'appliquer", a-t-il ajouté, appelant à "une coopération en profondeur avec les partenaires privés".
Tout doit être fait pour asphyxier finacièrement le terrorisme", a affirmé le ministre français Michel Sapin. "Daech (l'Etat islamique) ne recule devant aucun crime pour se financer (..): il a amassé un butin de guerre exceptionnel reposant sur des sources diversifiées: contrebande, extorsions, trafics."
"La France attachera une importance particulière à la mise en oeuvre effective et rapide de cette résolution", a-t-il souligné. Il a appelé le Conseil à "allonger la liste" des individus sanctionnés pour leur soutien financier aux groupes extrémistes.
"Il faut aussi améliorer considérablement les échanges entre les cellules de renseignement financier des différents pays" et mieux contrôler les nouveaux moyens de paiement anonymes, comme les cartes prépayées que les auteurs des attentats de Paris du 13 novembre ont utilisées.
Le Conseil avait adopté en février une première résolution permettant de sanctionner les individus ou entités qui financent l'EI en lui achetant du pétrole de contrebande ou des objets archéologiques volés en Syrie et en Irak.
Un comité de l'ONU est aussi chargé depuis quinze ans de geler les avoirs financiers de tous ceux qui financent des groupes liés à Al-Qaïda. Sa liste comprend déjà 243 individus et 74 entités.
Le comité sera rebaptisé "Comité des sanctions EI-Daech et Al-Qaïda". Chaque pays est censé remettre dans un délai de quatre mois un rapport sur les mesures qu'il aura prises pour appliquer la résolution.
L'ONU devra aussi produire dans les 45 jours un "rapport stratégique" sur la menace jihadiste et sur les sources de financement de l'EI.
- 'Pression internationale' -
M. Sapîn compte sur la "pression internationale" pour que tous les pays resserrent les mailles du filet.
Il explique que le Groupe d'action financière (Gafi), organisme intergouvernemental basé à Paris, pourra dresser une liste de pays réticents à lutter contre le financement de l'EI ou peu efficaces dans ce domaine. Ces pays seront invités à redoubler d'efforts sous peine de "sanction", a-t-il indiqué à des journalistes.
La Turquie notamment devra lutter "totalement et concrètement contre les trafics" de l'EI qui passent par ses frontières.
Moscou accuse Ankara de laisser passer des camions chargés de brut volé par l'EI en Syrie ou en Irak.
Selon des experts, l'EI engrange 80 millions de dollars de revenus par mois dans les vastes territoires sous son contrôle en Syrie et en Irak.
La moitié vient de taxes prélevées sur les entreprises et les commerces et du pillage des ressources (dont les antiquités) et 40% environ de la contrebande du pétrole et du gaz.
Mais les bombardements de la coalition internationale anti-jihadistes menée par les Etats-Unis et de la Russie ont réduit ces revenus pétroliers, de même que la baisse du prix du brut.
Ces millions de dollars servent aussi à gérer le territoire que l'EI contrôle et à fournir à ses habitants un minimum de services.
Les jihadistes doivent donc transférer régulièrement de larges sommes par l'intermédiaire du système financier international, s'exposant ainsi aux contrôles.
En Irak, le gouvernement a coupé les liens entre la banque centrale et 90 agences bancaires opérant dans les territoires tenus par l'EI.