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Le projet d'agrandissement du stade Roland-Garros, défendu par la ville de Paris, va-t-il défigurer l'oeuvre de l'architecte du jardin des Serres d'Auteuil? Après des années de conflit, la justice examinera pour la première fois jeudi le fond du dossier.
Dans la dernière décision, rendue le 18 octobre, le tribunal de grande instance de Paris a autorisé la reprise des travaux d'extension, au grand dam des héritiers de l'architecte du jardin classé, Jean-Camille Formigé (1845-1926).
Le site fait depuis des années l'objet d'une bataille juridique entre les défenseurs du patrimoine d'une part, la Fédération française de tennis (FFT) et la mairie de Paris d'autre part.
La fédération prévoit de détruire des "serres techniques" et des "serres chaudes", abritant des milliers d'espèces tropicales, qu'elle juge sans valeur architecturale, pour construire un court semi-enterré de 5.000 places aux abords immédiats des serres historiques.
La mairie de la capitale, propriétaire du stade Roland-Garros et du Jardin des Serres d'Auteuil, défend un projet qui oeuvrera au "rayonnement de Paris" et qui est nécessaire au maintien du tournoi du Grand Chelem. La FFT souligne que les travaux ne visent que des serres "modernes", construites dans les années 1980 et en 2001.
- "Rayonnement" ou "bétonisation" -
Au contraire, pour les opposants, ce projet modifie l'ensemble architectural et porte donc une atteinte au droit d'auteur.
En cause, selon eux: la destruction de serres et l'arrachage d'une centaine d'arbres qui contribuaient à l'harmonie d'ensemble d'un "jardin patrimonial unique en Europe", la "bétonisation" d'une partie du site et la construction d'un stade monumental "beaucoup trop proche" des bâtiments historiques.
Une des associations opposées aux travaux, le Comité de soutien des Serres d'Auteuil, a lancé une pétition pour "sauver" ces serres, qui a recueilli près de 82.000 signatures.
La rude bataille a débuté dès 2011, quand la FFT a lancé son projet d'extension du stade Roland-Garros. Après de multiples recours, la fédération a obtenu en 2015 un permis de construire, lui-même attaqué devant les juridictions administratives comme au civil, au nom du droit d'auteur.
C'est ce dernier dossier qui va être examiné au fond jeudi et dont l'issue sera déterminante.
Ces derniers mois, le vent a plutôt soufflé en faveur de la FFT.
Le 3 octobre, le Conseil d'État avait cassé une décision de suspension du permis de construire du tribunal administratif, entraînant la reprise immédiate des travaux.
Les héritiers avaient alors attaqué au civil, dénonçant la destruction en cours des serres Formigé, et obtenu en urgence, le 6 octobre, une ordonnance de suspension.
Mais une semaine plus tard, le même tribunal autorisait la reprise des travaux, estimant "sérieusement contestable" l'atteinte au droit d'auteur, les serres visées étant "de construction récente".
Après l'examen sur le fond du dossier devant la 3e chambre civile du TGI de Paris, demeurera le recours d'associations contre le permis de construire, initié en 2015 et qui devrait être débattu devant le tribunal administratif de Paris début 2017.