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Le secteur des panneaux photovoltaïques reprend des couleurs avec 25.000 nouvelles installations l'an passé. Mais c'est surtout le cas en Flandre, alors que le solaire ne redécolle pas vraiment en Wallonie. L'explication est toute simple, et trouve son origine dans les lois régionales différentes au Nord qu'au Sud du pays.
Après plusieurs années de crise, le secteur du photovoltaïque reprend vigueur depuis quelques mois. Une tendance cependant moins marquée en Wallonie, où la baisse du prix des certificats verts en 2013 par le gouvernement wallon a ébranlé la confiance des particuliers.
L'investisseur wallon reste donc plus timide que son voisin flamand. Et cette différence Nord-Sud suscite encore plus d'interrogations quand on sait que l'investissement est pourtant plus vite rentabilisé en Wallonie, où il faut plus ou moins compter 7 ans pour un particulier, qu'en Flandre où il faudra attendre le double, soit 14 ans.
Alors pourquoi les Wallons restent-ils en retrait ?
La question pourrait générer de nombreuses réponses basées sur des allégations et sous-entendus de tous types. Mais pour déterminer la vérité, il suffit de retourner le problème. Non, les Wallons ne restent pas exagérément en retrait, mais oui, les Flamands avancent... vite. Et s'ils "écrasent" leurs voisins du Sud au niveau des chiffres, c'est tout simplement... parce qu'ils sont contraints et forcés d'installer des sources d'énergie renouvelable dans toutes les nouvelles constructions.
"En Flandre, les autorités vont beaucoup plus loin dans ce qui est imposé. Idem pour les preuves à fournir à la fin d'un chantier. Pour pouvoir construire, il faut installer une source d'énergie renouvelable. C'est assez contraignant et contrôlé, mais ils savent qu'ils font un investissement pour le futur. Et à ce niveau, il n'y a pas photo: la Flandre est déjà un pas plus loin", nous a indiqué Gauthier, responsable PEB (Performance énergétique des Bâtiments) en Flandre et en Wallonie. "On entend souvent dire que c'est parce que les Flamands sont plus riches qu'ils installent des panneaux. Mais en pratique, je peux vous garantir que ça n'a rien à voir. C'est tout simplement parce que le pouvoir en place les y pousse", a-t-il ajouté.
Que doivent faire les Flamands ?
On l'a dit ci-dessus, un candidat à la construction en Flandre ne peut donc plus tout à fait réaliser ce qu'il veut depuis le 1er janvier 2014. Il doit veiller à produire un minimum d'énergie à partir de sources d'énergie renouvelable.
Pour cela, il a le choix parmi les six possibilités suivantes:
- Un boiler solaire, qui permet de chauffer son eau à partir de l'énergie perçue grâce aux rayons du soleil
- Des panneaux photovoltaïques
- Production d'énergie biomasse: créer de l'énergie à partir de matière organique d'origine végétale, animale, bactérienne ou fongique (champignons). Cela se fait généralement par combustion.
- Installation d'une pompe à chaleur
- Chauffage ou réfrigération d'origine urbaine. Ce système est très rare. Il consiste à récupérer de l'énergie thermique (sous forme de vapeur ou d'eau chaude) d'une source de production proche (comme une usine ou une centrale nucléaire) qui permettrait de chauffer un lotissement et éviter que cette énergie soit gaspillée. Si de tels projets mettent du temps à se développer, c'est principalement parce qu'un tel réseau ne peut pas être développé pour un particulier, mais doit impliquer tout un quartier.
- Enfin, sixième et dernière possibilité: ne rien installer chez soi mais participer à un projet de production d'énergie renouvelable dans la région. "Imaginons qu'on construise une éolienne, ou même tout un parc éolien, eh bien vous pourriez décider de financer une partie du projet", explique Gauthier. Stella Vansummeren, porte-parole du ministre flamand de l'énergie, Bart Tommelein, précise que "le candidat constructeur doit, dans ce cas, acheter de quoi produire 15 kWh par mètre carré habitable de la nouvelle construction. Cela dépend donc de la taille de la nouvelle maison".
Notons encore que tout candidat à la construction qui ne respecte pas ces obligations se verra dresser une amende "qui varie en général de 500 à 5.000 euros pour les particuliers", a déclaré la porte-parole du ministre flamand de l'énergie.
Quelles sont les règles en Wallonie et à Bruxelles ?
Maintenant que nous avons détaillé les règles à observer en Flandre pour les nouvelles constructions, intéressons-nous aux deux autres régions du pays.
En Wallonie, tout d'abord, où il n'y a pas d'obligation quelconque en ce qui concerne l'apport en énergies renouvelables malgré une directive européenne qui entrera en vigueur en janvier 2021.
À cette date, toute nouvelle maison devra être labellisée "zéro énergie", ce qui signifie qu'elle devra produire autant d'énergie que ce qui s'avère nécessaire pour l'alimenter en chauffage et électricité. "Nous avons fait le choix de laisser libre le porteur de projet d’orienter et de guider ses propres priorités, tout en veillant à respecter les exigences globales 2021. Afin de respecter ces exigences, le candidat constructeur peut choisir de renforcer l’accent sur l’isolation ou bien d’équilibrer son projet entre une isolation ambitieuse et un apport d’énergie renouvelable", nous a confié Anouck Bertrand, assistante de communication au cabinet du ministre wallon de l'Energie, Christophe Lacroix.
Un choix beaucoup moins strict qu'en Flandre donc, mais qui présente quelques faiblesses sur le terrain. "Il y a des normes à respecter pour l'isolation, c'est certain, mais elles sont les mêmes en Flandre où, ce qu'on observe pour préparer l'avenir n'est pas du même niveau", révèle Gauthier, notre responsable PEB. "Par ailleurs, les contrôles sont aussi beaucoup moins poussés en Wallonie", ajoute-t-il.
A la Région wallonne, on argumente aussi que "la Flandre choisit d’imposer purement et simplement le recours aux énergies renouvelables". Une option qui n'est pas à l'étude au cabinet de Christophe Lacroix, même si on reconnaît qu'il "faut être conscient qu’avec les nouveaux renforcements d’exigence prévus au-delà de 2021, l’énergie renouvelable deviendra incontournable".
A Bruxelles, mettre l'accent sur l'isolation est aussi la priorité. Aucune obligation donc d'installer des sources de production d'énergie renouvelable dans les nouvelles constructions. Mais la Région tente de motiver les candidats en imposant des exigences PEB qui limitent la consommation en énergie d'un projet. "Dans ce cadre, les éventuelles installations de production d’énergie renouvelable contribuent à améliorer la performance du projet. En effet, la production énergétique est soustraite de la consommation énergétique globale du bâtiment", explique Katherine Jacobs, chargée de la communication au sein du cabinet de la ministre bruxelloise de l'énergie, Céline Frémault.
La situation se résume donc ici selon une équation mathématique. Un projet ne peut consommer qu'un total global d'énergie. Si l'on installe des sources de production d'énergie renouvelable, dont la production pourra être soustraite à la consommation d'énergies fossiles, on aura beaucoup plus de chances d'être dans les normes pour rester sous les minima exigés.
Notons par ailleurs que la région bruxelloise impose aussi des sanctions en cas de données erronées. "La réglementation en vigueur prévoit un régime d’amendes applicable en cas de constat d’écart entre le projet initial et la performance énergétique réelle constatée après travaux", conclut Katherine Jacobs.
"Il est temps d'accélérer le mouvement"
Au niveau de l'état des lieux, en 2016, pour 20.000 nouvelles installations de panneaux photovoltaïques au Nord du pays, on n'en comptabilise que 5.300 dans le Sud. Sur l'ensemble du secteur, la Flandre représente 72% du parc solaire belge, Bruxelles seulement 2%, la Wallonie plus ou moins 27%.
"On peut parler isolation, consommation d'énergies et tout ce qu'on veut. Mais oui, en général en Flandre, les nouvelles maisons sont moins énergivores que les nouvelles maisons wallonnes. Ce n'est pas à moi à dire si c'est bien ou pas. Mais si la Wallonie veut être prête pour 2021 tout en faisant passer les changements en douceur, il est temps d'accélérer le mouvement", a conclu le reponsable PEB.
La Belgique ne réduit pas ses émissions de gaz à effet de serre assez vite
Alors que l'Union européenne s'est fixé l'objectif de diminuer ses émissions de 35% à l'horizon 2030, la Belgique risque de manquer à ses devoirs. A politique inchangée, nos émissions n'auront baissé que de 13% d'ici là.
Ce retard s'explique essentiellement par la densité du trafic automobile, mais aussi par le chauffage des bâtiments, qui diminue plus lentement que prévu.
"Ces chiffres montrent clairement que la politique climatique en Belgique n'est pas suffisante", estime le parlementaire indépendant flamand Hermes Sanctorum. Depuis le dernier rapport fait à la Commission européenne il y a deux ans, l'amélioration est à peine perceptible.
La ministre flamande en charge du Climat, Joke Schauvliege (CD&V), concède que la situation n'est pas rose, mais rappelle que la Flandre doit encore élaborer un plan Climat et Energie pour la période allant jusqu'à 2030. Tous les Etats membres de l'UE doivent faire état de leurs progrès en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre ce mercredi à la Commission européenne.