C'est une situation plutôt inhabituelle qui dure depuis une dizaine de jours: 300 camions sont stationnés dans une prairie du Limbourg. Ils appartiennent à un transporteur hongrois, dont les chauffeurs sont rentrés, pour les fêtes, dans leurs pays. Pour les syndicats, cette scène surréaliste est une illustration supplémentaire du dumping social, en vigueur dans le secteur du transport routier.
300 camions parfaitement rangés dans une prairie à côté d’une ferme à Opglabbeek, dans la campagne limbourgeoise : ce tableau n’a évidemment pas manqué de surprendre les habitants de l’endroit. « On se demande ce qu’ils font ici. J’ai lu dans le journal que tous les chauffeurs ont été pris par des autobus pour fêter Noël et Nouvel An chez eux », révèle un riverain. Waberer’s est une importante société de transport hongroise qui fait rouler 7.000 camions en Europe. Les chauffeurs sont originaires des pays de l’Est. « Ils prennent le travail des chauffeurs d’ici. Je ne suis pas d’accord avec ça mais qu’est-ce que l’on peut faire ? Rien », soupire-t-il.
Un salaire décent pour les chauffeurs venant de l'Est
Depuis 2008 en Belgique, 6.000 emplois ont disparu dans le secteur du transport par routes. Contrairement à certaines idées reçues, les conducteurs venus de l’Est ont un salaire décent, à savoir environ 2.000 euros nets par mois. « L’employeur va payer en Hongrie 300 euros de charges patronales. Là est la différence parce qu’ici en Belgique nous avons des chauffeurs qui gagnent entre 1.700 et 2.200 euros pour faire un travail en Belgique, et l’employeur va payer 4.700-4.800 euros par mois pour le salaire. Et là on a un problème. Ce ne sont pas les sociétés qui font le dumping social, ce ne sont pas les travailleurs, ce sont les états eux-mêmes », souligne Alain Durant, chauffeur routier et président du syndicat Secop-Itsre.
Plusieurs semaines dans leur camion
Venus de Roumanie, de Pologne et de Hongrie, les conducteurs restent dans leur camion six semaines d’affilée sans rentrer chez eux. « Quand j’ai commencé dans le transport il y a 23 ans, cela m’arrivait aussi de partir 3-4 semaines de chez moi et de passer mes weekends dans le camion. Mais à cette époque-là, personne ne s’en émouvait. Je suis toujours vivant aujourd’hui et j’ai gagné mon salaire. Le jour où on me dit que je peux gagner 10.000 euros en Angleterre, j’irai là-bas », assure Alain Durant.
L’année dernière, entre les fêtes de fin d’année, les camions sont restés dans un parking sécurisé. Ils étaient visibles de l’autoroute. Dans ce champ, une fois la surprise passée, les poids lourd sont plus discrets et la location du terrain a dû coûter beaucoup moins cher.
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