Quatre mois de cours intensifs de français et un diplôme à la clé: c'est la mission de Thot, l'"école des réfugiés", qu'une poignée de bénévoles s'apprête à ouvrir mi-juin à Paris. la mission de Thot, l'"école des réfugiés", qu'une poignée de bénévoles s'apprête à ouvrir mi-juin à Paris.
Le concept est simple: des classes de dix élèves, dix heures de cours par semaine données par un enseignant unique pendant 16 semaines, afin de passer un "niveau" du diplôme de français langue étrangère (FLE).
"L'idée nous est venue au lycée Jean-Quarré, où nous faisions du bénévolat" auprès des migrants qui occupaient alors le bâtiment parisien, explique Judith Aquien, l'une des fondatrices du projet. "La question qui revenait sans cesse était: comment fait-on pour apprendre le français ?"
Partant du constat que les structures associatives existantes, si elle font "un travail remarquable", sont saturées, avec une rotation des bénévoles qui n'aide pas à la stabilisation de l'apprentissage, les trois fondatrices ont décidé de mettre sur pied leur école, qui doit ouvrir le 13 juin.
"On remplit un manque", estime Judith Aquien. Un constat largement partagé: "Pendant longtemps, on a négligé l'apprentissage de la langue dans l'intégration des réfugiés, c'est une évolution philosophico-administrative qu'on engage justement maintenant", affirme le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (Ofii), Didier Leschi.
Le projet, baptisé Thot comme le dieu égyptien du savoir, peut aussi se lire comme l'acronyme de "transmettre un horizon à tous", la langue étant le sésame indispensable, et particulièrement aride, pour des migrants arabophones ou persophones non diplômés.
Car si l'on parle beaucoup des réfugiés syriens, souvent issus de la classe moyenne et donc plus diplômés, un grand nombre de migrants arrivés récemment en France sont originaires du Soudan ou d'Afghanistan, et beaucoup ont été peu, voire pas du tout, scolarisés. C'est ce public que vise Thot, "sans distinction entre réfugiés et demandeurs d'asile", souligne Judith Aquien.
- "Crowdfunding" -
Cette fille d'universitaire, qui a "grandi au milieu des mots" et a appris très jeune à "très bien parler", l'affirme sans ambages: "La langue est une clé. Chacune des portes auxquelles j'ai frappé s'est ouverte parce que je parle bien".
Trois classes devraient voir le jour, peut-être quatre, en fonction du résultat de la collecte de fonds ouverte jusqu'à dimanche soir.
"Un étudiant coûte 1.200 euros, ce qui signifie qu'il nous faut 12.000 euros pour ouvrir une classe", détaille Imaad Ali, le directeur pédagogique du projet. "Jeudi, nous en étions à 55.000 euros" dans la campagne de "crowdfunding" (financement participatif) lancée sur le site ulule.
Car les fondateurs, qui tiennent à mettre en avant le côté "très pro" du projet, ont choisi de ne pas s'appuyer que sur le bénévolat. Si les locaux seront prêtés, les enseignants, eux, seront rémunérés, pendant les 16 semaines de cours dispensées aux migrants.
En cours du soir et de week-end, "il faudra d'abord qu'ils apprennent à apprendre", souligne Reine Berthelot, l'une des enseignantes, et "l'assiduité sera primordiale".
A la fois pour décrocher le fameux "niveau" de FLE, et pour justifier sa place dans le programme qui risque de se remplir très vite. La sélection n'a pas encore commencé, mais "on va avoir 450 demandes, ce sera un crève-coeur", soupire Judith Aquien.
Quand on leur fait remarquer que le projet n'est qu'une goutte d'eau par rapport aux besoins, les fondateurs de Thot soulignent sa "valeur d'exemple". "On lance l'initiative", explique Judith Aquien, qui espère lancer une deuxième session en octobre et remplit pour cela des demandes de subvention. Car "après, le rôle de l'Etat est de s'investir et de prendre le relais".
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