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En Wallonie, on reparle des panneaux photovoltaïques. La CWaPE, la Commission wallonne pour l'Energie, propose de prélever une redevance auprès des utilisateurs de panneaux pour l'utilisation du réseau électrique: entre 350 et 1.100 euros par an et par installation.
La cause : en fonction du moment de la journée, certains utilisateurs n’emploient qu’un tiers de l’énergie produite par leurs panneaux pour leur propre usage, les deux tiers sont réinjectés dans le réseau. Mais le soir venu, lorsque les panneaux produisent moins ou pas du tout, les utilisateurs vont donc rechercher de l'électricité sur le réseau. Et selon la CWaPE, c’est ce jeu d’injection et de récupération qui coûte de l’argent.
Un représentant de la CWaPE et des détenteurs de panneaux sont venus témoigner dans l'émission C'est pas tous les jours dimanche.
"Le réseau va devenir impayable pour les autres"
Pour Antoine Thoreau, représentant de la CWaPE, l’autorité wallonne en matière d’énergie, la raison qui pousse la Commission wallonne à proposer une redevance est très simple. "À partir du moment où l'on considère au niveau européen que l'on souhaite développer de plus en plus le renouvelable, il faut que ce renouvelable soit le mieux accepté par la population", commence-t-il par expliquer. "Aujourd'hui, un détenteur de panneaux photovoltaïques utilise le réseau lorsqu'il produit trop et ne consomme pas, et plus tard, le soir, il va prélever du réseau son utilisation", indique-t-il.
D'après le directeur socio-économique et tarifaire de la CWaPE, "plus ou moins 8% de la consommation sur les réseaux en basse tension sont couverts par le photovoltaïque, mais ces 8% continuent à utiliser le réseau". "Si on veut augmenter ces 8%, en lien avec le développement durable, il est logique que ce ne soit pas les personnes restantes, qui ne peuvent pas produire, qui doivent à elles seules contribuer au coût de l'infrastructure", explique Antoine Thoreau. "Sinon ça va devenir impayable pour les autres personnes", ajoute-t-il.
"C'est du racket"
Du côté des 131.000 utilisateurs de panneaux photovoltaïques en Wallonie, la proposition de créer une redevance passe mal. "Je voudrais requalifier ce que monsieur Thoreau appelle un tarif en un racket. Ce n'est ni plus ni moins que cela", s'exprime Régis François, propriétaire de panneaux photovoltaïques et président de l'ASBL Touche pas à mes certificats verts. "Aujourd'hui on se retrouve dans une situation où ces gens, qui ont investi des dizaines de milliers d'euros... ce n'était pas prévu au départ cette tarification. On a vendu le régulateur, son ancien président l'a défendu bec et ongle le 17 janvier 2011 devant le Parlement de Wallonie comme un mécanisme de solidarité, et aujourd'hui la solidarité vous venez nous dire que c'est aux détenteurs de panneaux de payer également pour ceux qui n'en ont pas", affirme Régis François.
Le représentant de la CWaPE invité dans l'émission tient cependant à rassurer. "Quel que soit le système qui soutient le prix des panneaux, la rentabilité de la personne qui a investi dans ces panneaux reste garantie. Quelqu'un qui décide aujourd'hui d'installer des panneaux avec les aides qui sont proposées, et compte-tenu de cette contribution aux coûts de réseau que nous envisageons, a toujours un retour sur investissement de 8 ans", dit Antoine Thoreau.
"On monte les gens les uns contre les autres"
Pour le chroniqueur Michel Henrion, le dossier des panneaux photovoltaïques est un "cauchemar". Pour rappel, il y a encore quatre ans, le gouvernement wallon affirmait qu'une famille pouvait investir dans le photovoltaïque et y gagner de l'argent. Mais pour l'expert en communication, "on trahit tout le temps un peu les gens et on monte aussi les gens les uns contre les autres".
"Il y a une très forte responsabilité des pouvoirs publics de ne pas avoir expliqué à l'époque que, finalement, tout ça c'était des subsides indirects", explique Michel Henrion. D'après lui, ce que la CWaPE fait équivaut à "un petit coup de volant pour éviter une fois de plus que le photovoltaïque n'aille dans le fossé". "Mais ça ne va pas tenir. C'est une demi-mesure qui va créer d'autres problèmes. Ceux qui ont des panneaux vont favoriser leur autoconsommation, installer des batteries pour ne pas payer la redevance, et je vois déjà la CWaPE dire qu'on pourrait ensuite taxer les batteries...", dit le chroniqueur.
Michel Henrion indique ensuite qu'il profite lui-même du photovoltaïque sans avoir de panneau. "L'expansion des panneaux fait que je paie sans doute mon prix de gros quelques centimes de moins", confie-t-il.