Partager:
Le "Monsieur éthique" du PS, porte-parole de la voix de la majorité en Belgique lors du débat de ce midi sur RTL, a expliqué pourquoi selon lui le discours anti-IVG va trop loin quand il est donné par un professeur qui a autorité sur ses élèves.
Le débat sur l’avortement est revenu cette semaine sur la table avec ce scandale : un professeur à l’UCL argumentait dans son cours pour assimiler l’avortement à un meurtre. Ce professeur a bien entendu été suspendu par sa hiérarchie, pourtant catholique. Mais cela a amené à une nouvelle manifestation qui a lieu ce dimanche dans Bruxelles, une manifestation " pour la vie ".
Sur le plateau de " C’est pas tous les jours dimanche ", Philippe Mahoux a expiqué pourquoi, selon lui, le professeur devait être suspendu et en quoi il a fauté.
L’homme est président du groupe PS au Sénat, médecin et est à la tête des dossiers d’ordre éthique pour les socialistes francophones. Il a d’abord tenu à rappeler que "je défends une éthique défendue par une large majorité de la population en Belgique et partagée par tous les partis" politiques dans notre pays.
Pour susciter le débat?
Tout part d’une note de cours de Stéphane Mercier, professeur de phylosophie à l’Université Catholique de Louvain-la-Neuve. On peut y lire, entre autre, que "l’avortement est le meurtre d’un être humain, d’une personne innocente (...) Avec l’avortement, le meurtre est même remboursé par la mutuelle".
L’homme s’est défendu en expliquant par courrier à nos journalistes que si "sur le fond, le document reflète ma position (...) le cours veut susciter la discussion. Je ne demande pas aux étudiants d’être d’accord avec moi."
Une position validée par Cyrille Kervyn, un de ses étudiants : "Très clairement, il ne nous a jamais imposé son opinion. C’est moins marqué dans la note mais au cours je vous assure qu’il a très fort insisté sur le fait qu’il voulait susciter un débat et qu’on réfléchisse par nous-mêmes aux arguments qu’il proposait."
L’UCL a justifié la suspension du professeur par ces mots : "Dans l’esprit de la loi dépénalisant l’avortement de 1990, l’UCL respecte l’autonomie des femmes à poser ce choix."
Une atteinte à la liberté d'expression?
Pour Louis Tonneau, un des manifestants anti-avortement et juriste dans la vie, il s’agit plutôt d’une atteinte à la liberté d’expression. "La question fondamentale dans l’affaire Mercier, c’est de savoir s’il y a encore une liberté d’expression dans ce pays et si elle est à géométrie variable. Quand (des gens s’en prennent à) M. Mercier parce qu’il argumente en faveur d’une position qui n’est pas la position la plus commune, je pense qu’il y a un problème pour la liberté d’expression. Quand Mme Onkelinx dit que malheureusement face aux anti-avortement, la liberté d’expression existe, ça fait mal à la démocratie."
Mais Philippe Mahoux n’est pas d’accord. Pour lui, il s’agit bien d’une faute du professeur Mercier. "Il est évidemment hors de question qu’on puisse attaquer quelqu’un pour la liberté d’expression. D’ailleurs, la manifestation peut se faire. C’est ça la liberté d’expression. Le problème n’est pas là. Le problème est le lieu et la situation d’autorité qui est faite par celui qui s’exprime, avec des étudiants et probablement un examen à la fin de l’année", a-t-il expliqué.
"Il compare les avortements à un génocide"
"Ce sont les arguments utilisés le fond du problème." Pour rappel, "l’avortement ne constitue pas au regard de la loi belge un meurtre" et le laisser croire dans un cours est très grave. "Les arguments qu’utilise M. Mercier sont ceux qui sont puisés sur une doctrine des Etats-Unis. Le postulat de départ est que l’embryon est une personne. (...) Bien entendu, je ne suis pas d’accord avec ça. L’embryon n’est pas une personne évidemment. Il y a une forme d’anthropomorphisme comme s’il était né. A partir de là, tous les arguments utilisés sont d’une agressivité gigantesque. Dire que c’est un meurtre, c’est dire que tous ceux qui participent ou acceptent ça sont des assassins ! C’est 23 pages de texte ! Si vous restez neutre par rapport à une position comme celle-là vous êtes complice de meurtre ou d’assassinat. Par rapport au nombre d’interruptions de grossesses dans le monde, il compare ça à des génocidaires !", rappelle M. Mahoux.
Les droits d'une victime de viol niés
Autre problème, selon lui : "Dans tout ce document, la femme est absente, depuis la première jusqu’à la dernière ligne. Elle ne compte pas, elle ne compte même pas si elle est victime d’un viol. Elle n’a rien à dire. C’est très important."
Quant aux arguments de M. Tonneau, il les balaie : "Ceux qui sont pour l’avortement seraient des personnes qui n’accompagneraient pas les familles en difficulté ? C’est une caricature habituelle."