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Débuts poussifs de la vaccination des enfants en France

Entre la difficulté à décrocher un rendez-vous et la réticence de nombreux parents, la vaccination des enfants a commencé en France de façon poussive: si les autorités sanitaires espèrent une accélération, certains se demandent si le timing est vraiment le bon.

D'abord ouverte mi-décembre aux enfants de 5-11 ans susceptibles de faire des formes graves du Covid-19, la vaccination a quelques jours plus tard été élargie à tous les enfants de cette tranche d'âge.

Celle-ci démarre "doucement", a reconnu vendredi Alain Fischer, le "Monsieur vaccin" du gouvernement. A la date du 9 janvier, 115.000 enfants de cette classe d'âge avaient reçu une première injection, soit 2%, a indiqué le ministère de la Santé mardi.

Comment expliquer un début si timide?

D'abord car les enfants ne peuvent pas être vaccinés partout.

Actuellement, la vaccination des enfants est possible dans 505 centres, contre 350 la première semaine de janvier et 100 en décembre, selon le ministère, qui espère augmenter ces chiffres.

Cette campagne peut aussi être assurée par les médecins de ville et pharmaciens.

"Les pédiatres peuvent vacciner mais cela implique une certaine logistique", raconte Fabienne Kochert, qui exerce à Orléans.

"Il faut faire la demande de doses à son pharmacien et nous sommes limités à un flacon par semaine, ce qui représente une injection pour dix enfants. J'ai passé une commande fin décembre, je n'y aurai accès que le 15 janvier", ajoute-t-elle.

Autre obstacle: pour certains parents, la prise de rendez-vous s'est avérée plus complexe que prévu.

En Loire-Atlantique, Caroline, freelance dans le journalisme et la communication, a réussi samedi à faire vacciner ses deux enfants de 7 et 10 ans, non sans peine. "Sur les sites de rendez-vous en ligne, on ne trouvait pas de créneau avant un mois".

C'est suite à un tweet de son conjoint que le couple a été aiguillé vers un médecin généraliste en mesure de vacciner avec des doses pédiatriques.

"On ne nie pas le fait que (le nombre de rendez-vous disponibles) ne soit pas suffisant", concède-t-on au ministère, en indiquant que cela se chiffrait à "5.800 cette semaine, 27.000 d'ici au 30 janvier et 50.000 fin février".

"On mobilise les acteurs pour augmenter encore ces chiffres", ajoute-t-on de même source.

- "Caduc" -

Mais au-delà de l'offre, se pose le problème de la demande.

Selon une enquête diligentée notamment par l'Inserm, deux tiers des parents (67%) d'enfants âgés de 5 à 11 ans sont défavorables à leur vaccination.

Mené par l'Observatoire régional de la santé Provence-Alpes-Côte d'Azur, le sondage a été réalisé avant Noël, c'est-à-dire avant que la Haute autorité de la santé (HAS) ne la recommande.

Vendredi, M. Fischer a concédé que pour accélérer la vaccination des plus jeunes, il faudrait "faire de la pédagogie".

Il a aussi regretté que suite à une demande du Conseil d'Etat, l'accord des deux parents, et non plus d'un seul, soit désormais nécessaire, y voyant "un obstacle".

Père de deux enfants de 6 et 9 ans, Sylvain, cadre dans l'audiovisuel en région parisienne, ne voit pas aujourd'hui "l'urgence de les faire vacciner".

"Si on nous prouve par A+B que c'est nécessaire on le fera, mais vu la vague actuelle, on se demande si ce ne serait pas déjà trop tard" pour l'endiguer.

Pour ses partisans, la vaccination des 5-11 ans a des vertus collectives: limiter les contaminations venant des enfants.

Les sociétés savantes de pédiatrie se sont prononcées pour une vaccination rapide de tous les enfants présentant des maladies chroniques les exposant à un risque de forme grave de Covid.

Mais la campagne de rappel vaccinal des adultes reste la priorité et la vaccination des enfants ne doit pas la freiner, ont-elles estimé.

"Il faut que cette vaccination ait un sens, qu'elle serve à bloquer la transmission, or avec le variant Omicron extrêmement contagieux, c'est totalement caduc", tranche l'infectiologue Benjamin Davido.

"Il ne faut pas oublier que la vaccination est un traitement préventif", ajoute-t-il. "Démarrer une campagne en plein pic épidémique, avec un vaccin prévu pour une autre souche du virus, ne va certainement pas permettre d'infléchir la courbe".

Selon lui, la vaccination des enfants pourrait s'intensifier si les hospitalisations des plus jeunes grimpaient soudainement, créant un sentiment de panique, ou bien si la vague actuelle s'avérait beaucoup plus longue qu'attendu. Deux conditions qui restent à ce stade des hypothèses.

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