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Les armes dites "fantôme", fabriquées avec des imprimantes 3D et intraçables, sont à nouveau sous le feu des critiques aux Etats-Unis après le meurtre à New York d'un patron de l'assurance santé, probablement tué avec une arme de ce type.
Rob Pincus, militant pro-armes à feu, a confié qu'il s'est inquiété lorsque la police a annoncé avoir trouvé un pistolet "fantôme" sur Luigi Mangione, le tireur présumé arrêté lundi. Pas inquiet en raison du danger des armes intraçables, mais parce que la médiatisation de l'affaire allait provoquer "une nouvelle vague d'attaques" contre leurs fabricants. Le meurtre a en effet relancé le débat sur les armes "fantômes", de plus en plus utilisées pour commettre des crimes.
Ces armes en kit peuvent être fabriquées à la maison, parfois en quelques minutes, pour quelques centaines de dollars et à l'aide d'une connexion internet. Et elles sont de plus en plus répandues: les récupérations par la police d'armes "fantômes" sur les scènes de crime ont bondi de 4.000 en 2018 à près de 20.000 en 2021.
Avantage pour les criminels: à l'inverse des armes distribuées par des vendeurs habilités, elles ne portent pas de numéro de série et ne peuvent donc pas être tracées par la police.
Le Giffords Law Center, qui lutte contre la violence par arme à feu, a qualifié ces armes de "rêve criminel devenu réalité". Plusieurs villes, dont San Francisco, San Diego et Los Angeles, ont adopté des textes limitant ou bannissant la vente de ces armes fabriquées avec des imprimantes 3D.
"Félicitations"
Mais pour Rob Pincus, qui organise chaque année un concours de fabrication d'armes à feu artisanales, leur production est simplement un passe-temps pour les passionnés. "Ca se rapproche davantage d'un club de lecture du +Seigneur des anneaux+ qu'un club de +flics en herbe+", assure-t-il.
Après le meurtre de Brian Thompson, le directeur général d'UnitedHealthCare, certains sont néanmoins, sur les réseaux sociaux, bien moins candides. Un internaute a ainsi lancé "félicitations" au créateur présumé du modèle de l'arme, disant qu'il a permis le "premier assassinat de haut niveau avec une arme imprimée en 3D".
Le meurtre a provoqué une onde de choc dans les milieux d'affaires mais il a aussi suscité des critiques virulentes à l'encontre du secteur de l'assurance santé aux Etats-Unis, accusé de s'enrichir sur le dos des patients. Selon Cody Wilson, fondateur d'un site qui distribue des modèles d'armes pour imprimantes 3D, certains concepteurs se sont retirés d'Internet depuis le meurtre. "Il y a beaucoup d'implications juridiques (...), les forces de l'ordre ont maintenant le pouvoir de pénétrer dans les groupes de concepteurs", souligne-t-il.
Aux Etats-Unis, le droit au port d'arme est protégé par le célèbre deuxième amendement de la Constitution, et il est tout à fait légal de fabriquer une arme pour un usage personnel.
Mais en 2022, le président démocrate Joe Biden a promulgué un décret soumettant ces armes "fantômes" aux mêmes exigences que les armes commerciales, une règle contestée par les militants pro-armes devant la Cour suprême.
Les vendeurs des pièces nécessaires pour monter ces armes doivent donc désormais procéder à une vérification des antécédents des acheteurs potentiels ainsi qu'inclure un numéro de série sur l'arme vendue.
Tom Chittum, ancien responsable du bureau fédéral notamment chargé du contrôle des armes, l'ATF, estime qu'il est probable que le nombre d'armes imprimées en 3D augmente avec les avancées technologiques, tout en estimant qu'il "n'y a aucune raison de penser que les armes 3D ont rendu le monde plus dangereux".