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A Cannes, coquillages, crustacés et chefs étoilés

Longtemps à Cannes, on mangea cher et pas bien. Désormais on y mange pour très cher et très bien: les chefs stars en résidence sont devenus des étoiles à part entière du microcosme du festival.

Jean Imbert, qui a repris il y a un an les cuisines du Martinez, a dévoilé pendant le festival sa nouvelle version du restaurant gastronomique La Palme d'or.

Le chef français, qui n'a pas raté un festival de Cannes depuis l'adolescence, y papillonne, accueillant au bar ses copains du 7e art.

C'est d'ailleurs lui qui a concocté le premier dîner rose bonbon, Barbie oblige, pour le jury présidé par Greta Gerwig.

Mes premières fois à Cannes, "je cuisinais à gauche à droite en échange d'un billet pour un film, je me faisais refouler du tapis et je devais aller courir au kiosque acheter un nœud papillon en vitesse".

Dans ce restaurant décoré comme un yacht, en teck lustré, le client se glisse jusqu'à une terrasse somptueuse avec vue sur la Croisette et le turquoise de la mer.

De l'entrée au désert, on plonge dans la baie cannoise: poisson de roche, gamberini crue, gravlax de rouget à l'aïoli, jusqu'au citron givré de Menton, autre ville de la Côte d'Azur.

Jean Imbert a pensé l'expérience comme entièrement dédiée au 7e art, avec menu comme un scénario annoté, mignardises servies dans des claps de film et diner sous le short de "Raging Bull" ou les lunettes de DiCaprio dans "Le Loup de Wall Street".

- 600 personnes -

Producteurs, acteurs, patrons, stars de la télévision, de la mode, des réseaux sociaux enchaînent les repas d'affaires et les assiettes instagrammables pendant la quinzaine.

Le lieu le plus couru pour s'attabler est "La Terrasse d'Albane", du nom de la papesse de l'événementiel Albane Cleret. Sur ce toit bétonné, 600 personnes viennent chaque jour, sur invitation extrêmement sélective, manger, prendre un café ou signer des contrats.

Cette année le chef italo-argentin aux trois étoiles Mauro Colagreco a quitté son restaurant, Le Mirazur, à Menton pour tenter l'aventure du gratin provençalo-hollywoodien.

"Il faut que les plats partent vite, les gens n'ont pas plus d'une heure par rendez-vous. Parfois ils ont même deux déjeuners. Ils vont prendre une entrée ailleurs, le plat chez moi. C'est assez intense".

"C'est toujours un challenge de prendre des repères là où on n'en a pas", ajoute-t-il.

Saveurs provençales avec les codes des classiques méridionaux -- carpaccio, gambas, comme les fleurs de courgette farcie, qui arrivent dans une généreuse assiette jaune comme un soleil.

Ces chefs sont sommés de sortir de cuisine et enchainent les selfies.

"Je suis quelqu'un qui aime bien rester les pieds sur terre, je n'ai aucune envie de devenir un personnage, je veux rester Mauro", implore ce chef engagé en parallèle sur des combats autour de l'alimentation circulaire.

- Affogato -

Dans la station azuréenne, l'offre de restauration est notoirement connue pour être excessivement chère, les autorités fermant les yeux le temps du festival sur ces envolées, qu'elle tente de réguler hors saison.

Les jeunes parisiens de Vecchio, le tandem Gianmarco Gorni et Hubert Niveleau, ont sauté sur l'occasion, quand l'agence d'événementiel Nomade leur a proposé de créer une cuisine éphémère sur leur plage privée.

"La plage, c'est un gros challenge, la brigade, le lieu, le public", explique d'emblée le chef italien.

"La plupart des restaurateurs qui viennent ici sont des marques établies depuis des années, c'est un challenge de délocaliser un jeune nom", qui n'a que six mois d'existence, se réjoui son associé.

Chez Vecchio, les spaghettis au homard approche les 100 euros, mais s'arrache, comme sa version plus accessible aux palourdes.

Pour les lendemains difficiles, le chef conseille ses emblématiques "pâtes à la vodka", pour "soigner le mal par le mal" et le très à la mode affogato, la boule de glace vanille qui vient percuter un expresso et réveille pour la projection d'après.

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