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Cela fait de nombreuses années que Bill Gates, l’ex-patron de Microsoft, est compté parmi les plus grandes fortunes de la planète. Une position aisée que le milliardaire accompagne de dons réguliers et d'un engagement dans des causes humanitaires.
Cette semaine, sur Twitter, Bill Gates a fait un pas de plus dans son envie d’améliorer le monde et a annoncé avoir pris une décision radicale: léguer sa fortune. Oui, mais à sa fondation Bill & Melinda Gates, créée en 2000, "une organisation à but non lucratif luttant contre la pauvreté, la maladie et les inégalités dans le monde" selon son site web.
Il a indiqué qu'il allait en augmenter le budget annuel de 9 milliards de dollars. Ce à quoi s’ajoutera 20 milliards en un coup. Il s’explique sur Twitter: "Pour l'avenir, je prévois de donner la quasi-totalité de ma fortune à la fondation. Je descendrai et finirai pas disparaître de la liste des personnes les plus riches du monde. J'ai l'obligation de restituer mes ressources à la société de manière à avoir le plus grand impact possible pour réduire la souffrance et améliorer les vies. Et j'espère que d'autres personnes en position de grande richesse et de privilège s'engageront également dans ce moment", écrit-il. Bill Gates ne se sentirait-il plus à sa place sur le prestigieux palmarès ?
Les critiques envers la fondations
Rappelons que la Fondation Bill & Melinda Gates fait toutefois l'objet de nombreuses critiques. Datagueule, une émission de la chaîne publique française, rappelle par exemple que l'argent de l'organisation "n'est pas directement distribué aux bonnes oeuvres". "La fondation consacre seulement 5% de ses avoirs aux dons, le minimum légal pour bénéficier de l'exonération fiscale. Tandis que les 95% sont investis. Un trust (ndlr: une structure juridique, qui sert de fonds d'investissement dans ce cas) rattaché à la fondation se charge de les placer dans les énergies fossiles, avec Total et BP, dans les OGM avec Monsanto et Bayer, ou encore dans l'industrie de l'armement. Une fondation qui alimente les fléaux contre lesquels elle prétend lutter. La charité se fout de l'hôpital", indique le reportage.
Dans son livre L'art de la fausse générosité. La fondation Bill et Melinda Gates, le journaliste Lionel Astruc pointe notamment les conflits d'intérêt liés à l'organisation. Selon l'ancien reporter de L'Express et de Libération, la fondation aide des entreprises à conquérir des marchés sous couvert de philanthropie. "Souvent, on constate que les entreprises qui sont dans les placements du trust de la fondation [...] font également partie des bénéficiaires des dons. Donc là il y a un vrai problème. C'est-à-dire qu'on donne de l'argent à une entreprise qui va vous en rapporter. [...] Notamment Coca-Cola, qui en 2014 a eu 138 millions d'euros de placements du trust, et qui par ailleurs profitait de programmes destinés à former 50.000 agriculteurs pour qu'ils puissent cultiver des fruits de la passion au Kenya (ndlr: fruits destinés à Coca-Cola). Pour Monsanto, c'est le conflit d'intérêt encore plus énorme. A tel point qu'un ancien haut responsable de Monsanto fait partie de l'équipe de la fondation aujourd'hui. La fondation, en Afrique, c'est le cheval de Troie des OGM et de Monsanto", explique Lionel Astruc dans une interview (voir ci-dessous).
De son côté, la revue scientifique The Lancet a réalisé une analyse sur les 1.094 subventions mondiales pour la santé accordées entre 1998 et 2007 par la fondation Bill & Melinda Gates. L'enquête révèle notamment qu'une large partie des dons dans le domaine de la santé sont accordés à des organisations américaines ou des organisations supranationales. Une situation qui empêche les pays et régions aidées de développer leurs infrastructures et leurs outils de recherches. L'analyse indique également que la fondation préfère soutenir des programmes qui vont permettre le développement de marchés exploitables par des entreprises plutôt que d'autonomiser les populations en difficulté. "A chaque fois qu'il y a deux solutions, à savoir un remède naturel fabriqué localement par les populations locales, et un vaccin qui va être revendu par un grand laboratoire venu de l'extérieur d'un pays riche, la fondation Gates choisit les maladies qui font appel à l'ouverture de marchés, à la création de vaccins", dénonce Lionel Astruc.