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Les insurgés islamistes nigérians de Boko Haram ont abattu neuf pêcheurs dans un village près des rives du lac Tchad, devenu l'un des épicentres de l'insurrection et où l'armée tchadienne les affronte depuis mi-juillet.
Après avoir subi de lourds revers militaires au début de l'année dans leurs fiefs du nord-est nigérian, les islamistes ont multiplié ces dernières semaines les attentats-suicides meurtriers au Nigeria mais également, pour la première fois, au Tchad et au Cameroun voisins.
Dans la nuit de lundi à mardi, ils ont frappé une nouvelle fois la région de l'Extrême-Nord du Cameroun, tuant au moins 8 villageois et en enlevant 135 avant de regagner le Nigeria.
Quelques heures plus tard, mardi, c'est un groupe de pêcheurs nigérians qui tombait dans une embuscade tendue par les islamistes sur la route reliant la ville de Monguno à celle de Baga, sur les rives du lac Tchad.
Au total, 17 pêcheurs à bord de deux minibus faisaient route vers Baga lorsque l'attaque s'est produite, a expliqué à l'AFP Grema Ari, un survivant de l'attaque. Le minibus dans lequel il voyageait a pu faire demi-tour mais celui en tête du convoi a été contraint de s'arrêter et les insurgés de Boko Haram ont fait descendre les passagers et les ont abattus, a-t-il décrit à l'AFP.
"Plus tard, des soldats ont ramené les corps de nos neuf collègues à Monguno, qui présentaient des impacts de balles", a précisé le survivant.
Le 27 juillet, dix pêcheurs avaient été égorgés par les insurgés dans trois villages proches de Baga.
Les villages de pêcheurs situés autour de Baga avaient tous été désertés en janvier, après une des attaques les plus meurtrières jamais commises par le groupe islamiste. Des centaines, voire des milliers de personnes avaient été tuées, des centaines de femmes et d'enfants enlevés.
Selon Abubakar Gamandi, responsable du syndicat de pêcheurs de l'Etat de Borno, les habitants de la région ont commencé à revenir depuis un peu plus d'un mois dans certains villages sécurisés par l'armée, pour relancer leur commerce de poisson.
La région du lac Tchad, dédale de centaines d'îlots et de chenaux cachés entre les hautes herbes, est devenue un lieu de repli pour le groupe islamiste.
Le Tchad, qui joue un rôle prépondérant dans les efforts militaires régionaux pour venir à bout de Boko Haram, a lancé mi-juillet une vaste offensive sur les îles tchadiennes du lac, mobilisant quelque 1.000 hommes. L'armée tchadienne a affirmé mercredi avoir tué sept islamistes dans ces combats, ajoutant que l'opération de "ratissage" se poursuivait.
- Sacs à main contenant des explosifs -
Le Tchad a lancé son opération avant même le lancement effectif de la nouvelle Force d'intervention conjointe multinationale (MNJTF) mise en place par le Nigeria, le Niger, le Tchad, le Cameroun et le Bénin et qui doit compter 8.700 hommes.
Cette nouvelle force, dont l'entrée en action est prévue courant août selon le président nigérien Mahamadou Issoufou, doit permettre de mieux coordonner les efforts militaires de ces pays pour annihiler la menace que fait peser Boko Haram sur la stabilité de la région.
Ces dernières semaines, le groupe a perpétré cinq attentats-suicides dans la région camerounaise de l'Extrême-Nord, des attaques inédites qui ont frappé les villes de Fotokol et Maroua.
La dernière attaque en date sur le sol camerounais, dans la nuit de lundi à mardi, a vu un groupe de combattants investir le village de Tchakamari.
"Ils ont tué 8 personnes, deux femmes et six hommes. Les hommes étaient des membres du comité de vigilance de Tchakamari", a affirmé à l'AFP un membre du comité de vigilance (milice d'autodéfense composée d'habitants) d'un village voisin, sous couvert d'anonymat.
"Ils ont pris 135 personnes et sont partis avec elles. Ce sont les habitants du village qui ont compté le nombre de personnes enlevées. Ils ont brûlé beaucoup de maisons", a-t-il ajouté. Ce bilan a été confirmé par une source policière.
Mercredi, le ministre camerounais de la Communication, Issa Tchiroma Bakary, porte-parole du gouvernement, a par ailleurs rapporté sur la radio d'Etat l'interpellation la semaine dernière dans l'Extrême-Nord de "deux jeunes filles âgées respectivement de 19 et 21 ans (...) en possession de deux sacs à main contenant des engins explosifs".
Face à cette situation de plus en plus instable, Yaoundé a annoncé l'envoi dans le lointain Extrême-Nord de 2.000 soldats supplémentaires.